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Un investissement incontournable : miser sur la confiance pour développer des relations professionnelles durables

Dans le contexte actuel où plane l’incertitude, porter une attention particulière à la confiance en y consacrant du temps et de l’énergie peut servir à resserrer les liens et préserver le sentiment d’appartenance au sein de votre organisation.

Auteure : Ghislaine Labelle, M. Ps., CRHA, Distinction Fellow, CSP (Certified Speaking Professional) et médiatrice accréditée

Situation

Il y a plusieurs années, une cliente professionnelle me sollicite pour une brève consultation sur mon expertise relationnelle en milieu de travail. Elle est totalement désemparée face à la perte de confiance totale entre deux des associés de son entreprise. Elle m’adresse ces deux questions : est-il possible de reconstruire la confiance lorsqu’elle n’existe plus? Et si oui, comment peut-on réussir cet exploit? Voilà deux questions fort pertinentes. Cela dépend toutefois de plusieurs facteurs. Bien que ce soit difficile, dans la plupart des cas, la confiance perdue peut être restaurée. Encore faut-il que les deux personnes souhaitent participer à cet exercice. 

Cette demande a piqué ma curiosité tout au cours de mon parcours professionnel. Comment certaines situations conduisent-elles vers le doute et la méfiance? Comment les personnes en viennent-elles à retirer progressivement leur confiance dans certaines relations importantes? 

Les critères de la confiance sont-ils les mêmes pour tous?

La confiance est personnelle et subjective. Pour comprendre ce qui contribue à créer ou à perdre la confiance, il faut s’attarder à l’importance que votre interlocuteur ou votre collaborateur accorde à des valeurs, des besoins qui lui sont chers. Dans le contexte actuel de forte incertitude liée à la pandémie, supposons qu’un gestionnaire très occupé et préoccupé omet de prendre le pouls des membres de son équipe lors d’une réunion. Pour certains collègues, ce geste pourrait être perçu comme une simple distraction alors que pour d’autres, cet oubli pourrait être perçu comme un manque total d’intérêt à leur égard. Vous imaginez que pour ces derniers, la probabilité que cela affecte le degré de confiance accordée au gestionnaire sera plus élevé. Par contre, si le gestionnaire en prend conscience et s’excuse, l’effet sera rapidement renversé.

La confiance est le carburant des relations. Plus on en a, plus on va loin. Moins on en a, plus on risque de tomber en panne. On peut aussi brûler tout le carburant et ne jamais penser à refaire le plein. Dans ce cas, la panne est inévitable.

C’est aussi le moteur du développement et de la croissance des organisations. Imaginez qu’au sein d’un CA ou d’une équipe de haute direction règne la méfiance. Quelle est la viabilité de l’entreprise? Quelle est la culture de cette organisation? Comment se vivent les relations pour l’ensemble du personnel? C’est pourtant des réalités bien courantes. 

Dans le livre, Le pouvoir de la confiance, l’ingrédient essentiel de l’épanouissement et de la performance, l’auteur, Stephen M.R. Covey précise que la confiance est la compétence clé essentielle que les dirigeants doivent maîtriser dans l’économie actuelle. Selon l’auteur, ces derniers doivent être habilités à établir, accroître, accorder ou restaurer la confiance avec tous les acteurs (clients, partenaires d’affaires, investisseurs, employés ou collègues). Pour illustrer son propos, il fait référence à une analogie simple et très évocatrice. Les entreprises peuvent détenir des dividendes (capital de confiance élevé) ou ont des impôts à payer (capital de confiance faible). Dans une organisation où les impôts sont plus élevés que les dividendes, l’environnement de travail est malsain, les employés et les actionnaires sont insatisfaits, l’atmosphère de travail est politisée et le travail est inefficace. Les gens passent plus de temps à défendre leurs positions et décisions qu’à collaborer, qu’à établir des partenariats de qualité et qu’à innover.

