lois-et-reglements / jurisprudence

Obligations liées à la santé d’un enfant

La plainte (art. 122 L.N.T.) d'une coiffeuse contestant son congédiement imposé le jour de son retour au travail après une absence pour prendre soin de son enfant malade est accueillie; les reproches de l'employeur, notamment quant au non-respect de son horaire de travail, constituent un prétexte.
20 mars 2025

Intitulé

Bruni c. Georges, 2024 QCTAT 4333 *

Juridiction

Tribunal administratif du travail, Division des relations du travail (T.A.T.), Montréal

Type d'action

Plainte en vertu de l'article 122 de la Loi sur les normes du travail à l'encontre d'un congédiement — accueillie.

Décision de

Sylvain Gagnon, juge administratif

Date

3 décembre 2024


Décision

La plaignante occupait un emploi de coiffeuse chez l'employeur, un salon de coiffure — elle allègue avoir été congédiée en raison de l'exercice d'un droit protégé par la loi, alors qu'elle s'est absentée pour remplir des obligations liées à la santé de son enfant — l'employeur soutient avoir congédié la plaignante pour des motifs sérieux n'ayant rien à voir avec cette absence, soit des actes malhonnêtes — il admet que la plaignante s'est absentée pour prendre soin de son fils malade — il reconnaît également qu'elle l'en a avisé et n'invoque aucun non-respect des autres conditions d'exercice de ce droit — puisque le congédiement a été imposé le lendemain de cette absence, la concomitance entre les 2 événements ne fait aucun doute — le congédiement est donc présumé avoir été imposé en représailles à l'exercice d'un droit protégé par la loi — l'employeur a le fardeau de repousser cette présomption — les doléances invoquées par l'employeur lors de l'audience portent sur l'heure d'arrivée de la plaignante au salon — la version de l'employeur concernant l'entente initiale ne contredit pas celle de la plaignante — il est plus probable que l'heure d'arrivée convenue initialement soit celle mentionnée par la plaignante et que l'exigence d'arriver plus tard ait été formulée par la suite, ce qui fait que l'on ne peut lui reprocher de ne pas avoir respecté l'entente initiale — quant aux heures de travail déclarées par la plaignante, l'employeur ne démontre aucunement l'existence d'un écart — il s'est contenté de déposer des pages d'un cahier de rendez-vous — sans autre explication, ces documents ne permettent pas de voir le décompte fourni initialement par la plaignante ni l'écart allégué de 4,5 heures — il ne s'agit que d'une erreur de la part de la plaignante, qu'elle a admise après avoir refait ses calculs — l'affirmation de l'employeur voulant que cela constitue un acte malhonnête n'est pas soutenue par la preuve — celui-ci a renoncé à congédier la plaignante en raison de ce motif lors d'une rencontre, et aucune autre occurrence subséquente d'un tel geste n'a été mise en preuve — ce motif constitue un prétexte lorsqu'il est invoqué pour justifier le congédiement de la plaignante, lequel est survenu plus de 3 semaines après les faits, au lendemain d'une absence pour s'occuper de son enfant malade — aucune entente stipulant que la plaignante avait l'obligation de rapatrier ses anciens clients n'a été conclue et celle-ci n'a pas menti à ce sujet — la plaignante ne s'est jamais engagée à autre chose qu'à tenter de rapatrier ses anciens clients — il existait uniquement une entente selon laquelle elle bénéficierait d'une augmentation de salaire si elle y parvenait, et ce, sans qu'un délai soit précisé — quant à l'appropriation d'un produit sans le consentement de l'employeur, il ressort de la preuve que ce dernier a autorisé la plaignante à emprunter le produit en question, et ce geste n'a pas été pris en compte dans la décision de la congédier — ce motif constitue un prétexte — l'employeur reproche à la plaignante d'avoir fixé un rendez-vous à une cliente de passage et de l'avoir annulé, ce qu'elle n'aurait pas le droit de faire — la preuve ne démontre pas qu'il était interdit à la plaignante d'agir ainsi — ce n'est que le lendemain de son absence pour s'occuper de son fils malade, le jour de son congédiement, que l'employeur a indiqué à la plaignante qu'elle n'avait pas le droit de communiquer directement avec la cliente — il est plus probable qu'il s'agit également d'un prétexte — même si la version de l'employeur était retenue à cet égard, il s'agirait du seul reproche fondé, ce qui serait bien peu pour constituer un motif sérieux — en outre, l'employeur n'a pas invoqué ce reproche au moment où il a congédié la plaignante — l'exercice par celle-ci du droit de s'absenter du travail pour remplir des obligations reliées à la santé de son enfant fait à tout le moins partie des raisons pour lesquelles elle a été congédiée, ce qui suffit pour conclure qu'il s'agit d'une mesure de représailles — la présomption n'a pas été repoussée et le congédiement est annulé — bien que la réintégration soit ordonnée, le Tribunal prend acte de la renonciation de la plaignante.

Suivi : Pourvoi en contrôle judiciaire, 2024-12-30 (C.S.), 500-17-132583-249.