Plus souvent, le télétravail est effectué de manière ponctuelle, sans cadre particulier, suivant les besoins d’un projet ou d’un échéancier.
La ou le gestionnaire RH pourrait toutefois découvrir des avantages à définir les situations de télétravail à privilégier, les balises juridiques applicables ainsi que les étapes à prévoir dans l’implantation d’un programme de télétravail et son application pour favoriser la plus grande satisfaction de toutes les parties, soit les employés, les gestionnaires et la clientèle.
Notion de télétravail
On comprend que le télétravail suppose l’utilisation par une personne employée des technologies de l’information afin de fournir sa prestation de travail à l’extérieur des lieux habituels de son emploi.
Toutefois, le télétravail n’existe que dans la mesure où il ne s’agit pas d’un mode ponctuel de fonctionnement.
Dans la même optique, une personne n’effectue pas du télétravail pour une organisation si elle est travailleuse autonome ou pigiste, sans relation employeur-employé.
Le contrat d’une télétravailleuse ou d’un télétravailleur sera assujetti aux normes régissant tout autre contrat de travail suivant les dispositions du Code civil du Québec, la Loi sur les normes du travail, la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles ainsi que la Charte des droits et libertés de la personne et les autres dispositions d’ordre public visant la protection de la santé et de la sécurité des travailleuses et des travailleurs.
Les lois du travail ne prévoient pas spécifiquement la situation de télétravail et dès lors, les dispositions générales concernant la prestation de travail, le lien de subordination, le calcul d’heures supplémentaires, les congés, les vacances et les absences, la prévention du harcèlement psychologique et toute autre norme délimitant les droits respectifs des employés et de leur employeur vont s’appliquer, à moins que le contrat de travail de la personne concernée ne soit plus généreux.
Planification de l’implantation d’un programme de télétravail
La ou le gestionnaire RH qui souhaite expérimenter le télétravail dans son organisation devrait tirer profit d’une implantation graduelle, que ce soit par catégorie de postes, par projet, par service ou par direction.
Le télétravail n’apporte pas que des avantages et peut au contraire comporter des inconvénients tels que les risques d’atteinte à la confidentialité des données et des secrets commerciaux de l’employeur, l’isolement d’une employée ou d’un employé, une diminution de l’encadrement possible par la ou le gestionnaire ou une diminution de la délimitation à préserver entre les espaces de vie professionnelle et personnelle.
Avant de déterminer le contenu ou la portée d’un programme de télétravail, la ou le gestionnaire RH pourra considérer différents aspects afin de délimiter son champ d’action :
- Programme visant certains postes ou la totalité de ceux-ci, dans un service ou une direction ou simplement sur demande;
- Projet pilote pour un contrat particulier ou un service précis de l’organisation;
- Nouvelle description de poste à envisager;
- Révision du mode de sélection des employés ou du profil recherché (p. ex., qualités ou aptitudes plus déterminantes en mode télétravail);
- Modification du mode de supervision (p. ex, rôle accru de coach pour la supérieure immédiate ou le supérieur immédiat et la ou le gestionnaire);
- Mise à jour de toutes les politiques pour prévoir les situations de télétravail;
- Existence d’espaces de travail communs disponibles ou à implanter à l’intention des télétravailleurs à temps partiel ou devant être présents ponctuellement ou régulièrement au bureau et favorisant les interactions avec les collègues de l’équipe.
Politique RH concernant le télétravail
L’implantation d’un programme de télétravail requiert la préparation, l’adoption, la présentation ainsi que la diffusion d’une politique claire et complète sur le sujet.
Cette politique pourra notamment prévoir l’un ou l’autre des éléments suivants :
- Nécessité de l’accord préalable de la supérieure immédiate ou du supérieur immédiat ou du service afin qu’une personne puisse effectuer du télétravail;
- Identification de la méthode de travail privilégiée ainsi que des modes de communication encouragés;
- Mode de contrôle de la prestation de travail;
- Outils informatiques et autres équipements fournis par l’employeur (p. ex., équipements à jour et sécuritaires ainsi qu’accès au réseau de l’organisation);
- Règles de gestion des documents et des données appartenant à l’organisation;
- Politiques RH de l’organisation applicables;
- Accessibilité à des moyens variés de communication, non limités aux courriels : blogue, groupe ou forum de discussions, site intranet, visioconférence, etc.
