ressources / revue-rh / volume-26-no-4

Soutenir le transfert des apprentissages pour renforcer l’apprentissage collectif à la Ville de Montréal

En 2020, la Ville de Montréal adoptait un plan stratégique ambitieux visant à accélérer la transition écologique, renforcer la solidarité, l'équité et l'inclusion, amplifier la démocratie et la participation et stimuler l'innovation et la créativité.
20 octobre 2023
Marie Cardinal-Picard | Yvonne Henkelmann, Ph. D.

Pour y parvenir, l'administration municipale s'engageait alors à « faire émerger une culture organisationnelle ouverte à l’expérimentation urbaine, à l’erreur et à l’apprentissage, tant pour la recherche de solutions aux enjeux urbains que pour la remise en question des mécanismes en place » (p. 58).

C’était l’occasion rêvée de passer d’une culture d’apprentissage centrée sur l’offre de formation à une culture valorisant le développement des personnes et de l’organisation. Ainsi, au Centre d'expertise en apprentissage, nous nous sommes posés les questions suivantes : comment les apprenantes et apprenants et les équipes utilisent leurs apprentissages? Comment les apprentissages transforment-ils les façons de faire? Et comment contribuer à ce changement culturel? #ApprendrePourAvancer

Augmenter le transfert des apprentissages est alors devenu notre objectif et notre levier pour faire évoluer l’apprentissage dans l’organisation. Nous avons travaillé en trois temps. D’abord, renforcer notre expertise au sujet de ce concept et des bonnes pratiques qu’il requiert. Ensuite, partager cette expertise avec nos partenaires du développement des compétences œuvrant dans d’autres unités de l’organisation. Enfin, mener des actions visant à augmenter le transfert des apprentissages.

#ToujoursApprendre

Pour renforcer notre expertise, nous avons d’abord pris appui sur les travaux de Jean-François Roussel (2011) portant notamment sur les pratiques influençant le transfert des apprentissages. Les notions de transfert rapproché et éloigné nous ont permis de rehausser et d’adapter notre soutien-conseil au contexte de transfert dans chaque projet de formation que nous accompagnons. En contexte de transfert rapproché, soit lorsque des situations de formation et de travail sont similaires, il y a peu d’adaptation à apporter aux apprentissages pour les appliquer. Par exemple, une formation sur une application technologique. La démonstration et la reproduction des comportements sont alors suffisantes. En contexte de transfert éloigné, lorsque le contexte de travail diffère de la situation de formation, comme lors de l’apprentissage d’un savoir-être, l’adaptation des acquis est plus importante et doit être soutenue en formation, comme nous l’abordons plus bas.

Pour nous éclairer sur les améliorations à apporter aux divers parcours de formation, nous nous sommes appuyés sur les travaux de Martin Lauzier et al. (2016), surtout ceux sur l’évaluation des prédicteurs du transfert des apprentissages, soit :

  1. Le sentiment d’efficacité personnelle
  2. La motivation
  3. La valeur perçue de la formation
  4. Le soutien perçu des pairs et des gestionnaires

Plusieurs ateliers d’apprentissage et de discussion ont permis à notre équipe d’approfondir l’expertise, puis d’envisager les diverses manières dont nous pouvions appliquer ces notions. Ensemble, nous avons, nous aussi, transféré nos apprentissages.

#MissionPartagée

Pour partager ces connaissances au-delà de notre équipe, nous avons utilisé plusieurs moyens de communication destinés d’abord au personnel concerné par la production ou la diffusion d’activités d’apprentissage. Par exemple, des infographies, des gabarits d’évaluation de formation, des publications dans notre infolettre et notre forum, ainsi qu’un atelier de discussion. À travers ces moyens, l’utilisation de mots-clics allait se révéler un bon moyen de stimuler la curiosité et l'enthousiasme autour de l’apprentissage : #MarketingDeLaFormation.

