ressources

Intervenir auprès des personnalités difficiles

Il existe des moyens d'intervention dans le cas de comportements problématiques. Tout en évitant de se substituer au psychologue, il est possible d'adopter des tactiques pour des relations plus constructives.
9 novembre 2023
Mathieu Guénette, CRHA

Des études démontrent une hausse des difficultés liées à la santé mentale. Lorsqu’une personne est tendue, elle en vient à recourir à davantage de mécanismes de défense, ce qui l’amène à vouloir se protéger de ce qu’elle perçoit comme des menaces, mais pas toujours de manière consciente et adroite.

Devant composer avec une telle réalité, il est essentiel que les gestionnaires et les professionnels en ressources humaines s’outillent davantage concernant les personnalités difficiles et les dynamiques engendrées.

C’est un enjeu particulièrement délicat, car un professionnel en ressources humaines ou un gestionnaire ne doit pas émettre un diagnostic comme le ferait un psychiatre et il doit éviter de se substituer au psychologue. Oui, il est important de nous montrer empathiques, mais à l’intérieur d’un cadre bien délimité.

Voici des pistes pour aider les ressources humaines à bien définir un champ de travail.

Savoir bien définir la difficulté

Nous ne voulons pas établir un diagnostic de santé mentale ni chercher à apposer cette étiquette « d’employé difficile ». Nous risquons ainsi de créer un préjudice. Il y a souvent des erreurs d’interprétation, car nous sommes nous-mêmes concernés dans la situation et avons certains biais.

Nous pouvons plutôt nous pencher sur les comportements et les attitudes problématiques à l’aide d’exemples liés à une situation de travail. Ce que nous qualifions n’est pas la personne, mais sa manière d’agir. Nous laissons ainsi l’occasion à la personne de changer son attitude, si elle souhaite investir certains efforts.

Voici une grille d’analyse pour aider notre interprétation.

  • Perception erronée (interprétation loin de la réalité, projection)
  • Difficulté à gérer les émotions (colère, tristesse, anxiété)
  • Relations problématiques (méfiance, dépendance, évitement)
  • Réactions impulsives (violence, sexualité)

Nous pouvons aussi en déterminer l’intensité en fonction du problème observé (gravité, fréquence, manque de prise de conscience, etc.). Il peut s’agir d’une échelle de 1 à 10 ou encore un code de couleur (rouge, jaune, vert).

Cela permet de définir à quel point les comportements peuvent être tolérés et s’il y a espoir d’une certaine amélioration auprès de cette personne grâce à un encadrement et du coaching.

Définir des objectifs

Une fois que nous avons un portrait du problème, nous pouvons établir un objectif réaliste lié à la situation. Que pouvons-nous espérer en matière de changement et qui nous apparaîtrait acceptable?

Cet objectif comporte plusieurs volets :

  1. Comment avons-nous envie nous-mêmes d’agir?
  2. Quelle relation voulons-nous établir avec cette personne?
  3. Que souhaitons-nous concernant ses relations avec les autres (collègues, employés, clientèle)?
  4. Qu’attendons-nous concernant le rendement au travail?

Cet objectif pourrait faire l’objet d’une stratégie en se basant sur les éléments favorables au changement et les obstacles à éviter.

Par exemple, cette personne est motivée au travail et veut progresser. Elle est susceptible de fournir des efforts pour s’améliorer. Cela représente un élément favorable. Toutefois, elle est impulsive et elle a tendance à mal prendre la critique, ce qui constitue un obstacle à tenir compte.

Recourir à des tactiques

Bien que notre rôle en ressources humaines ne fait pas de nous des intervenants en relation d’aide par, nous avons plusieurs occasions d’intervenir soit pour tenter de résoudre le problème ou du moins, trouver des façons d’éviter de provoquer inutilement des réactions.

Le premier point est qu’une personnalité difficile réagit à des déclencheurs que nous pouvons appeler « situation gâchette ». Par exemple, une personne particulièrement méfiante risque de mal réagir à l’humour. Éviter l’humour avec elle pourrait s’avérer une piste.

Ensuite, nous pouvons recenser des moyens d’aborder une connexion avec les différentes personnes concernées menant à des échanges constructifs. Il est important de créer un climat peu menaçant et où chacun se sent pleinement reconnu favorisant des rapports plus authentiques.

Un exemple de tactique serait de dépersonnaliser notre rôle. Nous faisons une distinction claire entre la personne que nous sommes et le rôle que nous avons à jouer auprès d’elle. Le sentiment de jugement sera moins grand et nous pourrons appliquer les mesures auxquelles nous devrons recourir.

Bien entendu, il est recommandé que l’organisation se dote d’une politique claire en matière de civilité appuyée par des exemples concrets. Cette politique pourra servir d’appui dans certaines de nos interventions.

En conclusion, les personnalités difficiles demeurent un défi constant et il est important d’aborder proactivement ces obstacles.

Allez plus loin avec un CRHA

Les conseillers en ressources humaines agréés (CRHA) peuvent jouer un rôle-conseil important dans la gestion des employés difficiles. Tout d'abord, ils travaillent en étroite collaboration avec les gestionnaires pour les sensibiliser à l'importance de la santé mentale en milieu de travail et promouvoir des politiques et des pratiques qui favorisent le bien-être psychologique des employés.

Ensuite, les CRHA jouent un rôle clé dans la gestion des employés aux prises avec des problèmes de santé mentale. Ils fournissent un soutien professionnel aux gestionnaires pour les aider à aborder ces défis de manière constructive. Cela peut inclure la formation des gestionnaires sur la manière de mener des conversations délicates, de reconnaître les signes de détresse psychologique chez les employés et de mettre en œuvre des mesures d'accommodement raisonnable pour les aider à surmonter leurs difficultés.

Enfin, les CRHA contribuent à la création d'une culture d'entreprise qui valorise la santé psychologique et encourage la communication ouverte. Ils aident à mettre en place des programmes de sensibilisation et de prévention, tout en étant une ressource précieuse pour les employés qui cherchent de l'aide. En somme, les CRHA sont des acteurs clés notamment dans la promotion de la santé au travail et dans la gestion efficace des employés rencontrant ces difficultés, contribuant ainsi à un environnement de travail sain et productif.


Author
Mathieu Guénette, CRHA Travailleur autonome Mathieu Guénette
Mathieu s'intéresse à la dotation et au développement des compétences en concevant avec son équipe passionnée des outils d'évaluation et d’intervention misant sur l'innovation et les enjeux humains. Il est chargé de cours à HEC Montréal depuis 2010. Auteur des ouvrages Déjouer les attitudes kamikazes en recherche d'emploi et Orientation et confidences, il est parti en voyage autour du monde avec sa famille, pendant toute l’année 2012.