Dans un environnement de travail en mutation, les données organisationnelles s’imposent comme un levier stratégique pour assurer le bien-être des employées et employés. Charles-Antoine Villeneuve et Rosalie Croteau, spécialistes chez HUB International Québec, nous expliquent comment ces données permettent aux RH d’adopter des stratégies de santé adaptées et percutantes.
Le défi des professionnelles et professionnels RH concernant la santé du personnel
Dans les entreprises d’aujourd’hui, la gestion du bien-être est au cœur des préoccupations des spécialistes des ressources humaines. Avec l’accroissement des problèmes de santé mentale, l’augmentation des absences prolongées et la montée en flèche des coûts liés aux soins, la gestion de la santé des employées et employés devient un enjeu clé pour les organisations. « On ne peut plus parler de ressources humaines sans parler de santé et de bien-être », affirme Charles-Antoine Villeneuve, vice-président principal chez HUB International Québec.
Les RH doivent jongler avec de nombreuses priorités : garantir un environnement de travail sain, fidéliser les talents, stimuler l’engagement et la productivité, tout cela en respectant des budgets souvent serrés. « Les données nous aident à prendre des décisions éclairées et à repérer les zones où des améliorations sont nécessaires, tout en respectant les contraintes financières des entreprises », ajoute Charles-Antoine Villeneuve.
Dans ce contexte, les RH doivent aussi faire face à de nouvelles attentes de la part des employées et employés, notamment en matière de santé mentale et de flexibilité. La pandémie de COVID-19 a exacerbé ces demandes, rendant encore plus cruciale pour les entreprises la mise en place de politiques de bien-être adaptées aux besoins des personnes qu’elles emploient.
L’importance des données organisationnelles pour une prise de décision éclairée
L’utilisation des données en entreprise est désormais incontournable pour élaborer des stratégies de bien-être adaptées. Rosalie Croteau, vice-présidente associée, santé et performance chez HUB International Québec, explique : « Les données sont un outil puissant pour comprendre les tendances au sein de l’entreprise. Elles permettent de recenser autant des risques que des occasions. » Elle souligne que les données qualitatives, telles que les sondages d’engagement ou de satisfaction, sont aussi précieuses que les données quantitatives liées aux coûts d’invalidité ou à l’utilisation des programmes d’aide aux employés.
Par exemple, une analyse des données sur les absences peut révéler des motifs récurrents relativement aux départs en congé maladie, qu’ils soient liés à des troubles musculosquelettiques ou à des problèmes de santé mentale. « Nos analyses montrent une augmentation des invalidités liées à la santé mentale. Ces signaux d’alerte doivent pousser les organisations à renforcer leurs actions de prévention et de soutien en santé mentale », ajoute Rosalie Croteau.
L’exploitation des données donne également la possibilité aux entreprises de comparer leurs résultats avec ceux de leurs concurrents ou d’autres secteurs d’activité. En repérant des tendances communes ou des écarts, les RH peuvent adapter leurs programmes et prendre des décisions plus pertinentes. « Il est essentiel de comprendre que les données ne doivent pas uniquement servir à mesurer les coûts, mais aussi à évaluer l’efficacité des programmes en place », insiste Charles-Antoine Villeneuve.
L’intelligence artificielle : une précieuse alliée pour les RH
L’intelligence artificielle (IA) est devenue un atout de taille pour les professionnelles et professionnels des ressources humaines. En automatisant l’analyse des données, elle contribue à une meilleure compréhension des besoins du personnel. « L’IA nous aide à analyser les données en temps réel, à définir des schémas et à prédire des tendances », explique Charles-Antoine Villeneuve. Cela donne aux entreprises des moyens d’être plus réactives et de proposer des actions concrètes pour améliorer le bien-être.
L’IA facilite également l’analyse de grandes quantités de données, qu’il s’agisse de données démographiques, de résultats de sondages ou de statistiques d’absences. Grâce à ces analyses, les RH peuvent déterminer les causes sous-jacentes des problèmes de santé au travail et moduler les programmes de manière proactive. Par exemple, si une entreprise constate une augmentation des absences pour cause de stress, elle pourra décider de mettre en place des formations sur la gestion du stress ou d’offrir un soutien psychologique aux personnes en difficulté.
Charles-Antoine Villeneuve met cependant en garde contre une dépendance excessive à ces technologies. « L’IA ne remplacera jamais l’humain. Ce sont les RH qui, en fin de compte, connaissent le mieux les besoins des employés et qui peuvent adapter les programmes en conséquence », précise-t-il. En effet, si l’IA est un outil puissant, son efficacité repose avant tout sur la capacité des spécialistes à interpréter les données et à agir stratégiquement.
Stratégies de bien-être : trouver des solutions dont tout le monde bénéficie
L’un des plus grands défis que les RH doivent surmonter aujourd’hui est de concevoir des programmes de bien-être qui répondent aux besoins diversifiés des employées et employés sans pour autant créer des régimes distincts. Selon Rosalie Croteau, « il ne s’agit pas d’offrir des solutions différentes à chaque personne, mais de développer des stratégies qui répondent à un maximum de besoins ».
Elle explique que cela nécessite une compréhension fine des attentes des différentes générations au sein de l’entreprise. Par exemple, la jeune génération peut rechercher davantage de flexibilité et d’autonomie au travail, tandis que la génération précédente sera plus préoccupée par la sécurité financière et les avantages sociaux. « Il faut donc trouver des solutions qui soient suffisamment flexibles pour satisfaire ces divers groupes sans pour autant segmenter les offres », précise-t-elle.
Un bon exemple de cette approche est l’offre d’avantages modulables, qui donne aux employées et employés la possibilité e choisir les prestations qui répondent le mieux à leurs besoins, tout en maintenant une structure cohérente pour l’ensemble de l’organisation. Cela permet de répondre aux attentes de chacun sans créer de disparités ou de frustrations au sein des équipes.
L’avenir des RH éclairé par les données
L’utilisation des données organisationnelles ne se limite pas à l’optimisation des coûts ou à l’anticipation des absences. Ces informations permettent également aux entreprises de se différencier et d’attirer des talents en offrant un cadre de travail sain et engageant. « Les employés choisissent désormais leur entreprise en fonction des programmes de bien-être offerts. C’est devenu un facteur clé dans l’attractivité d’une organisation », soutient Charles-Antoine Villeneuve.
Les entreprises qui intègrent ces stratégies de bien-être dans leurs valeurs et leur culture organisationnelle ont ainsi un avantage concurrentiel. Les données peuvent non seulement mesurer l’effet des programmes, mais aussi les harmoniser en continu aux besoins évolutifs des personnes employées pour s’assurer d’y répondre. En exploitant efficacement ces données, les organisations peuvent non seulement améliorer le bien-être de leur personnel, mais aussi renforcer leur marque employeur et attirer de nouveaux talents.
Dans un marché du travail de plus en plus concurrentiel, où la rétention des talents est devenue un enjeu crucial, les entreprises qui investissent dans des stratégies de bien-être basées sur les données se positionnent comme des employeurs de choix. « En fin de compte, l’avenir des RH repose sur leur capacité à utiliser intelligemment les données. Si elles sont bien exploitées, elles permettent de construire des environnements de travail qui favorisent à la fois la santé et la performance », conclut Rosalie Croteau.