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Congédié pour ne pas avoir donné suite à 3 convocations formelles

L'employeur était fondé à congédier le plaignant alors que celui-ci était en invalidité, et ce, en raison de son omission de donner suite à 3 convocations formelles qui lui enjoignaient de se présenter au travail ou de fournir des informations médicales plus précises pour justifier son absence et sa demande d'accommodement.
23 juin 2025

Intitulé

Unifor, section locale 6001 et Bell Canada (Jean-Smarth Brutus), 2025 QCTA 65

Juridiction

Tribunal d'arbitrage (T.A.)

Type d'action

Grief contestant un congédiement. Rejeté.

Décision de

Me Nathalie Massicotte, arbitre

Date

19 février 2025


L'employeur a congédié le plaignant alors qu'il était en période d'invalidité, et ce, en raison de son omission de donner suite à 3 convocations formelles lui enjoignant de se présenter au travail ou de fournir des informations médicales plus précises afin de justifier son absence pour cause de maladie et sa demande d'accommodement. Outre sa contestation sur le fond, le syndicat s'oppose à la recevabilité de la preuve recueillie lors d'une filature du plaignant.

Décision

Les critères jurisprudentiels permettant de recevoir en preuve des vidéos et des rapports de filature sont remplis. En outre, compte tenu des contradictions révélées à l'occasion du témoignage du plaignant, la règle de la pertinence s'applique et rend également recevable l'ensemble de cette preuve.

Il ressort des arguments du syndicat qu'il estime que l'employeur n'avait pas le droit de demander des informations supplémentaires à celles déjà fournies par le plaignant et que, par conséquent, celui-ci n'avait pas à répondre aux demandes de l'employeur pour discuter notamment de la possibilité de l'accommoder. Or, une telle approche ne peut être cautionnée. Le plaignant devait répondre aux appels téléphoniques de l'employeur et à ses convocations. De plus, même s'il craignait que l'employeur lui demande d'occuper un poste régulier, il ne pouvait se défiler comme il l'a fait en ignorant celui-ci. Il incombait au plaignant d'entrer en contact avec son employeur. Quant aux prétendus motifs du plaignant pour ne pas se présenter aux convocations, les informations médicales qu'il a fournies n'étaient pas suffisantes ni assez précises pour justifier une absence du travail ou pour permettre de l'accommoder. En outre, la preuve révèle que, durant la période où l'employeur a tenté de joindre le plaignant et lui a demandé de se présenter au travail, celui-ci travaillait dans un restaurant comme serveur, et ce, jusqu'à 22 h. Il a pourtant affirmé à son assureur, tout comme il l'a fait à l'audience, qu'il n'avait pas travaillé durant son absence du travail. Certes, l'employeur ne s'est pas servi de cette information pour procéder au congédiement puisqu'il ne la connaissait pas et elle ne peut donc s'ajouter aux motifs justifiant la mesure qu'il a prise. Néanmoins, elle permet de conclure que le plaignant n'avait pas de motif valable d'ignorer l'employeur et de ne pas collaborer avec lui. Elle entache aussi la crédibilité des justifications fournies par le plaignant à l'audience. En somme, en raison du silence qu'il a opposé aux demandes répétées de son employeur, le plaignant a manqué à son devoir de collaboration et ce dernier était fondé à conclure qu'il refusait de travailler. L'employeur n'a pas failli à son devoir d'accommodement, c'est plutôt le plaignant qui a empêché que toute démarche soit entreprise à cet effet. Le plaignant devait répondre à la demande de son employeur et se présenter au travail ou, autrement, justifier la prolongation de son absence par un nouveau billet médical. Cela était d'autant plus important puisqu'il ne recevait aucune prestation d'invalidité depuis près de 3 mois, son assureur ayant décidé que son absence n'était pas médicalement justifiée, même si un médecin l'avait autorisée. Compte tenu des informations qu'il détenait du plaignant et de son assureur, l'employeur avait raison de juger que les limitations fonctionnelles étaient insuffisantes pour procéder à un accommodement. Les demandes qu'il a faites étaient raisonnables. C'est aussi à bon droit qu'il s'en est tenu aux recommandations de l'assureur à cet égard, celui-ci lui ayant expressément indiqué qu'il ne reconnaissait pas les limitations fonctionnelles suggérées par le médecin du plaignant. Par conséquent, la rupture du lien d'emploi était la seule option pour l'employeur.