Chapitre III
  1. Un employeur peut-il faire travailler un salarié pour un salaire moindre que celui fixé par le gouvernement ?
  2. Est-il possible de faire travailler un salarié sans salaire ?
  3. Un employeur est-il obligé de rémunérer le salarié pour toutes les heures de travail ?
  4. Est-ce que le salarié peut renoncer à son droit à un salaire ?
  5. Un employeur peut-il convenir avec un employé d’une période d’essai sans que le salarié soit rémunéré ?
  6. Est-ce qu’un employeur peut refuser de rémunérer un salarié pendant la période de formation préalable au début de l’emploi ?
  7. La présence précédant le début du quart de travail doit-elle être rémunérée ?
  8. Le salarié entièrement rémunéré à commission peut-il exiger de recevoir le salaire minimum s’il n’effectue aucune vente ?
  9. Un employeur peut-il faire exécuter un travail par un salarié sans rémunération en guise de mesure disciplinaire ?
  10. L’employeur peut-il payer le salaire minimum autrement qu’en argent ?
  11. Est-ce que l’on peut retenir comme élément du salaire la valeur des repas pris par un salarié ?
  12. Quels sont les éléments qui ne peuvent être inclus dans le salaire du salarié ?
  13. Un employeur peut-il accorder à un salarié un taux de salaire inférieur à celui consenti aux autres salariés qui effectuent les mêmes tâches dans le même établissement, pour le seul motif que ce salarié travaille habituellement moins d’heures par semaine ?
  14. Est-ce que le salaire peut être payé autrement qu’en espèces ?
  15. Est-ce que l’employeur peut imposer au salarié le virement bancaire comme procédé de paiement du salaire ?
  16. Est-ce que le paiement du salaire doit être effectué à intervalles réguliers ?
  17. Quel est le but de donner au salarié un bulletin de paie ?
  18. Est-ce que l’employeur peut effectuer une retenue sur le salaire lorsque le salarié lui doit de l’argent ?
  19. À qui appartient le pourboire versé directement ou indirectement par un client ?
  20. Comment déterminer si un travailleur est un employé à pourboires ?
  21. Qu’est qu’un pourboire versé directement ?
  22. Qu’est-ce que des frais d’administration ?
  23. Est-ce que l’employeur peut imposer un partage des pourboires entre les salariés ?

Suite : La durée du travail | La durée maximale du travail

3.1 Un employeur peut-il faire travailler un salarié pour un salaire moindre que celui fixé par le gouvernement ?

Il est bien établi que nul employeur ne peut faire travailler un de ses salariés sans lui payer le salaire minimum que le gouvernement est autorisé à fixer. Une telle façon de faire serait contraire à l’ordre public.

3.2 Est-il possible de faire travailler un salarié sans salaire ?

Selon les dispositions de la Loi sur les normes du travail, il est interdit et illégal au Québec de faire travailler un salarié sans rémunération, et ce, pour chacune des heures où celui-ci effectue une prestation de travail.

3.3 Un employeur est-il obligé de rémunérer le salarié pour toutes les heures de travail ?

L’ordre public exige que le salarié touche le salaire minimum pour toutes les heures de travail qu’il effectue dans une semaine pour le bénéfice de l’employeur.

3.4 Est-ce que le salarié peut renoncer à son droit à un salaire ?

Étant donné que la loi est d’ordre public, il ne peut y avoir renonciation par un salarié à son droit à un salaire.

3.5 Un employeur peut-il convenir avec un employé d’une période d’essai sans que le salarié soit rémunéré ?

Dans les faits, un employeur ne peut convenir avec un employé d’une période d’essai, ou d’une période de probation, pendant laquelle ce dernier ne serait pas rémunéré. Dans cet exemple, il s’agit d’une situation où le salarié est à la disposition de l’employeur sur les lieux du travail «en attente de travail».

3.6 Est-ce qu’un employeur peut refuser de rémunérer un salarié pendant la période de formation préalable au début de l’emploi ?

Un employeur ne peut refuser de rémunérer un salarié pendant la période de formation préalable au début de la prestation de travail de l’employé. Dans cet exemple aussi, il s’agit d’une situation où le salarié est à la disposition de l’employeur sur les lieux du travail «en attente de travail».

3.7 La présence précédant le début du quart de travail doit-elle être rémunérée ?

La présence obligatoire sur les lieux de travail dans le but de recevoir de l’information et des directives doit être considérée comme du temps travaillé entraînant nécessairement une rémunération.

La présence non obligatoire sur les lieux de travail dans le but de recevoir de l’information et des instructions pour améliorer les conditions de travail du salarié peut, également, être considérée comme du temps travaillé entraînant le paiement d’une rémunération.

3.8 Le salarié entièrement rémunéré à commission peut-il exiger de recevoir le salaire minimum s’il n’effectue aucune vente ?

Le salaire minimum est dû à un salarié rémunéré à la commission, et ce, même s’il n’a effectué aucune vente. Toutefois, le salarié entièrement rémunéré à commission ne peut exiger le salaire minimum s’il travaille dans une activité à caractère commercial et en dehors de l’établissement et si ses heures sont invérifiables.

