Tout au long du processus de dotation d’un poste, le législateur impose diverses obligations aux employeurs, et ce, dans le but d’éviter toute discrimination à la sélection et à l’embauche. La diversité étant une richesse inestimable pour les entreprises notamment sur le plan de l’innovation [1], un employeur qui déciderait de discriminer se priverait potentiellement de magnifiques talents et son organisation en subirait les conséquences sur le plan de la compétitivité [2]. En plus des lois qui régissent le processus de recrutement, de bonnes pratiques permettent aux employeurs d’attirer des candidates et candidats de choix, et ce, même en contexte de pénurie de main-d’œuvre.
- Affichage de poste
- Présélection des candidatures
- Formulaire de demande d’emploi
- En entrevue
- Vérification des références d’emplois antérieurs
- Vérification des antécédents judiciaires
- Enquête de crédit
- Examens médicaux préembauche
- Offre d’emploi
Affichage de poste
Vous devez veiller à ce que vos affichages de poste soient rédigés en français [3]. De plus, lorsque l’offre est publiée dans une langue autre que le français, vous devez veiller à ce que ces offres soient publiées simultanément et par des moyens de transmission de même nature et atteignant un public cible d'une taille proportionnellement comparable.
Il est de bonne pratique de veiller à ce que le texte soit rédigé de façon inclusive (emploi de noms collectifs, exempt de marques de genre et s’adressant à des groupes diversifiés)[4]. Vous démontrerez ainsi votre ouverture à considérer toute personne, peu importe sa culture, son âge, son genre ainsi que votre engagement en matière de diversité et inclusion. Une telle pratique augmentera assurément votre pouvoir d’attraction.
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Présélection des candidatures
Lors de la présélection des candidatures reçues, soyez à l’affût de vos biais inconscients et veillez à ce que votre processus de sélection soit exempt de discrimination.
À noter que les motifs de discrimination prévus à l’article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne sont les suivants : la race, la couleur, le sexe, l’identité ou l’expression de genre, la grossesse, l’orientation sexuelle, l’état civil, l’âge sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l’origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l’utilisation d’un moyen pour pallier ce handicap. [5]
La présélection des candidatures doit être effectuée à partir d’exigences et de critères objectifs. Ces exigences et critères doivent être en lien avec l’emploi à combler afin d’être justifiés. Vous les retrouverez généralement dans la description de poste que vous avez créée au préalable. Par exemple, vous ne pouvez automatiquement exiger que la personne possède une voiture pour un emploi qui requiert des déplacements, car ceci pourrait être considéré comme une exigence excessive pouvant mener à de la discrimination basée sur le motif de la condition sociale. Par contre, si aucun autre mode de transport adéquat n’est possible, vous pourriez demander qu’elle détienne un permis de conduire valide et qu’elle puisse disposer, au besoin, d’un véhicule automobile.
» » Bonne pratique de gestion
Ne vous basez pas uniquement sur le curriculum vitae (ci-après « CV ») pour décider si une personne sera ou non rencontrée en entrevue. Procéder à une entrevue téléphonique permet d’obtenir, en peu de temps, un bon complément d’information et évite de rejeter un CV plus succinct alors qu’il pourrait s’agir du profil idéal. Ayez de la curiosité et intéressez-vous aux postulantes et postulants.
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Formulaire de demande d’emploi
Le formulaire de demande d’emploi est un document que toutes les personnes candidates devraient remplir au moment de poser leur candidature pour un emploi au sein de votre entreprise. En vertu de la Charte des droits et libertés de la personne (ci-après la « Charte »), votre formulaire de demande d’emploi ne peut pas contenir des questions visant à obtenir directement ou indirectement des renseignements relativement aux motifs de discrimination interdits par l’article 10 de la Charte [6], sous réserves des questions qui seraient nécessaires pour évaluer une ou des aptitudes et qualités requises pour l’emploi [7].
