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Les priorités en rémunération et avantages sociaux en 2024

Le contexte économique incertain oblige les organisations à remettre en question leurs priorités en rémunération globale. Présentation de quatre axes stratégiques en rémunération et avantages sociaux à privilégier en 2024.
26 juin 2024
Ordre des conseillers en ressources humaines agréés

Le contexte économique incertain oblige les organisations à revoir leurs priorités en rémunération globale. Lucie Besnoist, CRHA, conseillère principale, Rémunération, et Sophie Limoges, conseillère principale, Assurance collective, toutes deux chez Normandin Beaudry, ciblent quatre axes stratégiques pour les organisations en 2024.

Pour Lucie Besnoist, le contexte économique actuel, comportant un risque de stagflation, amène essentiellement les organisations dans deux positions bien différentes. « On assiste à une situation assez paradoxale. D’un côté, la prudence, avec certaines organisations qui envisagent restructuration et gels d’embauche, et de l’autre, l’effervescence, alors que les organisations continuent d’accorder et de prévoir des augmentations salariales généreuses. »

La conseillère principale en rémunération croit également que les entreprises souhaitent répondre aux attentes des employées et employés tout en se démarquant dans un marché où les talents qualifiés sont rares. Les organisations devraient, selon elle, chercher à optimiser leur enveloppe de rémunération globale, « en investissant dans des stratégies et des projets dont l’effet sera concret et mesurable à court terme, mais dont la portée les positionnera dans des conditions favorables à long terme ».

Investir dans une culture d’équité, de diversité et d’inclusion

La première avenue consiste à investir dans une culture d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI). Sophie Limoges souligne son importance. « Dans notre enquête REMUN, une organisation sur cinq considère l’EDI comme l’une de ses trois principales priorités d’action pour l’année à venir. Pourtant, des études soulignent les nombreux avantages d’une stratégie EDI bien implantée. » À son avis, une telle approche contribue à une meilleure performance financière, en plus de renforcer l’attraction et la fidélisation des employées et employés. « Ce sont deux priorités d’action reconnues par les organisations. »

Sophie Limoges met en garde les organisations qui n’établiront pas de stratégie EDI. « Une projection démographique démontre que les départs massifs à la retraite continuent et que d’ici 2036, une personne sur trois dans la population active sera une personne racisée. À la relance économique, serez-vous préparés? Aurez-vous la main-d’œuvre nécessaire pour atteindre vos objectifs d’affaires? » demande-t-elle. C’est la raison pour laquelle elle croit qu’il faut amorcer cette réflexion dès maintenant.

La spécialiste souligne les tendances actuelles du marché qui mettent en lumière la santé des femmes. « Les discussions portent sur tous les aspects, allant de la santé physique à la santé psychologique, en passant par la santé financière et sociale. » Elle croit qu’une stratégie EDI permet aux organisations de se démarquer tout en réduisant les inégalités en emploi. « Une situation gagnante pour tout le monde. »

Elle rappelle toutefois qu’il faut du temps pour mettre en œuvre une stratégie EDI. Sophie Limoges préconise une approche structurée, soutenue par la direction de l’organisation, débutant par un état des lieux et un diagnostic de la situation. « Une fois les initiatives recensées, il faut prioriser et suivre la mise en œuvre. »

Optimiser l’utilisation de l’enveloppe de rémunération globale

La deuxième priorité consiste à optimiser son enveloppe de rémunération globale, au-delà du budget d’augmentation salariale. Lucie Besnoist soutient qu’il existe d’autres solutions pour les organisations qui ne peuvent pas égaler les budgets prévus par le marché.

« Une solution intéressante est de bonifier la partie variable de la rémunération, plutôt que le salaire. » Elle donne l’exemple d’un boni spécial en fin d’année, liée à l’atteinte des objectifs d’affaires ou le versement d’une partie ou de l’ensemble des augmentations salariales sous la forme de montants forfaitaires.

Elle suggère aussi aux organisations, dont le budget est limité, de reporter ou de planifier un cycle de révision salariale additionnelle plus tard dans l’année, en fonction des résultats financiers obtenus.