Des gestes simples à adopter pour bâtir et maintenir la confiance 

La nécessité d’entretenir des liens de confiance auprès de l’ensemble des collaborateurs, partenaires, associés et clients est la responsabilité de tous. Stephen R. Covey (père) avait aussi présenté un concept intéressant pour parler de la confiance en référant à l’analogie du compte bancaire affectif. Plus on fait de dépôts, plus notre capital de confiance se porte bien. Plus on fait de retraits, plus le compte bancaire se vide et donc la relation de confiance va s’épuiser. 

Savoir nourrir des liens de confiance est un art. Pour vous éviter de tomber en panne sèche, je vous recommande mes tops 5 des gestes à adopter dans vos relations.

  1. Responsabilisation
    Assumer l’entière responsabilité de ses actions. La première règle du succès : nous avons l’entière responsabilité de notre vie. Tout ce qui nous arrive fait partie de nous. Cela signifie de prendre la responsabilité de ses erreurs, de ses maladresses et de s’excuser le cas échéant. Imaginez travailler avec un collaborateur qui se justifie constamment face à ses erreurs ou un rendement inacceptable et qu’il rejette la faute sur les autres. Aurez-vous tendance à lui accordé votre confiance?

  2. Respect des engagements
    Ne pas respecter ses engagements équivaut à brûler le carburant de son réservoir en faisant tourner le moteur inutilement. Tenir ses promesses et respecter ses engagements indique à l’autre qu’il peut compter sur vous. Cela participe à générer la confiance. Dans les moments difficiles ou de transition, ces gestes sont observés attentivement par les collaborateurs et les membres de votre personnel. Soyez assuré que tout manquement sera comptabilisé dans leur mémoire. Lorsque les personnes manquent à leurs promesses, les proches collaborateurs cessent d’investir dans la relation. À la longue, on se retrouve avec un déficit important. La confiance est complètement désinvestie de la relation. La relation devient boiteuse.

  3. Qualité d’écoute
    Les relations importantes méritent une qualité d’écoute. Cette écoute doit être véritable et authentique et teintée d’une réelle empathie envers votre interlocuteur. Lorsque des discussions délicates ou épineuses doivent avoir lieu, assurez-vous d’avoir une bonne écoute cette journée-là. 

  4. Posture de curiosité
    Chercher à comprendre l’autre en adoptant une posture de curiosité. Plus vous vous efforcerez de comprendre la perspective de l’autre, plus vous serez curieux de connaître ce qui le motive ou le fait vibrer, plus vous marquerez des points dans le compteur de la confiance. L’erreur que font certaines personnes est de chercher à se mettre en valeur, de s’expliquer ou de chercher à être compris lors d’un malentendu, alors qu’elles oublient d’accorder ce temps à l’autre. Le cas échéant, votre interlocuteur conclura que sa position ou ses besoins pèsent peu ou pas dans la balance. Le retrait progressif sera l’une des conséquences.

  5. Courage
    Faire preuve de courage en prenant l’initiative de tenir des conversations difficiles. Lorsque surviennent des malaises ou des malentendus, il est primordial de prendre l’initiative de les clarifier le plus tôt possible. Accumuler diverses situations où les non-dits se font de plus en plus importants mine la confiance. L’accumulation de non-dits cultive la méfiance et nuit à la relation de collaboration. Lorsque la confiance est ébranlée, la distance s’installe. Plus la distance s’accroît, plus forte sera la tendance à attribuer des intentions malveillantes à l’autre sans les avoir validées. C’est le cercle vicieux qui s’installe où chacun se sent incompris et méfiant. 

En conclusion

Dans le contexte actuel de la pandémie où plane l’incertitude, portez une attention particulière à la confiance en y consacrant du temps, de l’énergie et en prenant l’initiative d’introduire le sujet auprès de vos proches collaborateurs. C’est ce qui constitue des gestes importants pour resserrer les liens et préserver le sentiment d’appartenance au sein de votre organisation. Puisque, dans le contexte de télétravail actuel, les employés ne peuvent pas bénéficier autant des interactions informelles positives lors des pauses ou des échanges impromptus entre deux réunions, nourrir la confiance aura un impact positif sur le capital de confiance tant au plan professionnel et qu’au plan organisationnel. Un investissement incontournable.
 


Source : Revue RH, volume 23, numéro 4 ─ NOVEMBRE DÉCEMBRE 2020