D’ailleurs, même si vous n’avez pas l’intention d’utiliser les informations recueillies sur le formulaire à des fins discriminatoires dans la décision d’embaucher ou non, le simple fait de poser de telles questions entraîne une violation de la Charte [8]. À titre d’exemples, et sans que ceci ne soit une liste exhaustive, vous ne devriez pas :
- Poser des questions sur les antécédents médicaux, les antécédents judiciaires, ni sur aucun autre des motifs visés par l’article 10 de la Charte.
- Demander aux personnes candidates de cocher des cases de type « M., Mme, Mlle » permettant de reconnaître le genre, à moins que celui-ci constitue une qualité objectivement requise par l’emploi.
- Demander qu’une photo soit jointe à la demande d’emploi.
- Etc.
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En entrevue
Tout au long du processus de recrutement, il vous est aussi interdit de poser des questions qui touchent aux motifs de discrimination interdits par la Charte, comme l’origine ethnique, l’identité ou l’expression de genre, le désir d’avoir une grossesse ou le nombre d’enfants, l’orientation sexuelle, l’état civil, l’âge (sauf dans la mesure prévue par la loi [9]), la religion, les convictions politiques, la langue, la condition sociale, le handicap [10] de la personne. Que ce soit dans l’intention de mieux connaître la personne, de briser la glace ou de détendre l’atmosphère (par exemple : « Vous avez un joli accent, ça vient d’où? »), ces questions contreviennent à la Charte des droits et libertés de la personne si elles sont posées en entrevue et de telles violations peuvent entraîner l’imposition d'amendes importantes contre des employeurs advenant un litige sur la situation [11].
Comme pour le processus de présélection, ne posez que des questions qui sont en lien avec le poste et qui vous permettent d’évaluer objectivement les compétences et aptitudes à réaliser les différentes tâches. De plus, assurez-vous que vos critères de sélection sont objectifs et directement liés aux fonctions à accomplir.
L’emploi pour lequel vous recrutez exige-t-il une flexibilité d’horaire et des heures de travail parfois prolongées? La question à poser n’est pas : « Avez-vous des enfants? », mais plutôt « Êtes-vous en mesure d’effectuer des heures supplémentaires les soirs et les fins de semaine? » ou « Êtes-vous en mesure de travailler sur des horaires pouvant s’étendre de 7 h à 19 h? ». Demandez-vous toujours dans quel but vous posez la question, cela vous aidera à la formuler de la bonne façon et évitera les questions de simple curiosité, souvent discriminatoires.
Il existe plusieurs types de tests psychologiques et psychométriques, comme les tests d’habileté, d’aptitude, de quotient intellectuel, d’orientation professionnelle, de personnalité, etc. auxquels vous pourriez choisir de soumettre les personnes candidates en entrevue. Toutefois, si les tests d’habileté, d’aptitude ou d’orientation professionnelle sont généralement reconnus et acceptés, il en va autrement pour le test de personnalité dont la validité ne fait pas consensus. Ce type de test vise à déterminer les valeurs, les attitudes, à prévoir les réactions d’une personne et à cerner ses principaux traits de personnalité. De plus, la vigilance est de mise puisque la validité de plusieurs de ces tests dits « psychométriques » est parfois discutable sur le plan scientifique. En outre, il est recommandé qu’une personne compétente ou membre d’un ordre professionnel, comme une ou un psychologue ou conseiller d’orientation fasse passer lesdits tests. Dans tous les cas, la décision d’embaucher ou non une personne ne devrait jamais se baser uniquement sur un tel test.
Enfin, assurez-vous que les tests utilisés soient conformes à la Charte [12] (par exemple : vous devez obtenir le consentement libre et éclairé de la personne candidate).