Lucie Besnoist définit la flexibilité comme levier de différenciation. Elle prend diverses formes comme le télétravail, ou la bonification des comptes de gestion santé et mieux-être dont l’utilisation tient compte des besoins individuels.

L’optimisation des politiques de temps chômé payé, comme les vacances, est également un axe à considérer. Celles-ci pourraient par exemple être établies en tenant compte des années d’expérience d’une personne plutôt que selon ses années d’ancienneté dans l’organisation. Pour la CRHA, les vacances sont une composante de l’offre de rémunération globale qui a une incidence significative sur l’attraction et à la fidélisation du personnel.

Le développement des compétences représente également une facette déterminante de la rémunération globale. Si les augmentations salariales sont limitées à court terme, prioriser le développement des compétences permet aux employées et employés de visualiser leur avenir à long terme au sein de l’organisation.

Lucie Besnoist rappelle finalement que dans un contexte d’augmentation salariale limitée, il est important de différencier les augmentations en ciblant certains profils. « On peut penser aux emplois qui sont au cœur de nos opérations, aux rôles clés pour lesquels il y a peu, voire aucune relève à l’interne. Et évidemment, on veut cibler les talents hautement performants. »

Opter pour une stratégie de clarté salariale

Le concept de transparence salariale prend une importance accrue en 2024, en raison de l’adoption de nouvelles lois en Colombie-Britannique et en Ontario. De plus, les employées et employés manifestent une volonté croissante de comprendre comment leur salaire est déterminé. « Une grande part de la satisfaction du personnel à l’égard de leur salaire et à l’égard de leurs augmentations salariales réside dans leur compréhension du processus », rappelle Lucie Besnoist. Celui-ci doit être transparent, compréhensible et appliqué de façon uniforme pour être perçu comme juste et équitable.

Elle juge important de réfléchir à la transparence salariale avant de se lancer. « Peu importe la situation dans laquelle on se trouve, la première étape est de réaliser un diagnostic de la situation. Quelles sont vos obligations légales? Vos pratiques de rémunération sont-elles concurrentielles? Sont-elles équitables? Êtes-vous en mesure de les expliquer et de les justifier à votre personnel? » Ensuite viendra la réflexion sur les objectifs à atteindre.

Lucie Besnoist préfère d’ailleurs parler de clarté que de transparence. « Il est beaucoup plus porteur, selon nous, de mettre l’accent sur la compréhension, plutôt que sur la transmission de l’information unique », explique la conseillère principale en rémunération. La définition de clarté salariale, en déterminant le degré de transparence souhaité, est essentielle. Lucie Besnoist recommande une gestion du changement et un calendrier progressif d’implantation pour faciliter la transition, permettant à tout le monde de se familiariser avec les concepts.

Mettre de l’avant des programmes de santé 360 pour les employés

Sophie Limoges prévient les organisations tentées de réduire les programmes de santé et de bien-être. « Ils sont primordiaux pour optimiser la présence au travail. » Ces programmes abordent tous les aspects de la santé globale, soit la santé physique et psychologique, la santé financière et sociale, et couvrent la prévention, la gestion des absences ainsi que le retour au travail après une invalidité.

Les employées et employés en santé bénéficient de programmes pour maintenir leur bien-être. Celles et ceux qui travaillent activement tout en ayant des enjeux de santé ont accès à des programmes particuliers afin d’anticiper d’éventuelles absences liées à des conditions chroniques ou à des problèmes de santé mentale. La proportion importante de personnes en invalidité démontre l’importance de programmes visant à les ramener au travail en santé de manière rapide et efficace.

La mise en place de ces programmes nécessite une approche flexible pour répondre aux besoins individuels des membres du personnel. Pour cerner les initiatives les plus porteuses, Sophie Limoges suggère de se référer aux outils tels que les résultats des sondages de mobilisation, les données de réclamation des régimes d’assurance collective et les données d’utilisation des services d’aide. Ils permettront d’orienter la conception et l’adaptation continue des programmes.

Non seulement la gestion des ressources humaines en 2024 doit composer avec des défis économiques complexes, mais elle offre également des possibilités de distinction et d’innovation. En se concentrant sur ces priorités, les entreprises peuvent naviguer avec succès dans un environnement en constante évolution tout en répondant aux besoins variés de leurs employées et employés.


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