Entrevue avec Josée Scalabrini, présidente de la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CSQ)
Quelle a été votre expérience de la pandémie en lien avec les conditions de travail de vos membres?
C’est un bouleversement qui nous a permis de voir autant le bon dans nos ressources humaines que les aspects très difficiles dans certains milieux. Là où il y a eu de l’écoute, du dialogue, de la compréhension et du respect, les choses se sont bien passées. Cependant, dans certains CSS l’insécurité a poussé les employeurs à être très rigides. À se servir seulement de la convention. Cela a mené à des confrontations. Et comme je le dis souvent : la confrontation mène à la confrontation. Le dialogue mène à l’ouverture.
Quels ont été les impacts de ces postures sur le terrain?
Pendant plusieurs mois, les consignes arrivaient vite et de toutes parts. Les employeurs [dans les CSS] sont beaucoup moins nombreux que les équipes en éducation, qu’on appelle les équipes-écoles. Ceux qui ont quand même pris le temps de faire un pas de recul et de consulter les équipes-écoles ont pu compter sur la collaboration des enseignants, du personnel de soutien et du personnel professionnel qui se sentaient respectés et écoutés. Ils avaient le goût de contribuer.
Mais c’est certain que la pandémie a mis en lumière de grandes lacunes. Le retard du milieu en ce qui concerne l’informatisation, par exemple. La lourdeur de la machine aussi. Il faut que le système soit en mesure de réagir plus rapidement!
Il y a des milieux qui, malgré tout, s’en sortent bien, et ce sont ceux où il y a de la souplesse et de la compréhension. Les endroits les plus rigides sont souvent ceux où il y a de l’insécurité. Et on tente souvent de masquer son insécurité et sa mauvaise compréhension du milieu par de la rigidité.
Qu’est-ce qui peut améliorer les pratiques managériales en matière de ressources humaines dans le milieu de l’éducation?
Cela requiert entre autres une bonne maîtrise du contexte. Il nous faut des directions des ressources humaines qui savent élaborer des politiques RH adaptées au contexte du milieu de l’éducation et accompagner leur mise en œuvre.
Travailler avec des êtres humains, c’est complexe. Travailler avec des êtres humains qui travaillent auprès d’êtres humains, c’est encore plus complexe! Connaître la réalité d’une école pour en comprendre les besoins, c’est essentiel.
Il faut connaître la réalité sur le terrain. Il faut faire preuve de jugement et comprendre le contexte humain. C’est ce que j’appelle le nécessaire besoin de souplesse dans les relations humaines et les ressources humaines. Et c’est justement cette capacité des RH à s’adapter aux différents contextes et besoins et à développer des politiques sur mesure qui fait de ces ressources des alliés privilégiés dans ce cadre.
Ces améliorations sont-elles possibles, selon vous?
Oui, mais on a un travail de société à faire. Il va falloir arrêter de voir les employeurs et les syndicats comme des ennemis. Pour le bien des employés en éducation, pour le bien des élèves. On doit apprendre à travailler en collaboration. Je demeure convaincue que c’est vraiment le fait de travailler ensemble, de partager, qui va nous amener à trouver les améliorations qu’on a l’obligation d’apporter en éducation.
Il s’est passé quelque chose de très intéressant au début de la pandémie. Il y a eu une volonté et un élan pour travailler avec l’ensemble des partenaires, ce qui ne s’était pas vu depuis des années. Et il s’est fait de belles choses. On a cherché et trouvé des solutions tous ensemble. C’est possible!
Je suis de celles qui croient que tout passe par l’éducation dans une société. Miser sur l’effort collectif et la transversalité des compétences représente des facteurs de succès pour améliorer les milieux de travail. Les professionnels RH ont certainement un grand rôle à jouer dans ce cadre; celui de maximiser le potentiel humain des organisations tout en favorisant leur développement.