Entrevue avec Stéphane Rochereau, CRHA, partenaire d’affaires RH chez Brio Conseils
Quelles solutions avez-vous mises de l’avant pendant la crise sanitaire pour pallier les défis rencontrés par les professionnels RH?
Nous avons d’abord créé une cellule pour prendre soin de notre équipe : mobilisation, bien-être et sentiment d’appartenance. Nous avons aussi multiplié les mécanismes de communication durant cette période afin de toujours prendre le pouls de nos équipes et de pouvoir identifier rapidement les collègues qui avaient besoin d’aide.
Comment décririez-vous l’évolution des RH à la suite de la pandémie de COVID-19?
Une crise comme celle que nous avons vécue nous rappelle l’importance d’une équipe mobilisée et en santé, ainsi que la valeur, pour une entreprise, de disposer d’une culture organisationnelle forte et fédératrice. D’ailleurs, la grande majorité des plans stratégiques définis actuellement comprend au moins un axe ou une priorité traitant de culture ou de gestion des talents. Depuis des années, nous parlons de la façon dont la fonction RH doit faire évoluer sa posture, son offre et renforcer son rôle de moteur incontournable de la transformation des organisations, de l’expérience-employé et des milieux de travail.
La crise a constitué justement ce tournant qui a permis à la fonction RH d'imposer son leadership et de démontrer sa valeur ajoutée pour les organisations et l'optimisation de leurs stratégies.
Comment les styles de gestion doivent-ils s’adapter à la rareté de main-d’œuvre?
Dans ce nouveau contexte instable et incertain, où le leader est amené à gérer des équipes dispersées autant géographiquement que sur le plan de l’organisation, une évolution importante est nécessaire, et ce, à tous les niveaux de leadership (cadres supérieurs, gestionnaires de 1er niveau, etc.). Plus que jamais, ceux-ci sont un maillon essentiel de l’évolution des entreprises et vont devoir continuer à faire évoluer leurs postures et leurs habiletés autour de trois grandes zones de compétences : insuffler une direction claire et ambitieuse, mobiliser le potentiel autour du changement et transformer l’action.
Comment devront se déployer les pratiques managériales à l’avenir pour qu’elles soient plus efficaces?
Les entreprises ne peuvent plus gérer les employés comme autrefois, et cela nécessite une évolution importante du profil de nos leaders. Aujourd’hui, par exemple, avec le travail à distance, il devient plus difficile de vérifier comment le travail est fait. En revanche, on peut évaluer l’impact et les résultats de ce travail. Nous passons donc de la notion de gestion de la présence à la gestion des résultats. Dans ce contexte, le rôle du gestionnaire consiste de moins en moins à dire comment faire la tâche et de plus en plus à mettre en place les conditions favorables pour que l’employé puisse effectuer son travail, tout en se sentant engagé.
Pensez-vous qu’il est aujourd’hui essentiel pour les professionnels RH d’établir un milieu de travail plus équitable et plus humain au sein des organisations?
La notion de responsabilité sociale est de plus en plus prédominante dans le marché actuel. La population est grandement sensibilisée à l’importance de ces éléments dans la société et aspire à des façons différentes de travailler, plus humaines, plus responsables. En tant qu’acteur social important, l’entreprise détient une partie non négligeable de la solution à nos grands défis environnementaux et sociaux. Les entreprises ont la responsabilité de faire vivre équité et diversité au sein de leur organisation, et la fonction RH doit rester au cœur de ces démarches.
Si la dimension stratégique de la fonction RH n'est plus à démontrer, sa capacité d'action dans l'environnement complexe et dynamique des organisations d'aujourd'hui représente-elle un défi?
Absolument. La fonction RH continuera de prendre un rôle de plus en plus stratégique dans les entreprises. Une très grande partie des enjeux d’affaires qui préoccupent les hautes directions touche le capital humain et la transformation des organisations. Il faut donc tirer profit des apprentissages de la pandémie, et plus spécifiquement sur la capacité démontrée de la fonction RH à se mettre en action et à décider sans avoir toutes les réponses, à jouer un rôle de chef d’orchestre et de catalyseur du changement au sein de l’organisation.
De quelles manières la profession RH est-elle appelé à changer dans les prochaines années?
Au-delà des compétences RH « techniques », qui demeurent une base incontournable, les professionnels RH devront mettre davantage de l'avant leurs leurs habiletés de lecture de l’environnement (interne et externe) et être à l’écoute du marché et des enjeux de société pour anticiper les principaux changements à venir. Une autre qualité recherchée sera la capacité à analyser le volume d’informations disponibles au sein de l’organisation, pour faciliter une prise de décision éclairée.