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Les IDGs, un référentiel de compétences intérieures : pour soutenir la durabilité extérieure

Les IDG (Inner Development Goals, Cibles de développement intérieur) représentent une bonne boussole permettant aux individus de cheminer dans la voie des organisations apprenantes, où l'innovation, la résilience et l'inclusion sont encouragées.
26 mai 2023
Lucie Marcoux, CRHA

Face aux défis actuels, économiques, démographiques, technologiques et climatiques, il devient crucial de développer des compétences intérieures aptes à nous permettre de co-créer un avenir durable et de faire face à ces obstacles, particulièrement ceux inscrits dans l'Agenda 2030 des Nations Unies. Justement, l'initiative IDG (Inner Development Goals) offre une solution encourageante pour rendre le développement durable possible, puisqu’elle permet le développement intentionnel de 23 compétences intérieures dans cinq capacités différentes.

Par compétences intérieures, nous entendons celles qui permettent aux individus et aux organisations de faire face à la complexité, d'anticiper l'incertitude et d'aborder la durabilité (Carreon, 2023). Ces compétences sont celles qui sont liées à la façon dont « Nous » (organisations, individus, écosystème social plus large) pensons, ressentons et agissons dans le monde. Elles pourront aider à transformer les manières d'être, de réfléchir, d’agir, d'interagir et de coopérer afin de mener une vie utile, durable et productive participant ainsi aux efforts en faveur de la transition socio-écologique. En effet, les organisations ne peuvent maximiser leur potentiel en faveur de cette transition que si elles se dotent de modèles d’affaires durables déclinés sous forme de stratégies, d’objectifs et d’indicateurs clairs pour y arriver. Les IDG ont été élaborés dans ce cadre, complétant ainsi les Objectifs de développement durable (ODD).

L'initiative mondiale des IDGs

Afin d’atteindre les 17 objectifs du développement durable fixés par l’ONU (ODD), les organisations, les groupes, les institutions et la société civile n’ont pas eu d’autres choix que s’engager dans des actions visant l’atteinte du bien-être collectif et d’essor d'une société durable. Jusque-là, plusieurs initiatives ont été réalisées dans ce cadre, mais parfois les résultats étaient décevants, car les compétences et les capacités transformatrices intérieures nécessaires pour cheminer vers cette voie n’étaient pas définies. Ce faisant, la recherche moderne a fait de grands progrès pour pallier cette situation donnant naissance à l'initiative mondiale des IDGs. Il s’agit d’un collectif mondial d’organisations, de chercheurs scientifiques, d'experts, de professionnels RH, de praticiens en développement organisationnel et de spécialistes du développement durable. Leur mission a été de co-créer un schéma directeur qui permet définir et de nommer les capacités, les qualités, les modes de pensées et les compétences transformatrices nécessaires pour comprendre, vivre et communiquer les changements actuels et à venir, et ce, dans une optique d’atteindre les ODD (Nations unis.org).

Un référentiel de compétences intérieures pour soutenir la durabilité extérieure

Figure 1 : le référentiel de compétences IDG

Les IDGs regroupent 23 compétences transformationnelles dans cinq différentes -capacités- : Être, Penser, Interagir, Collaborer, Agir. Ce référentiel contient un mélange de compétences vues comme plus professionnelles (comme la vision à long-terme) et d’autres qui relèvent de la sphère privée (boussole intérieure, humilité). Par exemple, le succès d’une intervention dépend de la posture de la personne qui arrive pour collaborer (ou pas) dans une rencontre. Les IDG sont considérées comme intérieures, car leur développement implique de se concentrer sur les pensées, les sentiments et le comportement intérieur plutôt que sur des résultats externes. En nous concentrant sur ces aspects intérieurs de nous-mêmes, nous sommes mieux équipés pour naviguer dans la vie de manière positive et épanouissante, et pour développer des relations saines et positives avec les autres.

Ce n’est pas un hasard si plusieurs personnalités influentes, chercheurs, gens d’affaires, professeurs reconnus s’investissent dans ce projet fédérateur. Plus de 1000 professionnels à travers le monde ont participé à cette initiative – et qui continue de croître et d’offrir des outils et opportunités de grandir. Pensons d’abord à Senge (2016), le père de l’organisation apprenante (La cinquième discipline), Otto Scharmer (Théorie U) et Kegan (2016) (Deliberately Developmental Organizations).

