La création de programmes de formation efficaces, qui contribuent à atteindre les objectifs stratégiques et opérationnels des organisations, est possible en appliquant des principes éprouvés de l’apprentissage humain. Bien que ces principes soient étudiés depuis des lustres, leur réussite dans les entreprises reste un défi pour beaucoup. Cet article propose des pistes simples et fondées sur la science pour les spécialistes du développement des compétences.
Neuroplasticité et motivation
Les neurosciences et la psychologie du travail apportent des réponses intéressantes concernant l’efficacité de l’apprentissage. L’un des concepts clés à intégrer dans la conception des programmes de développement des compétences est la neuroplasticité, soit la capacité du cerveau à s’adapter et à changer. Selon les principes de la neuroéducation, les neurones qui s’activent ensemble se connectent ensemble, mais pour que ces connexions se renforcent, elles doivent être réactivées de manière variée et non répétitive[1].
La motivation est également essentielle pour maintenir l’effort d’apprentissage dans le temps. La théorie de l’autodétermination en psychologie du travail, mise de l’avant par Forest, répertorie trois ingrédients clés pour maintenir la motivation : l’autonomie, le sentiment de compétence et la proximité sociale[2]. Appliqué à l’apprentissage, cela implique de fournir des contenus accessibles sous différentes formes et différents formats, avec des défis réalistes, des objectifs clairs, et des opportunités d’apprentissage collectif.
Des approches éprouvées
Juste assez, juste à temps
L’approche « juste assez, juste à temps » est devenue un principe central dans le développement des compétences, particulièrement dans les grandes entreprises au Québec[3]. Ce principe consiste à offrir des activités d’apprentissage diversifiées au moment même où elles sont nécessaires. Les étapes clés pour réussir cette approche incluent de bien mesurer l’écart opérationnel, de cibler les contenus les plus utiles, de découper ces contenus en sous-parties pertinentes, d’organiser une plateforme accessible pour les apprenantes et apprenants, et d’offrir des activités variées comme le microapprentissage et la formation synchrone ou asynchrone.
Prenons l’exemple d’un programme de développement pour le personnel de gestion. Les gestionnaires disposent de peu de temps pour se consacrer à la formation continue; elles et ils sont motivés par des contenus et des stratégies d’apprentissage différents en fonction de leurs rôles stratégiques ou opérationnels. Il est crucial de leur fournir une variété de microapprentissages sur divers sujets qui répondent à leurs besoins immédiats. Par exemple, sur le thème de la rétroaction, on pourrait proposer des contenus théoriques, des jeux-questionnaires, des mises en situation courtes, et des listes à cocher.
Utiliser la force du nombre
L’apprentissage collaboratif, bien qu’il soit un défi dans certaines organisations, est un levier important pour améliorer la performance organisationnelle. Il nécessite un changement de culture vers une culture d’apprentissage, où l’erreur est perçue comme une opportunité d’apprentissage. Pour créer un environnement propice à la répétition et à la motivation dans un contexte collaboratif, il faut encourager l’ouverture à de nouvelles idées et valoriser les échanges entre pairs.
Des stratégies comme les ateliers collaboratifs, le codéveloppement, le mentorat, le coaching de groupe, et les plateformes d’échanges en ligne sont efficaces. Par exemple, dans le cadre du programme de développement pour les gestionnaires, les mêmes contenus mentionnés plus haut peuvent être discutés lors de séances de coaching de groupe ou d’ateliers collaboratifs, en s’appuyant sur des situations réelles, vécues par les participantes et participants pour générer des solutions et des pistes d’apprentissage partagées.
Mesurer et partager les résultats
La mesure des progrès dans l’apprentissage est cruciale non seulement pour évaluer l’efficacité des activités de développement, mais aussi pour encourager les apprenantes et apprenants à continuer leurs efforts. Il est important de commencer par une mesure de référence (temps zéro) pour évaluer les progrès. Parmi les options possibles de mesure, il est conseillé de garder la stratégie simple, de cibler un groupe pilote, de choisir deux ou trois cibles d’apprentissage mesurées annuellement, et de communiquer régulièrement les résultats avec les apprenantes et apprenants en se concentrant sur l’apprentissage plutôt que sur la satisfaction.
Conditions gagnantes
Pour conclure, plusieurs conditions sont essentielles pour la réussite des programmes de développement des compétences. Il est important de mobiliser la direction, en s’assurant de son appui et en étant à l’écoute de ses préoccupations. Il faut aussi accepter de prendre des risques et de s’adapter, en testant de nouvelles idées et en impliquant un comité composé d’apprenantes et apprenants. Enfin, une communication adéquate et efficace, en collaboration avec des spécialistes en communication, fera une grande différence dans le succès du programme.
En appliquant ces principes, les organisations peuvent créer des programmes de formation qui, non seulement favorisent un apprentissage efficace, mais contribuent également de manière marquante à l’atteinte de leurs objectifs stratégiques et opérationnels.
Références
Neuroéducation
Masson, S. (2020). Activer ses neurones pour mieux apprendre et enseigner : les 7 principes neuroéducatifs. Odile Jacob.
UQAM. (2023, mai 30). Comprendre le cerveau pour mieux apprendre. Récupéré sur Collimateur - Veille pédagonumérique: https://collimateur.uqam.ca/collimateur/comprendre-le-cerveau-pour-mieux-apprendre/
Motivations
Forest, J. (2022). Libérer la motivation : avec la théorie de l'autodétermination. Québec: EDITO.
Deniau, K. (2023, 20 juin). Les petits secrets psychologiques de la motivation au travail. Récupéré sur Isarta: https://isarta.com/infos/les-petits-secrets-psychologiques-de-la-motivation-au-travail/
Center for serlf-determination therory. (2025). Center for serlf-determination therory. Récupéré sur https://selfdeterminationtheory.org/theory/
Juste assez, juste à temps
Andriotis, N. (2017, 10). What is Just-in Time Training (and the Best Practices to Adopt it for your Business). Récupéré sur Efront: https://www.efrontlearning.com/blog/2017/10/just-time-training-best-practices-adopt-business.html
Culture d’apprentissage
David A. Garvin, A. C. (2008). Is Yours a Learning Organization? Récupéré sur Harvard business review: https://hbr.org/2008/03/is-yours-a-learning-organization?autocomplete=true
Évaluation
Kirkpatrick partners. (2025). The Kirkpatrick Model. Récupéré sur https://www.kirkpatrickpartners.com/the-kirkpatrick-model/