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Philosophie de rémunération : repenser sa philosophie de rémunération au-delà de la pandémie

La rémunération ne fait pas exception aux grands bouleversements causés par la crise sanitaire. Nous avons en effet observé ces derniers mois de nombreuses initiatives de révisions des programmes de rémunération.

La rémunération ne fait pas exception aux grands bouleversements causés par la crise sanitaire. Nous avons en effet observé ces derniers mois de nombreuses initiatives de révisions des programmes de rémunération. Ces révisions sont-elles temporaires? Traduisent-elles l’élasticité des programmes de rémunération offerts ou s’agit-il de changements plus profonds qui perdureront au-delà de la crise? 

Il est encore tôt pour se prononcer sur toutes ces questions, mais afin d’amorcer la réflexion, revenons aux principes de base de ce qu’est une philosophie de rémunération et à ce qui permet d’en faire un levier organisationnel.

La philosophie de rémunération représente les principes directeurs qui guident les décisions relatives à la rémunération globale. Elle s’articule autour de trois questions fondamentales :

  1. Quels éléments du plan stratégique de l’entreprise doivent être liés au programme de rémunération globale?
  2. Comment la culture et les valeurs de l’entreprise se reflètent-elles dans l’offre de rémunération globale?
  3. Comment optimiser l’investissement de chaque dollar de l’enveloppe de rémunération globale?

De quelle façon la dernière année nous a-t-elle amenés à repenser notre philosophie de rémunération? Les organisations ont jonglé avec divers défis : incertitude financière, pressions liées à l’utilisation des programmes d’aide gouvernementale, exode de la main-d’œuvre de secteurs malmenés vers ceux offrant de meilleures perspectives d’emploi, télétravail et nouvelle approche de gestion de la performance, etc. Ces changements imprévus ont mis en évidence (ou changé) les besoins des employés au chapitre de la flexibilité, de la sécurité d’emploi, de la santé et du développement professionnel. Sans compter que plusieurs organisations ont dû revoir leur stratégie d'affaires afin de se positionner face à ces nouveaux enjeux : croissance accélérée, nouveaux produits/marchés, ralentissement des activités, difficultés de recrutement.  

Il est juste de se demander si notre philosophie de rémunération correspond toujours à la nouvelle réalité de l’organisation. Car pandémie ou pas, toute modification structurante à son environnement peut déclencher une telle réflexion. 

Un modèle adapté à sa propre réalité

Comment offrir une rémunération globale équilibrée qui répond à la fois aux besoins des employés et aux préoccupations des employeurs? Attention : l’on ne parle pas ici d’apporter une certaine flexibilité à un programme pour tenir compte des circonstances exceptionnelles, mais bien d’en revoir les fondements pour la suite et dans le but d’en assurer la pertinence pour les prochaines années. 

À titre d’illustration, une organisation dans le secteur du transport a revu en profondeur sa stratégie de rémunération. Ainsi, elle désirait soutenir la révision de sa stratégie d’affaires. L’organisation souhaitait reconnaître la performance individuelle dans l’enveloppe de rémunération globale. La philosophie en place ne permettait pas de distinguer les plus performants en raison de politiques trop rigides (aucune bonification, augmentations salariales automatiques selon des échelons, etc.). Bien que ces politiques soient toujours appropriées pour certains paliers d’emplois, l’évolution du modèle d’affaires générait des enjeux d’attraction et de rétention de candidats compétents chez les cadres et professionnels. Un virage a donc été amorcé vers une rémunération axée sur la performance et la reconnaissance des compétences.  

Résultat? Chaque dollar de rémunération est aujourd’hui mieux investi, alors que l’enveloppe globale s’avère plus attrayante pour les profils d’employés recherchés. De plus, l’entreprise se montre plus cohérente dans son discours lié aux objectifs d’affaires et à ses pratiques de rémunération.

Équilibrer sa rémunération globale passe inévitablement par la conciliation des intérêts des employés et de ce qu’ils valorisent, des enjeux et besoins de l’employeur, sans négliger la capacité financière de l’entreprise à soutenir son modèle de rémunération dans le temps.  

Pour encadrer et optimiser chaque composante de la rémunération, il importe d’avoir une perspective globale des enjeux et défis. 

La cohérence est le mot d’ordre, mais il importe d’être à l’écoute des besoins du capital humain, de connaître les employés. En effet, la pondération des composantes doit aussi prendre en considération la valeur perçue par les employés des aspects à la fois pécuniaires et non pécuniaires.

Communiquer le fruit des réflexions

Changer la philosophie de rémunération passe par une gestion du changement qui doit être soutenue par un bon programme de communication. En effet, des organisations adoptent souvent des mesures intéressantes et stimulantes, mais auxquelles les employés n’adhèrent pas. Pourquoi? Parce qu’elles ont été mal communiquées et par conséquent, les travailleurs n’en voient pas la valeur.

Planifiée, transparente et cohérente, cette communication représente un processus continu qui favorisera l’engagement des salariés envers les programmes. Elle permet de prévoir les réactions, de gérer les attentes et perceptions, mais surtout d’expliquer les raisons derrière chaque décision. Pour atteindre leurs buts, les programmes doivent être compris et intégrés. Communiquer efficacement à leur propos s’avère donc un exercice essentiel de personnalisation du message, de vulgarisation et d’éducation. Enfin, ce programme doit être porté par vos ambassadeurs, soit vos gestionnaires, qui devront être parties prenantes de l’implantation de votre nouvelle philosophie. Les outiller et les former s’avère donc incontournable.

En conclusion, les périodes de transformation sont propices pour les réflexions au sujet de la philosophie de rémunération. En tant que responsable de la rémunération ou des ressources humaines, vos questions principales demeurent : est-ce que notre offre de rémunération permet d’attirer et de retenir les bons candidats, et est-ce que nous récompensons les bons comportements? Peu importe l’avenue empruntée, les décisions prises et les gestes posés ne doivent pas l’être uniquement en fonction de la pandémie. Celle-ci aura une fin et les mesures mises en place pourraient ne plus être pertinentes lorsque la situation sera rétablie. Cela dit, si la crise ne doit pas dicter vos initiatives, elle constitue néanmoins une occasion de réfléchir à l’après-COVID-19. 

Auteurs

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Mélissa Allard, CRHA, conseillère

 

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Dominic Girard, associé, conseiller principal chez PCI Perrault Conseil 

Source : Revue RH, volume 24, numéro 1 ─ JANVIER FÉVRIER 2021