Les étapes qui sont plus engageantes pour les personnes candidates surviennent généralement à la fin du processus de sélection. Il est inutile de procéder à la vérification des références d’emplois ou d’antécédents de personnes pour lesquelles vous ne voulez pas poursuivre le processus de sélection. De même, toutes les vérifications ou enquêtes préemploi ne devraient avoir lieu que si une offre d’emploi conditionnelle est présentée, et ce, afin d’éviter une possible perception de discrimination.
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Vérification des références d’emplois antérieurs
À la fin du processus de sélection, l’employeur peut procéder à la vérification des références d’emplois antérieurs d’une personne candidate. La Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé fixe les règles quant à la protection des renseignements personnels collectés, utilisés ou communiqués sur une personne. Ainsi, il ne vous est possible de communiquer qu’avec les personnes mentionnées dans le consentement écrit de la personne candidate, et ce, même si vous connaissez quelqu’un dans l’entreprise ou avez un contact d’affaires qui pourrait vous fournir des informations sur cette personne.
» » Élément important nécessitant une attention particulière
Pensez aux conséquences qu’aurait le fait de communiquer avec l’un de vos contacts d’affaires qui pourrait potentiellement connaître l’employeur actuel de la personne candidate et lui en parler. Cette personne pourrait perdre son emploi alors que le processus de sélection n’est pas terminé. Vous êtes responsable de la confidentialité tout au long de votre processus de recrutement.
La vérification des références d’emplois vise à valider le parcours d’expérience de la personne candidate tel qu’il a été exposé dans le CV ou au cours du processus de sélection [13]. Encore une fois, à cette étape, vous devez faire preuve de vigilance quant aux questions touchant les motifs discriminatoires de l’article 10 de la Charte.
Avant de procéder à la vérification des références d’emplois antérieurs, des antécédents judiciaires, de crédit ou médicaux, selon le cas, l’employeur doit absolument avoir obtenu un consentement libre et éclairé [14] par écrit de la personne candidate. Veillez également à ce que votre formulaire de consentement ne soit pas trop général, mais bien pertinent à l’évaluation en fonction du poste convoité.
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Vérification des antécédents judiciaires
La Charte, bien qu’elle ne prévoie pas les antécédents judiciaires dans les motifs de discrimination à l’article 10, mentionne à l’article 18.2 que : « Nul ne peut congédier, refuser d’embaucher ou autrement pénaliser dans le cadre de son emploi une personne du seul fait qu’elle a été déclarée coupable d’une infraction pénale ou criminelle, si cette infraction n’a aucun lien avec l’emploi ou si cette personne en a obtenu le pardon. » [15]
Ainsi, un employeur peut procéder à la vérification des antécédents judiciaires d’une personne candidate dans la mesure où cette vérification est justifiée par le fait qu’elle pourrait avoir « (…) une incidence réelle et concrète sur la capacité de la personne à remplir ses fonctions.[16] » . Cependant, pour refuser une candidature sous le motif de ses antécédents judiciaires, l’employeur doit prouver que la nature de l’infraction est directement liée au poste à occuper. Par exemple, le rejet de la candidature d’une personne jugée coupable de fraude pour un poste en conseil financier serait justifié. Cependant, cette même décision pour un poste de préposé à l’entretien dans une usine de fabrication de meubles ne le serait probablement pas. C’est pour cette raison qu’il est recommandé que cette étape survienne seulement au moment où une offre d’emploi conditionnelle a été faite à la personne candidate. Il est aussi important de ne pas laisser la personne commencer à travailler avant que les vérifications soient complétées, car à défaut de le faire, l’entreprise pourrait être considérée comme ayant renoncé à la condition d’une vérification réussie des antécédents.
