
J’ai eu le bonheur d’apprendre avec de grands maîtres québécois, américains et français. Tous avaient une très grande qualité : ils étaient centrés sur mon expérience et c’est à partir d’elle qu’ils arrivaient à me guider dans ma formation. Ils établissaient un rapport égalitaire avec moi, nonobstant leur immense connaissance de la personne et des entreprises. À leur contact, j’expérimentais mes propres forces, ce qui affermissait mon estime personnelle. Je pouvais ainsi développer ma confiance personnelle et professionnelle.
Après plusieurs années, j’ai pris conscience de cette relation et j’ai eu l’idée d’échanger avec eux sur leur façon d’accompagner. Voici, en résumé, ce que j’ai appris d’eux.
Des postulats et des croyances
La démarche de mes guides reposait sur un ensemble de postulats et de croyances. Les véritables accompagnateurs s’inspirent de l’approche des scientifiques : ils ne possèdent aucune vérité, ils n’ont que des hypothèses. Ces hypothèses sont le résultat de leur expérience et de la réflexion qui en découle. Ils croient que chaque individu a un véritable potentiel qu’ils se donnent comme mission de faire émerger afin que cette personne puisse s’enrichir à partir de sa propre expérience. Ils adoptent ainsi la posture de l’accompagnateur. Puisque chaque personne (ou client) a sa propre expérience, ils savent qu’en se mettant en mode d’écoute, ils vont tout simplement continuer d’apprendre avec eux et de s’enrichir.
Une approche accompagnatrice : l’interaction professionnelle
Yves St-Arnaud1 a développé une approche qu’il appelle l’interaction professionnelle, axée sur une démarche de coopération.
Dans cette approche, l’accompagnateur instaure un rapport égalitaire avec son client. Il fixe avec ce dernier un but à la démarche qu’ils entreprennent; les deux interlocuteurs respectent leurs champs de compétences et acceptent que l’un influence l’autre. C’est un travail d’équipe. Cette approche permet non seulement d’échanger des informations – des connaissances –, mais également de créer une relation qui permet de consolider l’estime personnelle de chacun. Les interlocuteurs ne cherchent pas à se convaincre mutuellement, mais plutôt à se comprendre. C’est une posture qui va au-delà du « j’écoute… je vais apprendre ». C’est la posture du « nous nous écoutons, nous partageons nos expériences, nous allons apprendre ensemble ».
Des cadres de référence en guise d’hypothèses
Au fil des ans, j’ai pris conscience que, lorsque je proposais des cadres de référence – une sorte de lunettes – à un client pour qu’il puisse réfléchir à sa propre expérience, cela semblait faciliter l’accès à sa propre expérience. En présentant ces cadres de référence comme des hypothèses, je pouvais demeurer pleinement dans mon champ d’expertise tout en respectant l’expérience du client. Le recours à des cadres de référence accélérait le processus d’apprentissage, sans intervenir dans le champ d’expertise du client.
L’impact de la posture de l’accompagnateur
Selon certaines études, quand on se place dans la posture d’expert « je vais t’expliquer… je sais », l’interlocuteur se met sur la défensive, comme dans tout rapport autoritaire. Il semblerait qu’une telle attitude déclenche chez l’interlocuteur la partie limbique de son cerveau, liée à l’état de survie. Mais lorsqu’on est dans un rapport égalitaire, sans jugement et respectueux de l’autre, ce sont les parties du néocortex qui s’activent. Toute l’attention de l’interlocuteur est portée sur ce qu’il est en train d’expérimenter donc, par voie de conséquence, sur son apprentissage.
Un cheminement personnel
Tant qu’on n’est pas reconnu dans son domaine d’expertise, il est plus difficile de se positionner comme accompagnateur et de se placer véritablement en mode d’écoute. On a tendance à montrer aux autres ce qu’on sait.
Un travail sur soi est nécessaire. Les approches de pleine conscience telles que développées par Jon Kabat-Zinn ou encore le leadership de pleine conscience (mindfulness) sont des pistes de travail qui permettent d’améliorer sa posture d’accompagnateur.