Dans un article publié[1] par l’Ordre des CRHA lors de la semaine de la santé mentale, on apprenait que « la proportion d’adultes québécois ayant un score de détresse psychologique « problématique » était passée d’un sommet de 17 % en décembre 2020 à 9 % en mars 2023 ».
Également, d’après les résultats d’une toute récente enquête menée par la Chaire de recherche Relief en santé mentale, autogestion et travail (Université Laval), 49 % des employés de PME au Canada vivraient avec au moins une difficulté de santé mentale ou de dépendance autorapportée. Il s’agirait d’une légère baisse comparativement à la première édition de l’enquête réalisée l’an dernier (55 %)[2].
Or, malgré ces améliorations notables et fort encourageantes, l’article de l’Ordre citait également des statistiques publiées par le rapport de Deloitte Insights, révélant que d’ici 2041, les projections suggèrent que le coût lié aux enjeux de santé mentale pour l’économie canadienne s’élèverait à 2,5 billions de dollars alors qu’il « n’est que » de 51 milliards de dollars par année présentement.
On ne peut donc pas dire que nous sommes sortis de l’auberge, bien au contraire.
Cependant, la pandémie nous a peut-être offert, sans le vouloir, une voie de réflexion importante en matière de prévention de la santé mentale au travail. En effet, une partie des pics observés pendant la pandémie a été attribuée aux sentiments de solitude et d’isolement ressentis pendant cette période. Ce constat n’est guère surprenant, considérant les travaux intéressants du professeur Jacques Forest de l’ESG de l’UQAM. Ses recherches mettent en évidence l’influence majeure que l’environnement de travail peut avoir sur la motivation et le bien-être des employés lorsqu’il satisfait adéquatement les trois besoins fondamentaux de l’être humain : l’autonomie, la compétence et le sentiment d’appartenance.
Favoriser la bienveillance au travail, une piste encourageante
Le dictionnaire Le Robert définit la bienveillance comme « une prédisposition favorable envers quelqu’un ». Or, il est largement reconnu que le réseau de soutien, qu’il soit réel ou perçu, joue un rôle déterminant dans la capacité d’un individu à faire face aux enjeux de santé mentale, que ce soit dans une optique préventive ou curative. Par conséquent, si les employés pouvaient percevoir que leurs collègues, pairs, collaborateurs, gestionnaires, etc., manifestent tous une « prédisposition favorable envers lui », pourrait-on légitimement envisager que cela contribuerait de manière considérable à réduire les enjeux de santé mentale au sein de la population active?
Également, plusieurs défis liés à l’équité, la diversité et à l’inclusion en milieu de travail sont liés au fait que les personnes concernées par ces enjeux ne perçoivent pas nécessairement une attitude de bienveillance des autres à leur égard. Cette notion de bienveillance apparaît donc comme une piste importante à explorer en matière de stratégie de gestion des ressources humaines.
Or, faire émerger cette perception de bienveillance autour de soi n’est pas quelque chose qui se crée sans effort. En fait, les réflexions de Patrick Lencioni[3] sur les qualités essentielles d’une équipe solide suggèrent que cette bienveillance perçue et vécue peut prendre forme lorsque la confiance relationnelle est présente et s’entretient dans son milieu de travail.
Miser sur la confiance relationnelle pour faire émerger la bienveillance
Il devient donc impératif d’instaurer des stratégies en entreprise visant à renforcer la confiance relationnelle et la bienveillance. Comment y parvenir? Voici quelques idées simples que toute organisation, quelle que soit sa taille, pourrait mettre en œuvre par l’entremise de ses dirigeants et gestionnaires :
- Encourager une posture d’humilité et de vulnérabilité. Ce sont là des façons d’être qui, malgré les croyances, démontrent un degré de courage beaucoup plus important que faire l’inverse. Les gestionnaires ont donc avantage à être plus transparents quand ça va bien et quand ça va moins bien.
- Aider les employés à apprendre à mieux se connaître entre eux. Lors d’activités sociales ou de moments plus informels, assurez-vous que les discussions ne portent pas seulement sur les activités du week-end, ou la dernière série télé du jour. Encouragez les employés à échanger sur des choses qui leur permettront vraiment d’en apprendre plus sur leurs collègues, telles que :
- Leur fratrie
- Le ou les petits boulots cocasses qu’ils ont pu avoir par le passé
- Leurs valeurs et pourquoi elles sont si importantes pour eux
- Des défis de vie qu’ils ont vécus
- Des particularités de leur jeunesse
- Cultiver le droit à l’erreur. L’idée n’est pas d’encourager les erreurs, et surtout celles qui sont répétitives, bien évidemment, mais de laisser de l’espace à cette possibilité d’erreur qui est bien humaine. Il faut plutôt en profiter pour l’analyser et la communiquer afin de permettre à d’autres employés d‘apprendre des erreurs de leurs collègues.
- Revoir les priorités. Dans de nombreuses organisations, la liste de priorités est souvent trop longue par rapport aux ressources disponibles. Cette pression impossible à surmonter n’est pas un exemple de bienveillance de l’organisation à l’égard de ses employés.
Bien sûr, ce ne sont là que quelques exemples de stratégies, mais qui en se démultipliant pourront contribuer à ce que le réseau de soutien bienveillant perçu par les employés sera bien meilleur en quantité et en qualité. Leur santé mentale ne s’en portera que mieux!
Allez plus loin avec un CRHA
Un conseiller en ressources humaines agréé (CRHA) peut jouer un rôle essentiel dans l'amélioration de la notion de bienveillance et dans l'accompagnement des dirigeants et gestionnaires de PME dans l'instauration d'une culture de bienveillance au sein de leur organisation. Un CRHA peut réaliser une évaluation approfondie de la culture d'entreprise existante et recenser les zones nécessitant des améliorations en matière de bienveillance. Un CRHA collaborera avec la direction pour élaborer des politiques et des pratiques qui favorisent la bienveillance. Il pourra suggérer la mise en place de programmes ayant des effets directs sur la mobilisation des employés et mettre en place des mécanismes pour mesurer l'efficacité des initiatives de bienveillance et adapter les stratégies en fonction des besoins changeants de l'organisation. En travaillant de manière proactive avec les dirigeants et gestionnaires, le CRHA peut jouer un rôle central dans la transformation de la culture de l'entreprise pour qu'elle soit plus bienveillante, ce qui peut avoir une influence positive sur la santé mentale des employés et la réussite globale de l'organisation.
- https://carrefourrh.org/ressources/dossiers-speciaux/semaine-sante-mentale/2023/04/semaine-de-la-sante-mentale-2022-etat-des-lieux
- https://www.cpq.qc.ca/publications/sante-mentale-lapres-pandemie-et-la-nouvelle-organisation-du-travail-posent-encore-des-defis-pour-les-pme-et-leurs-employes/
- Lencioni, P. (2005). Optimisez votre équipe. Brossard, Canada : Les Éditions Un Monde Différent.