Depuis le 1er juillet 2014, la Loi sur le Régime volontaire d’épargne-retraite (LRVER) a introduit des obligations pour les employeurs québécois. Ces mesures visent notamment à faciliter l'épargne-retraite des travailleuses et travailleurs par le biais de prélèvements sur leur paie.
La conformité à la LRVER
Pour se conformer à la LRVER, les entreprises de 10 employées et employés[1] ou plus doivent offrir à l’ensemble de leurs salariées et salariés un moyen d’épargner par le biais de retenues salariales.
Rappel important : la Loi n’impose pas aux entreprises de mettre en place un régime de type RVER. Pour s’exempter de cette Loi, les entreprises peuvent mettre en place un REER, un CELI collectif ou tout autre régime d’épargne pour la retraite.
Si vous ne respectez pas vos obligations, vous pourriez faire l’objet d’une plainte à la CNESST, ce qui pourrait entraîner une amende allant de 500 $ à 10 000 $. À noter que les montants d’amendes sont doublés en cas de récidive.
Le RVER en bref
Pour les organisations qui optent pour le compte « par défaut » de la LRVER, voici les principales caractéristiques et balises de ce type de régime d’épargne-retraite :
- Adhésion automatique : l’ensemble du personnel est automatiquement inscrit au régime et chaque personne peut faire le choix conscient d’y renoncer à l’intérieur des 60 jours suivants leur inscription.
- Retenues salariales de 4 % : depuis 2019, les employeurs qui offrent un RVER doivent prélever 4 % sur les salaires versés. Ce taux de cotisation peut être réduit à la demande de l’employée ou employé.
- Bas frais de gestion des placements : la Loi impose un plafond sur les frais de gestion des placements qui peuvent être prélevés dans le régime, soit 1,5 % de l’actif sous gestion (1,25 % pour l’option de placement par défaut[2]).
- Flexibilité du traitement des cotisations des employées et employés : les cotisations sont non immobilisées et donc admissibles aux retraits effectués dans le cadre du Régime d’accession à la propriété (RAP) et du Régime d’encouragement à l’éducation permanente (REEP).
- Contributions volontaires de l’employeur : l’employeur n’a pas l’obligation de cotiser dans le RVER qu’il offre à ses employées et employés. Toutefois, dans l’éventualité où l’employeur choisit de le faire, les cotisations appartiennent à la personne salariée, et ce, dès qu’elles sont versées et seront immobilisées[3].
Les avantages et les limitations du RVER
Avantages
Dans l’ensemble, le RVER permet d’offrir une forme d’épargne-retraite sans que la personne salariée ait à poser une action afin de souscrire à un régime. L’adhésion automatique est un modèle qui a fait ses preuves et qui est reconnu comme un moyen efficace d’augmenter les taux de participation aux régimes d’épargne-retraite. Avec le RVER, la personne salariée cotise par défaut 4 % par le biais de retenues salariales sur sa paie. C’est un pas dans la bonne direction!
Limitations
Le RVER établit des limites sur les frais de gestion des investissements, ce qui semble avantageux au premier abord. Cependant, il est crucial de noter que des frais réduits peuvent restreindre les options de diversification des placements tout en limitant les services qui seront offerts à l’organisation et à son personnel adhérant au RVER.
Les frais de gestion des placements, qui sont normalement payés par les personnes participant au régime, peuvent être utilisés pour fournir des services à forte valeur ajoutée, tant pour l’entreprise que pour ses employées et employés. Ces services incluent notamment des conseils financiers indépendants, des séminaires axés sur l’éducation financière, des services d’accompagnement sur l’administration du régime (gestion des frais, sélection des placements, conformité, audits, etc.), ce qui favorise une perception positive du régime par le personnel participant tout en permettant aux organisations de se concentrer sur leurs opérations.
Par ailleurs, les régimes collectifs disposant d’un volume d’actifs significatif (c’est-à-dire 1 000 000 $ sous gestion ou 500 000 $ de cotisations annuelles[4]) ont la possibilité de négocier des frais équivalents, voire inférieurs à ceux imposés par le RVER, tout en permettant l’accès à des services plus complets.
Ensuite, rappelons qu’un employeur qui offre un RVER s’expose à une certaine lourdeur administrative puisqu’il aura dorénavant l’obligation d’inscrire automatiquement toutes les personnes salariées admissibles et de débuter des prélèvements de 4 % de leur salaire. Bien que les personnes salariées aient l’option de renoncer au régime ou de réduire leur taux de cotisation à 0 %, l’employeur devra effectuer un rappel à chaque personne ayant renoncé au régime qu’elle a la possibilité de se réinscrire tous les deux ans.
En résumé, en plus d’ajouter un certain fardeau administratif sur les épaules des entreprises québécoises, cette approche législative cible les frais de gestion plutôt que de s’attaquer à la véritable lacune des travailleuses et travailleurs : leur littéracie financière, c’est-à-dire leur manque de connaissances quant à la gestion de leurs finances personnelles.