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Enquête de crédit
Dans certaines industries, comme en finance ou vente de produits d’assurance, les enquêtes de crédit sont une pratique courante. Cependant, comme pour la vérification des antécédents judiciaires, vous devez établir un lien entre la situation financière d’une personne et le poste à pourvoir afin que cette enquête soit justifiée. Cette étape devrait également survenir après avoir soumis une offre d’emploi conditionnelle à la personne candidate. Enfin, à noter qu’un refus d’embauche fondé sur une faillite, un mauvais dossier de crédit ou un endettement excessif pourrait être considéré comme discriminatoire sur la base de la condition sociale. [17]
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Examens médicaux préembauche
Comme mentionné préalablement, la Charte interdit aux employeurs de recueillir des informations médicales sur une personne, sauf si ces informations se rapportent aux qualités et aptitudes requises par l’emploi. La procédure d’examen médical préembauche peut, par exemple, inclure : un questionnaire médical, un examen des fonctions motrices, une entrevue avec une ou un professionnel de la santé, etc.
Ce faisant, et comme pour toutes les autres étapes du processus de recrutement, l’examen médical préembauche, si nécessaire, doit avoir pour objectif de vérifier chez la personne candidate les aptitudes et qualités requises pour effectuer l’emploi. Dans ce cas précis, il s’agit donc d’établir s’il existe chez la personne une limitation ou une condition d’ordre médical empêchant l’exécution des tâches du poste convoité. Ainsi, les vérifications médicales doivent se limiter à ce qui est en lien direct avec l’emploi. Finalement, afin de s’assurer que l’employeur ne profitera pas des informations collectées au cours de l’examen médical pour discriminer en employant la personne qui a le meilleur état de santé, cette étape devrait survenir une fois l’offre d’emploi conditionnelle faite par écrit à la personne candidate. [18]
À titre illustratif, vous devriez aussi respecter les principes suivants : [19]
- Éviter d’utiliser un questionnaire médical préembauche standardisé et s’appliquant à tous les postes de l’entreprise.
- Formuler les questions de sorte à obtenir uniquement les informations pertinentes et en lien avec les aptitudes ou qualités requises par les tâches essentielles du poste.
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Offre d’emploi
Bien que cela ne soit pas obligatoire, il est de bonne pratique lors de l’embauche d’une personne de fournir et de faire signer un document écrit confirmant l’embauche, comme une lettre d’offre d’emploi ou un contrat de travail [20], dans lequel vous pourrez consigner plusieurs informations importantes qui touchent aux conditions de travail de l’employé, certaines de vos politiques, vos attentes, etc. Cela évitera les malentendus et répondra à diverses questions que l’employée ou employé pourrait avoir sur les pratiques de gestion des ressources humaines de l’entreprise. C’est également ce qui fera foi de l’engagement de chaque partie à travailler ensemble à compter d’une date donnée et sous certaines conditions. Voici quelques exemples d’éléments habituellement présents dans une lettre d’offre d’emploi ou un contrat de travail :[21]
- La date d’entrée en fonction
- La durée du contrat de travail : déterminée ou indéterminée
- La nature du poste occupé : le titre du poste et les tâches (vous pourriez inclure la description de poste en annexe, en prenant soin de prévoir que celle-ci pourrait être révisée selon les besoins de l’employeur)
- Le statut de l’employée ou employé : temps plein, temps partiel, sur appel
- Les nom et titre de la supérieure ou du supérieur immédiat
- La rémunération : salaire, boni, commissions, pratique en matière de révision salariale
- L’horaire de travail
- La durée de la période de probation (le cas échéant)
- Les vacances, congés et autres avantages sociaux (assurance collective, REER, etc.) s’il y a lieu
- Toute autre condition de travail ou entente particulière (télétravail, lieu de travail, remboursement des dépenses, équipement fourni, etc.)
- Une clause sur les modalités de résiliation du contrat de travail, notamment en cas de démission de l’employée ou employé ou de résiliation par l’employeur
- Une ou des clauses sur la confidentialité, la propriété intellectuelle et les clauses restrictives, ou qui réfèrent à vos politiques à cet égard (le cas échéant
- Un engagement de la part de l’employée ou employé de respecter l’ensemble des politiques, pratiques et procédures de l’employeur
- La signature des deux parties, incluant la date et le lieu de la signature
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