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Gouverner en connaissance de cause

Prendre part à un conseil d’administration est avant tout une affaire de cœur pour Daniel H. Lanteigne, CRHA. C’est aussi une question d’expertise, alors que les professionnels en ressources humaines ont beaucoup à offrir aux organisations de tous horizons.
10 mars 2023
37e AVENUE

Voilà cinq ans que le consultant principal chez BNP Performance philanthropique siège à des conseils d’administration. Après un passage à celui de la TÉLUQ, il a rallié en 2017 le conseil de l’Association des professionnels en philanthropie (AFP), qu’il préside depuis 2021.

Ces expériences lui ont démontré que très peu d’autres membres de conseils d’administration ont un bagage semblable au sien. « Il y a beaucoup d’avocats et de comptables dans les CA, et les professionnels en ressources humaines sont encore sous-représentés », constate-t-il, rappelant que la main-d’œuvre représente pourtant un poste budgétaire important au sein des organisations. « Il y a cette idée préconçue que les ressources humaines ne concernent que la direction et que la gouvernance n’a pas à s’en préoccuper. »

Une spécialisation en RH constitue pourtant un atout de taille, croit Daniel H. Lanteigne, puisqu’elle offre un regard neuf sur divers enjeux de gouvernance. « Les humains sont au cœur de notre industrie. S’impliquer dans un conseil d’administration, ce n’est ni tomber dans la microgestion de l’organisation ni évaluer les employés : c’est arrimer la stratégie de l’organisation avec la réalité du marché et les autres expériences présentes au conseil, estime le consultant, qui parle d’ailleurs de sagesse. Comme administrateur, on doit souvent prendre des décisions tout en ayant peu d’informations et en respectant nos devoirs et obligations légales. Comme professionnel des ressources humaines, on peut ajouter aux échanges, avec humilité, et en respectant les compétences de chacun, pour s’assurer qu’on couvre les angles morts dans le processus décisionnel. »

Développer son agilité

La pénurie de main-d’œuvre actuelle montre le rôle primordial que peuvent jouer les CRHA en matière de gouvernance. « On peut partager notre expertise pour attirer et retenir le personnel, y compris les postes clés et la direction, également courtisés par d’autres employeurs », explique Daniel H. Lanteigne.

Le lot d’incertitudes liées à la pandémie a mis en lumière une certaine rigidité propre au conseil d’administration : les professionnels et professionnelles des ressources humaines peuvent amener les membres à faire preuve de plus de flexibilité. « Beaucoup de conseils d’administration se collent coûte que coûte à leur planification stratégique, relève le CRHA. Or, on l’a bien vu avec la pandémie, tout peut changer du jour au lendemain. Comme administrateurs, on doit travailler notre agilité dans un contexte où tout évolue rapidement. » Cette quête de souplesse doit cependant demeurer stratégique et cohérente avec la réalité de l’organisation : « Il ne faut pas se mettre à pelleter des nuages. »

Faire le saut

Aux néophytes à qui l’idée de se joindre à un conseil d’administration tente, Daniel H. Lanteigne propose de s’y initier par le biais d’une cause qui leur tient à cœur. « L’idée, c’est de s’impliquer, pas de simplement ajouter une ligne à son CV, explique-t-il. Personnellement, j’ai commencé à siéger au conseil d’administration de l’AFP pour redonner à ce secteur qui m’a énormément apporté tout au long de ma carrière. »

Sa récente nomination au conseil d’Ingenium, un regroupement de trois musées situés dans la capitale fédérale, rejoint pour sa part son intérêt pour les arts, la culture, la science et l’innovation, en plus de lui offrir un rôle de conseiller plus stratégique.

Surtout, recommande-t-il, il faut se renseigner sur l’organisme avant d’accepter un mandat. « Être approché par une société, c’est flatteur. Mais si je décide d’en devenir administrateur, c’est mon devoir de veiller à ce qu’elle soit bien gérée, que ses finances vont bien, qu’elle ne fait pas face à d’importants problèmes de gouvernance », dit-il. Il faut aussi savoir ce qu’on attend de nous, s’assurer de pouvoir respecter ses engagements et que la tâche correspond à ce qu’on a envie de donner. 

Certains engagements, particulièrement dans des conseils d’OBNL, ne seront pas rémunérés et demanderont plus de temps. « Mais c’est peut-être l’expérience qui te permettra de trouver ta valeur, ta confiance, et de découvrir quel type d’administrateur tu es », précise Daniel H. Lanteigne, qui suggère vivement de suivre une formation en gouvernance.

La responsabilité qui surpasse les autres pour un bon administrateur ou une bonne administratrice est de savoir quand le temps est venu de tirer sa révérence. « Si on sent que la motivation est moins là ou qu’on n’apporte plus autant de valeur à la table, c’est sage de céder notre siège à quelqu’un qui sera plus profitable à la cause », dit-il.


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