3.9 Un employeur peut-il faire exécuter un travail par un salarié sans rémunération en guise de mesure disciplinaire ?

Il est bien établi depuis longtemps qu’un employeur ne peut faire exécuter une prestation de travail par un salarié sans rémunération, par exemple en guise d’imposition d’une mesure disciplinaire.

3.10 L’employeur peut-il payer le salaire minimum autrement qu’en argent ?

En tout temps et dans tous les cas, le salaire minimum doit être payé au salarié en argent et non sous forme d’avantages évaluables en argent, telle la fourniture d’un appartement.

3.11 Est-ce que l’on peut retenir comme élément du salaire la valeur des repas pris par un salarié ?

On ne peut retenir comme élément du salaire la valeur des repas pris par un salarié. Cette façon de faire est illégale, car contraire aux dispositions de la loi qui sont d’ordre public de protection.

3.12 Quels sont les éléments qui ne peuvent être inclus dans le salaire du salarié ?

Par exemple, l’on ne peut retenir comme élément du salaire la valeur pour la location d’un espace d’entrepôt. De plus, il est interdit à un employeur de déduire du salaire minimum la valeur d’un espace de garage qu’il fournit au salarié. De même, la valeur de l’usage d’une automobile ne doit pas entrer dans le calcul du salaire minimum.

3.13 Un employeur peut-il accorder à un salarié un taux de salaire inférieur à celui consenti aux autres salariés qui effectuent les mêmes tâches dans le même établissement, pour le seul motif que ce salarié travaille habituellement moins d’heures par semaine ?

Non, sauf si le salarié gagne un taux de plus de deux fois le salaire minimum. La loi exige que le tribunal examine les tâches effectuées par les salariés à temps partiel et par les autres catégories d’employés. Ensuite, s’il en conclut que tous les autres salariés effectuent les mêmes tâches dans le même établissement, il doit déterminer si l’employeur a invoqué un motif justifiant que les salariés à temps partiel reçoivent un taux horaire inférieur aux autres employés.

Un employeur doit payer deux catégories de salariées, soit des vendeuses à temps partiel et des vendeuses à temps réduit, le même salaire, et ce, même si les vendeuses exécutent des tâches propres à chacune de deux catégories, si, dans les faits, la structure des tâches établie n’est pas respectée et qu’en somme, les vendeuses, autant à temps partiel qu’à temps réduit, effectuent le même travail.

De plus, la loi prévoit maintenant une protection pour le salarié concernant les disparités de traitement fondées uniquement sur la date d’embauche à l’égard d’un régime de retraite ou d’avantages sociaux.

3.14 Est-ce que le salaire peut être payé autrement qu’en espèces ?

Un salarié a le droit d’exiger de recevoir son salaire en espèces, et on ne peut le forcer à être rémunéré autrement. Par exemple, un employeur ne peut valablement payer un employé en marchandises tels des biens périssables et des boissons.

3.15 Est-ce que l’employeur peut imposer au salarié le virement bancaire comme procédé de paiement du salaire ?

Un employeur peut payer le salarié en espèces sous enveloppe scellée, par chèque ou par virement bancaire. Les dispositions de la loi permettent le virement bancaire.

3.16 Est-ce que le paiement du salaire doit être effectué à intervalles réguliers ?

L’employeur a discrétion pour fixer la fréquence de la paie en vertu de ses droits de direction, lesquels ne sont limités que par l’article 43 de la Loi sur les normes du travail. Il est possible pour un employeur de modifier la fréquence et la date du versement du salaire ou de fixer le moment du versement de la paie tout en respectant les dispositions de la loi. La loi prescrit le nombre maximum de jours qui peuvent séparer deux paies successives. Notons que la loi n’est d’aucune utilité pour déterminer la période de travail qui doit correspondre à une paie donnée.

3.17 Quel est le but de donner au salarié un bulletin de paie ?

Le but de l’article 46 L.N.T. est de faire connaître au salarié les heures travaillées, les heures supplémentaires, etc. L’employeur peut se conformer à cette disposition en indiquant, sur le bulletin de paie de la semaine suivante, les informations pertinentes de la semaine précédente.

Un salarié est en droit d’exiger de connaître la nature et le montant des déductions faites par son employeur sur son salaire.

Le but des dispositions de l’article 46 L.N.T. est de permettre au salarié de vérifier le calcul de son salaire. Cet article prévoit l’énumération des données que l’employeur a l’obligation de fournir. Toutefois, cette disposition ne peut être utilisée pour imposer à celui-ci un fardeau plus lourd que prévu. Ainsi, l’employeur n’a pas à remettre au salarié quelque document que ce soit avec son bulletin de paie.

3.18 Est-ce que l’employeur peut effectuer une retenue sur le salaire lorsque le salarié lui doit de l’argent ?

Un employeur peut effectuer une retenue sur le salaire uniquement s’il y est contraint par une loi, un règlement, une ordonnance d’un tribunal, une convention collective, un décret ou un régime complémentaire de retraite à adhésion obligatoire. L’employeur peut également effectuer une retenue sur le salaire si le salarié y consent par écrit et pour une fin spécifique mentionnée dans cet écrit.