#TransfertEnAction

Les actions que nous menons pour augmenter le transfert des apprentissages se situent sur trois plans : 1) faire évoluer les stratégies pédagogiques pour mieux préparer le transfert, 2) soutenir les équipes qui se forment pour augmenter leur motivation et le soutien des gestionnaires et 3) évaluer les prédicteurs du transfert dans de plus en plus de projets de formation.

#DroitÀL’erreur

Faire évoluer les stratégies pédagogiques se révèle un défi d’influence. En effet, grâce à notre nouvelle expertise, nous militons auprès des propriétaires de contenu de l’organisation pour des stratégies actives et réflexives, comme les mises en situation, les études de cas et le codéveloppement. Ces stratégies permettent de réfléchir aux meilleures actions possibles, de s’exercer, d’obtenir de la rétroaction et ultimement, de se sentir plus efficace. Le tout, dans un climat propice à l’apprentissage, dont une composante importante est le #DroitÀL’erreur.

#OnEnJase

Soutenir les équipes comporte aussi son lot d’influence, mais notre approche passe davantage par l’offre d’outils, comme des gabarits de messages sur les avantages de la formation et des pistes de discussion sur l’application des apprentissages. Une question que nous soumettons à la réflexion collective : « Ce contenu de formation, ça veut dire quoi chez nous? » Ici, le mot-clic #OnEnJase prend tout son sens.

En matière d’évaluation des prédicteurs du transfert, nos expérimentations nous ont appris que notre public en a beaucoup à dire pour nous pister sur les meilleures façons de le soutenir. Les questions sur le sentiment d’efficacité personnelle révèlent qu’il s’agit de l’indicateur le plus riche. Avec des échelles de réponse de 0 à 10, nous avons réussi à contourner la complaisance de l’évaluation. Ces travaux nous permettent aussi d’insister sur l’élaboration d’objectifs d’apprentissage sous forme de comportements observables. Cet exercice est apprécié des partenaires (propriétaires de contenus), car il met l’accent sur le résultat souhaité en milieu de travail plutôt que sur le contenu à transmettre.

À travers toutes ces initiatives, en tant que professionnelles et professionnels des ressources humaines, nous assumons un rôle d’animation et d’influence de notre communauté d’apprentissage. De plus, nous endossons un rôle de soutien et d’accompagnement des équipes qui se développent. Chaque projet est une occasion de renforcer la relation avec ces équipes en leur démontrant que nous comprenons leur réalité et leurs objectifs et en leur offrant des solutions adaptées à leur situation.

Influencer l'évolution de la culture de développement vers une organisation apprenante est un défi de taille. Nous avons choisi d’agir et de débuter avec la conscientisation que le but ultime de l’apprentissage est le changement de comportement en milieu de travail. En faire un processus d’apprentissage et de transfert collectif, avec nos partenaires, s’avère gagnant pour propulser l’apprentissage de l’organisation.

#C’estUnBonDébut
#LaVilleApprend
#ÀSuivre

Références

  • Lauzier, M., Annabi, D., Mercier, G. et Des Rochers, D. (2016). Mieux prédire le transfert des apprentissages : mesurer ce qui compte vraiment. Dans Lauzier, M. et D. Denis, Accroître le transfert des apprentissages. Québec : PUQ.
  • Roussel, J.-F. (2011). Gérer la formation : viser le transfert. Saint-Jean-sur-Richelieu (QC) : Guérin.
  • Ville de Montréal (2020). Montréal 2030 : Plan stratégique. Document téléaccessible à l’adresse : https://portail-m4s.s3.montreal.ca/pdf/20210128_montreal_2030_vdm.pdf

Prédicteurs du transfert des apprentissages

  1. Le sentiment d’efficacité personnelle
  2. La motivation
  3. La valeur perçue de la formation
  4. Le soutien perçu des pairs et des gestionnaires

Author
Marie Cardinal-Picard Conseillère principale Ville de Montréal

Author
Yvonne Henkelmann, Ph. D. Cheffe de section Ville de Montréal

Source : Revue RH, volume 26, numéro 4  ─ SEPTEMBRE OCTOBRE 2023