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Chez Pratt & Whitney, des lendemains qui chantent!

Chez Pratt & Whitney, un constructeur mondial de moteurs d’avions, les changements dans les conditions de travail étaient déjà en cours en 2020. La pandémie a accéléré le processus et mis en exergue les priorités sur lesquelles les professionnels des ressources humaines voulaient miser. La vice-présidente aux ressources humaines, Caroline Maso, fait le bilan.
29 juin 2022

Entrevue avec Caroline Maso, CRIA, vice-présidente aux ressources humaines chez Pratt & Whitney

Vous êtes entrée en poste en janvier 2021, en pleine pandémie. Y a-t-il eu de nouvelles compétences à développer dans ce contexte?

Les conséquences de la pandémie se sont infiltrées de façon assez insidieuse dans nos vies personnelles et professionnelles. Il y a eu ce qui a été perçu comme une perte de contrôle qui a généré beaucoup d’inquiétude. Il a fallu s’adapter rapidement et faire le tri parmi les nombreuses informations qu’on recevait. Nous avions plusieurs sources d’énergie que nous venions de perdre, nous en avons trouvé d’autres qui permettaient de conserver un certain équilibre physique et mental.

Et quel a été le rôle spécifique des RH dans ce contexte?

Le rôle des RH a été celui d’un agent de changement qui conseille les gestionnaires et mobilise son expertise au service de la consolidation de leur savoir-être et le soutien à leur savoir-faire. Tout cela pour encourager les employés à libérer de nouvelles formes d'énergie aptes à optimiser leur performance professionnelle.

L’empathie et la résilience, qui font d’ailleurs partie de notre culture d’entreprise, ont été des aptitudes essentielles à canaliser et exercer avec discernement dans ce contexte. Nous avons également mis à disposition une plateforme numérique prête à apporter de l’aide aux employés ainsi qu’aux gestionnaires, ce qui a permis de rester connecté et de renforcer le sens de la communauté qui existait déjà.

Pratt & Whitney avait déjà grandement amélioré les conditions de travail avant la pandémie. Comment avez-vous procédé?

De concert avec notre programme de mieux-être, nous avons créé un comité sur la charge de travail afin de réviser le modèle de travail et proposer certains rajustements plus adaptés à cette nouvelle réalité. Nous avons voulu renforcer le besoin de prendre des pauses et encourager de bonnes pratiques pour améliorer la qualité de vie au travail, mobilisant ainsi toute une équipe multidisciplinaire. On a vu la création de zones de recharge et de zones sans réunion pour permettre que chaque employé puisse avoir le temps dont il a besoin pour réfléchir et se concentrer sur ses responsabilités. Nous avons demandé de ne pas envoyer de courriels après 18 heures, et ce, en tenant compte des fuseaux horaires des différents pays avec lesquels nous faisons affaire. Une fonctionnalité assurait la livraison des messages à l’heure désirée, afin de ne pas déranger les gens et de leur permettre de se déconnecter.

Comment visez-vous la mise en place d’un milieu de travail plus équitable et plus humain?

Dorénavant, une partie de nos employés travaillera en présentiel, certains adopteront la formule hybride, alors que d’autres choisiront de rester toujours en télétravail. Nous désirions par ailleurs que cette nouvelle culture faite de flexibilité et d’ouverture soit inclusive et équitable.

Ainsi, nous nous assurons continuellement que la voix de tous se fasse entendre, et que toutes nos actions et mesures favorisent l’équité et l’égalité des chances afin que nous soyons le reflet des communautés dans lesquelles nous sommes, partout dans le monde. Cela passe par la diversité de la main-d’œuvre, mais aussi par une nouvelle vision du monde du travail et des conditions pour l'exercer.

Si la dimension stratégique de la fonction RH n'est plus à démontrer, sa capacité d'action dans l'environnement complexe et dynamique des organisations d'aujourd'hui représente-elle un défi?

Sans doute. Le marché de l’emploi est de plus en plus concurrentiel. Il évolue et se transforme à une vitesse croissante et les qualités recherchées chez les collaborateurs ne sont plus les mêmes. Il faut développer des stratégies d'attraction proactives, innovatrices et transformationnelles tant pour les lieux de travail que pour la qualité de vie des gens. Les sources de recrutement traditionnel, ce n’est plus la meilleure façon de faire. Les jeunes talents, par exemple, utilisent les nouveaux réseaux sociaux comme TikTok. Nous devons donc être familiers avec cette plateforme, ce qui permet d’aller explorer de nouveaux bassins de candidats qui ne seraient pas disponibles autrement, de procéder à des entretiens d’emploi plus créatifs, et de mettre également de l’avant la diversité et l’équité. Il y a encore beaucoup d’inconnus, les défis continuent de surgir, mais nous sommes dans une période où les organisations sont ouvertes au changement, ouvertes à modifier leurs façons de faire, à repenser l’organisation du travail.

Les nouvelles technologies peuvent-elles être mises à profit dans cette réorganisation?

Certainement. L’intelligence artificielle pourrait être utilisée par les services des ressources humaines, non seulement dans la recherche de talents, mais aussi pour prédire les compétences du futur, pour faire une meilleure planification de la main-d’œuvre requise et pour permettre l’essor d’une intelligence collective à la fois en présentiel ou en virtuel.

En terminant, quel bilan faites-vous des deux dernières années?

Elles nous ont forcés à repenser le monde du travail. Il y a eu des changements dans la philosophie et la culture de l’entreprise. C’est dans notre ADN d’innover et de prendre soin de nos gens. Les employés sont et resteront au cœur de nos décisions et de nos programmes. Nous sommes des pionniers et nous ne reviendrons pas en arrière!