Le salarié peut révoquer cette autorisation en tout temps, sauf lorsqu’elle concerne une adhésion à un régime d’assurance collective ou à un régime complémentaire de retraite. L’employeur verse à leur destinataire les sommes ainsi retenues.

La loi n’exige pas d’autorisation écrite pour que l’employeur puisse retenir sur le salaire une somme qui est clairement due et n’autorise pas non plus un salarié à refuser une telle autorisation.

L’article 49 L.N.T. vise à empêcher un employeur de retenir à son profit quelque somme que ce soit à moins d’y être contraint par une loi, par un règlement ou par une convention collective, ou d’y être autorisé par un écrit du salarié. L’article 49 L.N.T. écarte les règles de compensation prévues aux articles 1672 à 1682 du Code civil du Québec, qui permettent d’effacer une dette lorsque deux parties sont mutuellement débitrices et créancières l’une de l’autre et qu’aucune des créances n’est contestée. Du seul fait d’une contestation ou de l’absence d’autorisation du salarié, la dette perd son caractère de liquidité et d’exigibilité, et le prélèvement devient alors illégal.

L’article 49 L.N.T. n’a pas comme effet d’empêcher le recouvrement d’un trop-perçu ou d’opérer compensation pour une somme qui est due à l’employeur. Celui-ci peut donc se rembourser du préjudice subi, l’article 49 L.N.T. couvrant cette situation à titre de pertes issues d’erreurs ou d’omissions.

3.19 À qui appartient le pourboire versé directement ou indirectement par un client ?

Le pourboire versé directement ou indirectement par un client appartient en propre au salarié qui a rendu le service et il ne doit pas être confondu avec le salaire qui lui est pour ailleurs dû. L’employeur doit verser au salarié au moins le salaire minimum prescrit sans tenir compte des pourboires qu’il reçoit.

Si l’employeur perçoit le pourboire, il le remet entièrement au salarié qui a rendu le service. Le mot «pourboire» comprend les frais de service ajoutés à la note du client, mais ne comprend pas les frais d’administration ajoutés à cette note. De plus, un employeur ne peut contraindre un salarié à lui remettre les pourboires qu’il reçoit ou considérer que ceux-ci font partie de son salaire.

3.20 Comment déterminer si un travailleur est un employé à pourboires ?

Pour déterminer s’il s’agit d’un employé à pourboires, il faut examiner s’il est d’usage que les travailleurs occupant un tel genre d’emploi reçoivent des pourboires. Si, en général, des pourboires sont perçus par les salariés de cette catégorie, et si, à plus forte raison, l’employé concerné reçoit en fait des pourboires, quelle que soit leur importance, il est un employé à pourboires.

L’employeur qui vend des forfaits de repas «incluant le service» peut embaucher des personnes au salaire minimum sans que ces dernières puissent réclamer de pourboires pour le service aux tables.

3.21 Qu’est qu’un pourboire versé directement ?

Une somme remise à l’employeur, mais à être versée aux commis de bar en vue de leur fournir une certaine compensation pour le manque à gagner dont ils ont été privés par le fait d’une promotion, constitue un pourboire versé indirectement.

3.22 Qu’est-ce que des frais d’administration ?

En fonction des dispositions de la loi, les frais d’administration doivent apparaître à la note de service pour que l’on puisse les retenir. Sinon, il ne s’agit pas de frais d’administration, mais bien de frais de service, et ils doivent être remis au serveur. La Loi sur les normes du travail est venue préciser que le pourboire versé directement ou indirectement par le client n’appartenait pas à l’employeur.

Ainsi, si c’est ce dernier qui le perçoit, il doit le remettre entièrement au salarié. Toutefois, si la note ne distingue pas les frais de service des frais d’administration, il est impossible de s’assurer que les dispositions de la Loi sur les normes du travail sont respectées. Pour que la loi ait une portée réelle et utile, il faut l’interpréter comme forçant l’employeur à faire cette distinction dans la note du client.

3.23 Est-ce que l’employeur peut imposer un partage des pourboires entre les salariés ?

L’employeur ne peut imposer un partage des pourboires entre les salariés. Il ne peut non plus intervenir de quelque manière que ce soit dans l’établissement d’une convention de partage des pourboires. Une telle convention doit résulter du seul consentement libre et volontaire des salariés qui ont droit aux pourboires. Une entente de partage des pourboires n’est pas valide si elle ne présente pas un caractère libre et volontaire. Le pourboire appartient au salarié à qui le client l’a destiné.

À savoir !
La loi prévoit une série de normes minimales auxquelles les salariés ont droit, et elle prévoit les obligations de l’employeur.
À retenir !
Nul employeur ne peut faire travailler un salarié sans lui payer le salaire minimum pour toute la durée de la prestation de travail. De plus, il n’est pas possible de payer le salarié autrement qu’en argent.
Attention !
La loi prévoit les droits et obligations des parties lorsque l’employeur veut effectuer une retenue sur le salaire du salarié.