Les IDGs; une boussole des organisations apprenantes

Selon Kofman & Senge (2003), une organisation apprenante est une « une conception du développement continu d’une organisation, de ses membres, de ses capacités et de ses compétences afin d’améliorer ou de créer son propre avenir (Kofman & Senge, 1993)». Cela suppose que l’organisation développe sa souplesse d’adaptation aux évolutions continues de son environnement, mais développe également les capacités individuelles des dirigeants et collaborateurs qui y sont impliqués. En effet, dans les organisations apprenantes, les gens sont ouverts d’esprit, curieux et authentique. Ce sont des lieux où nos schèmes mentaux peuvent être remis en question, où l’on a droit à l’erreur, où on privilégie les observations aux certitudes, la cocréation des actions, les pratiques réflexives et la rétroaction, ce qui développe une grande autonomie et une solide agentivité. Les interactions entre les employés se font dans la posture de l’apprentissage mutuel (Schwarz, 2016). Développer la capacité à apprendre : c’est le socle pour cocréer des pratiques durables et pour faire face aux changements qui n’ont pas fini de s’accélérer.

La combinaison des capacités IDG avec les principes fondamentaux de l'organisation apprenante aide donc à faire évoluer les entreprises d’une culture apprenante à une culture transformationnelle. Des méta compétences (comme l’empathie, la pensée réflexive, cerner des problèmes) ont été reconnues comme étant des compétences générales qui permettent d'apprendre, d'innover et de s'adapter aux changements constants du monde professionnel (Boak & Coolican, 2001). En les pratiquant, les humains améliorent leur capacité à naviguer dans la complexité qui les entoure. Dans le présent tableau, vous retrouvez les liens entre l’organisation apprenante et les apports des IDGs

Figure 2 : IDG fondements de l'organisation apprenante

Conclusion

Les IDG représentent une bonne boussole permettant aux individus de cheminer dans la voie des organisations apprenantes, où l'innovation, la résilience et l'inclusion sont encouragées. Il s’agit d’une démarche où la maîtrise des dynamiques tant personnelles qu'organisationnelles, génèrent des conditions favorables à l'apprentissage, tant pour les individus, les équipes que pour les organisations elles-mêmes.

Rejoignez l'initiative IDG et développez vos compétences internes pour contribuer positivement à un avenir durable.

Références :

  • KEGAN, R., LAHEY, L.L. (2016). An Everyone Culture : Becoming a deliberately Developmental Organization. Boston, MA : Harvard
    Business Review Press.
  • MARCOUX, L. L’organisation apprenante : petits pas pour faciliter l’apprentissage de tout un système. Le Cancre, décembre 2020. https://rpfq.com/fichiers/fck/defaut/File/LeCancre-Decembre2020-Web[2].pdf
  • SCHARMER, C. O. (2009). Théorie U: Apprendre à changer pour un monde meilleur. Editions Yves Michel.
    SENGE, P.M. et al. (2016). La cinquième discipline : levier des organisations
    apprenantes. Paris : Eyrolles.
  • Kofman, F. & Senge, P.M. Communities of commitment: The Heart of learning organization,
  • Rodriguez f Carreon, V.Liminality. (2023). Change Starts Within.Challenges 14[2], 25.
  • Schwarz, B., & Baker, M. (2016). Dialogue, Argumentation and Education : History, Theory and Practice. Cambridge : Cambridge University Press.

Author
Lucie Marcoux, CRHA Facilitatrice en apprentissage RH Essentiel
Lucie Marcoux, M.A., CRHA est facilitatrice en apprentissage collaboratif pour RH Essentiel. Ninja de l’augmentation des capacités, Lucie ne cesse de s’émerveiller des mécanismes par lesquels les humains apprennent et se transforment - ou se restent bloqués. Ayant craqué le code de comment les adultes au travail développent leurs compétences et changent, elle met en place des dojos pour pratiquer de nouvelles façons pour sortir des ornières et travailler ensemble. Elle-même pratique la communication non violente, l’art-of-hosting (leadership participatif) et la Pensée horizontale (autogeston). Elle utilise les méthodes collaboratives afin d’accompagner ses clients (start up, génie, transport, manufacturier, regroupements d’OSBL, comités sectoriels et ordres professionnels) dans des changements importants pour eux. Lucie apporte un bagage diversifié en psychologie, en électro-technique, en marchés financiers et en ressources humaines, en plus d’une maîtrise en intervention dans les systèmes humains (DO). Elle privilégie l’approche appréciative et dialogique, qui rend ses clients partenaires d’une transformation utilisant des questions provocantes et des activités créatives souvent ludiques, afin d’augmenter leurs capacités à collaborer et innover via des solutions pratiques, en laissant une large place à l’inclusion, pour un climat de travail sain et une culture organisationnelle apprenante.

Source : Revue RH, volume 26, numéro 2  ─ AVRIL MAI JUIN 2023