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Les 5 ingrédients d’une organisation apprenante

Comment favoriser une transformation organisationnelle durable visant à créer une organisation apprenante?
10 décembre 2024
Ordre des conseillers en ressources humaines agréés

Les organisations doivent se défaire de leurs paradigmes et de leurs automatismes si elles espèrent atteindre de nouveaux sommets. Cela dit, si le terme « organisation apprenante » semble simple à comprendre, ce qu’il incarne est plus complexe, note d’emblée Mathieu Hétu, directeur centre de formation chez Pyxis et coconférencier invité au plus récent Rendez-vous Développement des talents, organisé par l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés.

« Une organisation apprenante n’est pas une organisation qui a mis en place un programme de formation continue pour ses employées et employés, pas plus qu’il ne s’agit d’une organisation qui favorise les rétrospectives post mortem à la fin de tous ses projets », dit-il.

Avec sa collègue chez Pyxis, Muriel Sans d’Agut, CRHA, directrice, Talents et culture, le conférencier a présenté les cinq disciplines telles qu’élaborées par Peter Senge, professeur au Massachusetts Institute of Technology, nommé « stratège du siècle » par le Journal of Business Strategy.

Peter Senge est à l’origine d’une importante révolution dans l’organisation des sociétés. Il a grandement contribué à répandre le concept d’« organisation apprenante », soit une entreprise qui atteint les résultats souhaités en adaptant de nouveaux modèles de pensée et où l’apprentissage tant individuel que collectif est encouragé.

« Le seul avantage concurrentiel durable d’une organisation est sa capacité à apprendre plus vite que sa concurrence, souligne Mathieu Hétu. C’est pourquoi les approches traditionnelles de gestion, les structures trop hiérarchisées et les modèles stricts sont moins efficaces. »

Atteindre ses objectifs personnels profite à l’équipe

Le premier ingrédient (discipline) clé d’une organisation apprenante est la maîtrise personnelle, indique Muriel Sans d’Agut.

Encore une fois, il faut éviter de sauter aux conclusions : il ne s’agit pas, pour une personne employée, d’acquérir de nouvelles compétences pour être plus en contrôle de son poste ou de ses responsabilités. « Selon Peter Senge, la maîtrise personnelle est une façon de continuellement clarifier et d’approfondir notre vision personnelle… et de voir la réalité avec le plus d’objectivité possible », souligne la directrice.

« Ce n’est pas de former les personnes à son emploi, mais de les accompagner dans le développement de leur vision personnelle : que cherchent-elles à accomplir, où se voient-elles dans la vie? » ajoute-t-elle.

Lorsqu’elles émergent, les réponses à ces questions peuvent devenir un puissant moteur d’action. « Les personnes qui vont chercher à atteindre leur vision personnelle vont se mettre d’elles-mêmes en mode d’apprentissage continu. Elles vont développer des comportements de curiosité et prendre des initiatives, et ce sont des comportements qu’elles vont reproduire dans leur contexte de travail », explique Muriel Sans d’Agut.

Le rôle de l’organisation est alors non seulement de créer un climat sécuritaire et propice à cette introspection, mais aussi de soutenir les travailleuses et travailleurs dans cette démarche qui, parfois, mène à des départs lorsqu’il n’y a pas d’adéquation entre la vision de l’entreprise et ce à quoi ils aspirent réellement.

Le processus est aussi exigeant en temps et en argent. « Quand bien même les gestionnaires ne sont pas contre le développement personnel, ils auront tendance à le privilégier sur les heures de vie personnelle des employées et employés », poursuit Muriel Sans d’Agut.

Mettre ses préjugés de côté

La deuxième discipline privilégiée par une organisation apprenante est son émancipation des « modèles mentaux », à savoir toutes les croyances, hypothèses et perspectives qui peuvent influencer les perceptions et les réactions des individus et qui sont profondément ancrées dans nos esprits.

Ces modèles mentaux ont toutefois pour effet de créer des angles morts, c’est pourquoi il faut les remettre en question, comme Platon a tenté de l’enseigner avec son Allégorie de la caverne.

« Si deux personnes avec des modèles mentaux différents assistent à la même scène, elles n’auront pas la même perception de ce qui vient de se produire et elles ne réagiront pas de la même façon », résume Muriel Sans d’Agut.

S’il est difficile de briser les modèles mentaux, d’en être conscient s’avère le principal défi. « Il faut prendre un pas de recul pour comprendre comment ces modèles influencent notre prise de décision afin de remettre en question nos idées préconçues », avance la directrice.

À ses yeux, la solution passe entre autres par des échanges accrus entre collègues. « Il ne faut pas hésiter à remettre en question nos suppositions et demander si elles ont du sens », dit-elle.

Se donner droit à l’erreur

Apprendre en équipe constitue la troisième discipline. « Il s’agit de la capacité d’une équipe à obtenir les résultats souhaités par chaque membre », résume Muriel Sans d’Agut.

La communication est donc essentielle au sein des groupes de travail, notamment en faisant émerger l’intelligence collective et en travaillant sur les forces qui l’empêchent d’être productive.

« Depuis l’école, nous sommes conditionnés à avoir peur d’être sanctionnés si on n’a pas la bonne réponse, indique Muriel Sans d’Agut. Cela fait en sorte qu’on n’ose pas toujours prendre la parole, de crainte d’être rejeté par nos collègues ou de se faire dire qu’on se trompe. Pourtant, 70 % de l’apprentissage passe par les erreurs. »

Les gestionnaires ont donc un rôle à jouer dans la mise en place de conditions favorisant la sécurité psychologique du personnel et le dialogue entre les membres.

Une vision commune

Selon la quatrième discipline, les équipes de travail qui réussissent le mieux sont celles qui partagent une vision commune et des objectifs complémentaires, avance Mathieu Hétu.

« C’est parce que les gens adhèrent aussi aux valeurs et qu’ils croient en leur mission », affirme-t-il.

Élaborer cette vision est un processus qui doit impliquer toutes les parties prenantes. « Si la vision part du sommet et qu’elle est imposée à la base, ça ne fonctionnera pas, prévient Mathieu Hétu. Idéalement, il faut travailler à une vision inclusive qui tient compte des employées et employés. »

La discipline ultime

Forte des quatre premières disciplines et indissociable de leur synergie, une cinquième discipline consolide le statut d’organisation apprenante des entreprises : la pensée systémique.

« Lorsque l'on pratique cette discipline, nous voyons l'ensemble des interactions d'une organisation comme des éléments en boucles de rétroactions. Dès lors, il n’est plus simplement question d’incidents ou d’événements isolés, avance Mathieu Hétu. La source de vos problèmes actuels est souvent liée à une solution du passé et on réalise que tous les éléments de l’organisation ont une incidence sur les autres. C’est à ce moment-là qu’on peut réellement parler d’une organisation apprenante. »


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