Parties
Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 4333 et Services de quai Fagen inc. (Terminal Sorel-Tracy) (Claude Girard)
Juridiction
Tribunal d'arbitrage (T.A.)
Type d'action
Grief contestant un congédiement. Rejeté.
Décision de
Me Pierre Laplante, arbitre
Date
4 novembre 2022
L'employeur, qui exploite un port privé, reproche au plaignant, soit un opérateur de chariot élévateur cumulant plus de 7 années d'ancienneté, d'avoir travaillé sous l'influence de l'alcool, du tétrahydrocannabinol (THC) et de l'amphétamine. Le syndicat soutient que la mesure n'a pas été imposée dans le délai prescrit par la convention collective et, sur le fond, que la sanction est déraisonnable. Outre ses moyens au soutien du congédiement, l'employeur conteste le statut d'expert de l'un des témoins du syndicat.
Décision
Une suspension sans traitement a été imposée au plaignant le 2 février 2021 et l'employeur a mis fin à l'emploi de ce dernier le 26 février suivant. Selon la convention, toute mesure disciplinaire doit être communiquée au salarié dans les 20 jours suivant la «reconnaissance de l'infraction». Cette notion se distingue de la «connaissance des faits». Le fait est un événement donné, alors que l'infraction se veut la transgression d'une règle à la suite d'un fait donné. Cela signifie que le délai commence à courir à partir du moment où, après l'analyse d'une situation, l'employeur conclut qu'une règle a été transgressée. En l'espèce, après l'échec du plaignant au test de dépistage initial, plusieurs étapes ont dû être franchies par l'employeur. Aucune de ces étapes complémentaires aux événements du 2 février ne paraît dilatoire, excessive ou inutile. Au contraire, elles relèvent toutes d'une enquête sérieuse et minutieuse. Ce processus a abouti à la «reconnaissance de l'infraction», le 19 février, à la suite de la réception du rapport du médecin expert en toxicomanie. Le congédiement a donc été annoncé à l'intérieur du délai prescrit.
Le professeur agrégé de la faculté de psychoéducation retenu comme expert par le syndicat ne pouvait poser un diagnostic de dépendance à l'alcool ni conclure à une réhabilitation. Ce pouvoir relève exclusivement d'un médecin. Le Tribunal ne peut donc lui reconnaître le statut d'expert. La partie factuelle de son rapport est également irrecevable.
Quant au fond, il est vrai que la technicienne ayant effectué les tests de dépistage n'a pas été en mesure d'indiquer quelle était la marge d'erreur des appareils utilisés. Les tests ne doivent pas pour autant être déclarés non fiables. Au contraire, la preuve a démontré leur sérieux. De toute façon, le plaignant a admis avoir consommé de l'alcool le jour de l'événement. Enfin, à la lumière de toutes les circonstances de cette affaire, il paraît évident que le lien de confiance qui doit nécessairement exister entre un salarié et son employeur a été définitivement rompu. En effet, quelques années auparavant, l'employeur avait déjà autorisé le plaignant à s'absenter pour suivre une thérapie afin de résoudre son problème de consommation d'alcool et de drogues. En dépit de cela, le plaignant a sciemment contrevenu à la politique de l'employeur, qu'il connaissait. En outre, il a nié les faits reprochés et a tenté de tromper l'employeur, en plus de n'exprimer aucun regret. Enfin, son milieu de travail est un environnement risqué et son poste est lui-même à haut risque.