La gestion de la performance connaît un regain d’intérêt dans les organisations, mais ce retour en force ne s’appuie plus sur les modèles traditionnels. Dans un monde du travail en profonde transformation, marqué par l’incertitude et l’accélération du changement, les approches classiques, souvent perçues comme rigides et peu porteuses de valeur, ne répondent plus aux besoins actuels des entreprises. Le renouveau pour la gestion de la performance s’explique notamment par l’évolution des attentes des membres du personnel. Ces derniers souhaitent comprendre la portée réelle de leur contribution, recevoir une rétroaction fréquente et constructive de leur gestionnaire, et avoir accès à des possibilités concrètes de perfectionnement.
Dans ce contexte, les programmes de gestion de la performance doivent s’adapter. La manière dont la performance est définie, suivie et soutenue doit être repensée. Les programmes doivent désormais être plus agiles et alignés sur les réalités changeantes du travail.
Au cœur de ces nouvelles approches, la rétroaction en continu s’impose comme un pilier essentiel d’une gestion de la performance efficace et engageante. Elle permet de créer des occasions de dialogue plus fréquentes entre le gestionnaire et l’employé, permettant l’ajustement des objectifs, le développement des compétences et la reconnaissance des contributions.
Le principe de la rétroaction repose sur l’idée que les tiers sont souvent plus aptes à cibler les angles morts ou les axes d’amélioration que le destinataire de cette même rétroaction. La rétroaction en continu, quant à elle, désigne une pratique selon laquelle les échanges entre les gestionnaires et le personnel ne sont plus limités à une ou deux rencontres formelles, mais s’inscrivent davantage dans une série de conversations régulières. En d’autres mots, « en continu » signifie ici le passage d’un système figé à une approche dynamique.
Pourquoi la rétroaction en continu?
Le principal avantage de la rétroaction en continu est qu’elle permet une correction de trajectoire en temps réel. Pour un employé qui reçoit de la rétroaction six mois après avoir manqué un objectif, l’occasion d’apprendre et de s’adapter est souvent perdue. En instaurant des échanges réguliers, les organisations favorisent l’apprentissage, l’agilité et l’engagement, et évitent les surprises en fin d’année. De plus, pour le personnel, cette approche répond à un besoin croissant de reconnaissance et de perfectionnement.
La rétroaction en continu : un pilier des programmes repensés
La rétroaction en continu ne remet pas en question les rencontres de mi-année et de fin d’année : elle les complète et les renforce. Comme elle peut être intégrée au processus standard de gestion de la performance, elle permet, dès le début de l’année, de clarifier les attentes et d’encourager l’adoption des comportements souhaités. Tout au long du cycle, elle offre un accompagnement régulier qui facilite la détermination des axes d’amélioration et leur traitement en temps opportun. Au bout du compte, en fin d’année, elle soutient la rencontre formelle en éliminant les surprises, puisque les faits et les comportements ont déjà été abordés de manière proactive et constructive.
Le rôle du gestionnaire et le soutien stratégique des RH
La rétroaction en continu repose sur une compétence clé, soit savoir donner de la rétroaction de manière efficace. Il ne s’agit plus seulement d’évaluer, mais d’accompagner, de reconnaître et de faire évoluer les compétences du personnel, et ce, dans une logique de contribution durable au succès de l’entreprise. Les gestionnaires peuvent être déstabilisés par cette pratique ou l’appréhender par peur de heurter, de démotiver, de créer des conflits, ou simplement par manque de temps. C’est principalement sur ce plan que les professionnels en ressources humaines peuvent jouer un rôle stratégique. Ils doivent soutenir les gestionnaires en les sensibilisant à l’importance de la rétroaction, en leur fournissant des outils concrets et en leur offrant des formations adaptées, y compris des mises en situation réalistes et pratiques.
De la rétroaction (ou « feedback ») à la proaction (ou « feedforward »)
Dans le cadre de la rétroaction, il est essentiel de ne pas se limiter à corriger les écarts ou à pointer les erreurs. En effet, bien que le feedback puisse parfois être perçu comme un reproche ou une remise en question d’actions passées, l’un de ses objectifs fondamentaux demeure l’amélioration et le perfectionnement, soit deux concepts orientés vers le progrès et l’avenir. C’est dans cette perspective que le concept de feedforward prend tout son sens. Vous l’avez probablement déjà utilisé sans nécessairement le nommer ainsi. Le feedforward propose de remplacer la rétroaction positive ou constructive par des solutions orientées vers l’avenir. Au lieu de souligner les lacunes passées d’un employé, on lui propose des suggestions, des recommandations et des encouragements afin de mieux gérer les situations futures.
Vers une culture de rétroaction
Pour que les pratiques de rétroaction en continu deviennent un véritable levier de performance et de perfectionnement, elles doivent s’inscrire durablement dans la culture organisationnelle et être portées collectivement. Cela implique de créer un climat de confiance, d’encourager l’authenticité, de former tant les gestionnaires que le personnel à donner et à recevoir une rétroaction constructive, et d’intégrer ces pratiques dans le quotidien du travail. Une telle transformation ne s’improvise pas : elle exige une planification rigoureuse, un engagement clair de la haute direction et une volonté partagée de faire de la rétroaction un pilier stratégique de performance organisationnelle.