Passer du RVER à un programme à valeur ajoutée
Au Québec, deux types de régimes se démarquent grâce à leur flexibilité et à leur simplicité :
- Le régime de participation différée aux bénéfices (RPDB) jumelé à un REER
- Le régime de retraite simplifié (RRS)
Ces deux types de régimes permettent d’imiter les avantages du RVER tout en bâtissant un régime d’épargne-retraite personnalisé et adapté à la réalité des organisations. De plus, les frais de gestion de placement qui sont prélevés sur l’actif du régime pourraient permettre d’offrir des services à valeur ajoutée, entre autres :
- Des conseils individuels et indépendants en finances personnelles
- Des conférences ou des ateliers sur les finances personnelles
- Du soutien au personnel de la paie et des ressources humaines
- Une négociation proactive des frais de gestion en fonction de l’évolution du régime
- Une mise à jour sur les tendances et sur toute autre information pertinente à l’égard de l’épargne-retraite
- Etc.
D’après un sondage Léger datant d’octobre 2023, c’est « une personne sur deux (48 %) qui mentionne se sentir anxieuse lorsqu’elle pense à ses finances ».[5]
Lorsque nous connaissons le degré d’anxiété financière que vivent les employées et employés, l’accès à de l’éducation et à de l’accompagnement dans le domaine des finances personnelles est un avantage plus qu’important pour eux, en plus d’être une façon fort intéressante de se démarquer pour les entreprises.
Le mot de la fin
En terminant, la Loi sur le RVER a permis de mettre en lumière l’importance de l’épargne-retraite. Avec le déclin de la popularité des régimes à prestations déterminées, la plupart des travailleuses et travailleurs québécois n’auront d’autres revenus garantis à la retraite que les programmes gouvernementaux.
Bien qu’il soit de la responsabilité de chaque personne de financer le train de vie qu’elle souhaite s’offrir au moment de la retraite, les employeurs ont aussi leur rôle à jouer envers leurs employées et employés. Comment? En facilitant l’accès à l’épargne. Les entreprises peuvent encourager l’épargne à l’aide d’un programme dans lequel elles récompensent la discipline d’épargne des employées et employés à l’aide d’une cotisation patronale au régime.
Nombre d’employeurs consacrent des sommes significatives à l’épargne de leurs employées et employés. Cependant, il est fondamental de comprendre que le véritable catalyseur du succès de leur plan de retraite, celui qui influera véritablement sur leur qualité de vie, réside dans la promotion de l’éducation financière et dans l’intérêt qu’ils portent à leurs finances personnelles afin d’assurer leur sécurité financière en vue de leurs vieux jours.
Encourager activement votre personnel à s’engager dans la gestion de leurs ressources financières constituera une étape essentielle pour renforcer leur bien-être financier sur le long terme. Pensez-y!
Publié avec l'autorisation de Solertia.
- Pour savoir si votre organisation est considérée comme une entreprise de 10 employés et plus, nous entendons par « employées et employés visés » ceux âgés de 18 ans et plus qui justifient un an de service continu, au sens de la Loi sur les normes du travail. Le calcul du nombre d’employées et employés se fait au 30 juin d’une année si l’organisation avait au moins cinq employés au 31 décembre de l’année précédente. La Loi prévoit étendre les obligations de la Loi sur le RVER aux entreprises de 5 à 10 employés. Toutefois, aucune date n’a été établie quant à l’assujettissement des plus petites organisations à cette Loi.
- L’option de placement par défaut est une option de placement dans laquelle les montants sont investis quand une participante ou un participant omet de donner des directives sur la façon dont il désire investir son argent.
- L’immobilisation est un concept qui restreint la façon dont l’argent accumulé peut être utilisé puisqu’il doit, en théorie, servir à financer un revenu viager à la retraite.
- La tarification d’un régime d’épargne-retraite est influencée par de multiples facteurs, tels que l’actif sous gestion, le volume attendu de cotisations, le nombre de participantes et participants au régime, le design et la complexité du régime, la relation d’affaires avec l’assureur, etc. Les chiffres mentionnés dans l’article (1 M$ d’actifs sous gestion ou 500 k$ de cotisations annuelles) sont à titre indicatif et pourraient être différents de ce qui vous est offert par un assureur lors de vos négociations.
- Indice d’anxiété financière de Centraide, Centraide du Grand Montréal et la firme Léger, octobre 2023, p.4, IRL : https://leger360.com/fr/sondages/indice-danxiete-financiere-de-centraide-3e-vague/#:~:text=Les%20Qu%C3%A9b%C3%A9cois%C2%B7es%20ont%20un,finances%20publiques%20qu%C3%A9b%C3%A9coises%20vont%20bien