Intitulé
Syndicat des professionnelles et professionnels de l'éducation du Saguenay et Centre de services scolaire de la Jonquière (Joanie Marchand), 2024 QCTA 496
Juridiction
Tribunal d'arbitrage (T.A.)
Type d'action
Grief contestant l'affectation du personnel. Accueilli en partie.
Décision de
Me Natacha Lecompte, arbitre
Date
8 novembre 2024
Le syndicat conteste l'affectation de la plaignante, qui occupe le poste de psychoéducatrice, pour l'année scolaire 2023-2024, estimant qu'elle est fondée sur un motif discriminatoire, soit la possibilité que la plaignante devienne enceinte au cours de la prochaine année. L'employeur soutient que l'ancienneté constitue le critère qui a servi pour prendre sa décision. Outre les dommages-intérêts demandés pour compenser les préjudices matériels subis ainsi que les indemnités à titre de dommages moraux et punitifs réclamées par la plaignante, le syndicat souhaite que celle-ci soit affectée selon la méthode d'affectation qui est utilisée pour tous les autres membres du personnel professionnel.
Décision
Le syndicat a démontré, à première vue, les éléments constitutifs de la discrimination. Il n'est pas nécessaire qu'une personne soit enceinte pour soutenir qu'elle est victime de discrimination fondée sur la grossesse, pourvu que la personne qui exerce la discrimination entretienne la perception qu'elle l'est ou que le fait de l'être emportera une restriction, une limite ou une conséquence qu'elle veut éviter. Or, en l'espèce, la gestionnaire a mentionné à la plaignante qu'elle devait recourir à la «gestion du risque» en raison de sa prétendue grossesse pour déterminer qui, entre elle et sa collègue, serait affectée au projet convoité. L'employeur n'a pas fait la preuve que sa décision était fondée sur des exigences professionnelles justifiées. Notamment, le recours au critère de l'ancienneté pour expliquer l'affectation de la collègue de la plaignante est plutôt une explication ex post facto. Par conséquent, la distinction établie en fonction de la grossesse de la plaignante a compromis la reconnaissance et l'exercice de son droit à des conditions de travail sans discrimination. La plaignante a été défavorisée arbitrairement puisque son affectation s'est décidée sur la base d'une considération qui n'est pas pertinente quant au travail. En revanche, le remède demandé par le syndicat relativement à l'affectation de la psychoéducatrice ne peut être accordé. Bien que le processus d'affectation ait été entaché par de la discrimination, la preuve ne permet pas de retenir que, n'eût été cette violation, la plaignante aurait obtenu l'affectation convoitée. Le paiement de dommages-intérêts est le redressement approprié pour remédier au préjudice subi par celle-ci.