Moyens à favoriser par la télétravailleuse ou le télétravailleur
La télétravailleuse ou le télétravailleur devra adopter certains comportements ou certaines pratiques pour assurer une prestation de travail répondant aux attentes de son employeur. À titre d’exemple :
- Informer régulièrement l’employeur de la progression de ses travaux et transmettre ses rapports ou résultats aux échéances convenues;
- Au besoin, proposer de nouveaux objectifs ou la révision des échéances de concert avec l’employeur et les collègues concernés;
- Demeurer en interaction avec l’organisation par des demandes de suggestions, des appels à tous, des propositions d’aide ou des réponses aux questions des collègues;
- Participer aux activités de groupe, qu’elles soient virtuelles ou fixées aux bureaux de l’organisation.
Le contenu d’une entente écrite de télétravail
Même si une entente de télétravail constitue un contrat de travail tel que généralement défini dans nos organisations, certains éléments particuliers auraient avantage à être précisés :
- Identification d’attentes claires quant au travail à effectuer, le temps à y consacrer par cycle ou période ainsi que les objectifs (résultats et échéances);
- Définir les suivis à prévoir quant au travail et au besoin, modifier ou ajuster les attentes et les objectifs;
- Déterminer les modes et les fréquences des autres rencontres et communications que la personne doit respecter ou connaître (p. ex., rencontres statutaires et ponctuelles, communiqués et renseignements réguliers sur des développements, nouvelles et autres sujets concernant l’organisation);
- Fixation du lieu de travail au domicile de la télétravailleuse ou du télétravailleur (le cas échéant), comprenant ou non la nécessité d’une salle de rendez-vous, d’une salle de réunion ou d’une salle de bain dans l’éventualité où la personne reçoit des clients ou des fournisseurs;
- Acceptation par l’employée ou l’employé des visites de représentants de l’employeur pour la confirmation initiale d’une installation sécuritaire et assurer les mises à jour ou des inspections SST;
- Confirmation du mode de signalement en cas d’accident ou de blessure;
- Responsabilités de l’achat et de l’entretien des équipements et du matériel ainsi que du paiement des coûts inhérents (p. ex., appareils électroniques, électricité, lignes téléphoniques, accès Internet, frais de déplacement, assurances commerciales selon la nature des activités de télétravail à domicile, etc.);
- Plages de disponibilité requises, fixes ou flexibles, pour des communications à l’initiative de l’employeur;
- Encadrement de la télétravailleuse ou du télétravailleur : fréquence des supervisions, objectifs, évaluations de rendement, formations, etc.;
- Obligation de respecter les politiques de l’employeur : autorisation d’heures supplémentaires, aménagement de l’espace de travail, confidentialité et protection des données, conservation des documents, utilisation des équipements informatiques, etc.;
- Soutien technique offert à la télétravailleuse ou au télétravailleur;
- Vérification de la conformité des activités de la télétravailleuse ou du télétravailleur par rapport aux règlements de zonage et possibles règlements de copropriété;
- Modalités de terminaison du contrat de télétravail à l’initiative de l’une ou de l’autre des parties.
Perspectives à moyen terme et réflexions
Une personne employée peut décider d’opter pour le télétravail, que ce soit à temps partiel ou à temps plein, pour une période prédéterminée ou sans terme.
Des ententes de télétravail peuvent également intervenir à l’occasion d’un projet particulier qui suppose une date de fin et dès lors, un retour de la personne dans les installations de son employeur.
Quel que soit le scénario, il demeure prudent de prévoir comment l’une des deux parties (télétravailleuse/télétravailleur ou employeur) peut choisir de mettre fin à l’entente de télétravail, et ce, par un préavis préétabli, tout en précisant les conditions auxquelles la personne pourra revenir au travail dans les installations de l’employeur et en maintenant ses droits et son obligation de fournir sa prestation de travail.
Il est généralement reconnu que le télétravail peut constituer une formule gagnante et positive pour les deux parties selon les circonstances et par exemple, lorsqu’une personne avec une expertise pointue ou plus rare peut ainsi se joindre à l’équipe sans avoir à se déplacer ou à déménager dans la localité de son employeur. Celui-ci peut ainsi avoir accès à des talents dont il ne pourrait profiter autrement.
Suivant les situations personnelles vécues par un membre du personnel ou la nécessité d’un projet spécial ou d’une demande ponctuelle provenant d’un client, le télétravail peut donc apparaître comme la meilleure formule, mais sans nécessairement pouvoir et devoir perdurer.
Les parties liées par une entente de télétravail doivent pouvoir réviser leurs plans et mettre fin à cette entente suivant l’évolution de la situation.
En cours d’entente, il est également essentiel que les parties puissent ajuster les conditions et les modalités, les attentes, les objectifs et les échéances de sorte que le modèle du télétravail demeure favorable, souple et efficace, pour la plus grande satisfaction des personnes salariées, des gestionnaires et de l’organisation.