Les ordres professionnels sont fréquemment pointés du doigt comme étant le frein à l’intégration professionnelle des travailleurs immigrants ; on connaît tous l’anecdote du médecin devenu chauffeur de taxi, n’ayant pas obtenu de permis d’exercice de l’ordre concerné. En fait, vous vous en doutez, c’est plus complexe que ça.
Les ordres ont le mandat d’établir si un professionnel formé à l’étranger a les compétences nécessaires pour exercer sa profession au Québec, ce qui n’est pas chose simple. S’il y a des écarts à combler, on prescrit au candidat un examen, une formation ou des stages. Et c’est là que les choses se compliquent, car il faut, d’une part, que le système d’éducation collégiale et universitaire puisse accueillir ces candidats et leur offrir le parcours prescrit, et d’autre part, que les employeurs acceptent et soient capables d’encadrer les stages et de valider l’acquisition des connaissances requises. Donc, à qui la faute? Personne. Tout le monde.
Heureusement, depuis peu, tous les ministères sont mobilisés sur la question. Les tables de concertation et les consultations se multiplient. On injecte des sous nouveaux. De ces échanges et de cette volonté politique, nous espérons des résultats. Mais en l’absence d’un leadership fort, d’une imputabilité claire et des objectifs mesurables, il y a fort à parier que nous avancerons peu, ou trop lentement.
Dans ce débat, une évidence demeure : une partie des changements passeront par nous, CRHA et CRIA. Nous sommes en mesure d’établir des processus de dotation justes, qui écartent la discrimination. Nous avons les compétences et des moyens concrets pour faciliter la diversité et l’inclusion dans les milieux de travail. Et c’est sur ce volet que je vous interpelle, afin de réduire l’écart entre le taux d’emploi des professionnels et autres travailleurs issus de l’immigration et celui des personnes formées au Québec. Il nous appartient d’influencer les pratiques et de convaincre les gestionnaires et autres responsables de l’embauche que le premier emploi qualifié au Québec pour un immigrant peut bel et bien être au sein de notre organisation. Que oui, il faut investir temps et énergie, car ce n’est pas parce qu’on parle la même langue ou qu’on a réussi à la maîtriser que les différences culturelles s’estompent ; qu’il faut faire connaître ces différences, les expliquer, les démystifier, plutôt que prétendre qu’elles n’existent pas.
Agissons là où nous avons un réel pouvoir de faire la différence.