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Secret professionnel et conflit d’intérêts : quelques principes qui peuvent vous guider

Le CRHA ou CRIA qui exerce sa profession dans une organisation peut avoir un client différent selon la nature de son intervention. Lorsque les intérêts de ses clients s’opposent, il peut parfois se trouver devant le dilemme suivant : le devoir de loyauté envers son employeur, prévu dans le Code civil du Québec, et l’obligation de respect du secret professionnel, issue de la Charte des droits et libertés, du Code des professions et du Code de déontologie de l’Ordre.

Pour apporter un nouvel éclairage sur cette situation et permettre aux CRHA | CRIA qui exercent en entreprise de mieux concilier leurs différents rôles au sein des organisations, l’Ordre a élaboré des principes. Sans être contraignants, ceux-ci peuvent servir de référence dans la pratique des professionnels de la gestion des ressources humaines et des relations industrielles et les éclairer sur la conduite à privilégier.

Quelques mots tout d’abord sur les objectifs poursuivis et sur la démarche.

Une démarche sérieuse

La nécessité de développer de tels repères est née d’un nombre grandissant de questions provenant de professionnels qui souhaitent obtenir des solutions concrètes concernant le secret professionnel et le conflit d’intérêts. En les énonçant, l’Ordre poursuit en fait trois objectifs principaux. Nous voudrions que les professionnels :

  • évitent le plus possible de se trouver en conflit de rôles au sein de leur organisation en adoptant une attitude proactive et préventive à cet égard;
  • soient en mesure de mieux concilier leur obligation de respecter le secret professionnel avec celle de loyauté envers leur employeur;
  • soient mieux outillés pour guider le client lors de leurs interventions.

Principes

  1. Toute organisation doit respecter certaines obligations en matière de protection des renseignements personnels.
  2. Dans une organisation, le rôle principal d’un CRHA | CRIA consiste généralement à agir pour le compte de l’employeur.
  3. Le CRHA | CRIA a le devoir de clarifier son ou ses rôles auprès des employés et de la direction, aussi régulièrement que nécessaire.
  4. Le CRHA | CRIA a le devoir de faire des mises en garde appropriées aux personnes qui requièrent ses services ou conseils quant à son rôle et aux limites de la confidentialité et du secret professionnel.
  5. Toutes les informations ne sont pas protégées par le secret professionnel.
  6. La personne qui a livré une information protégée par le secret professionnel peut consentir à sa communication par le CRHA | CRIA ou à une intervention directe de sa part.
  7. Même si une information n’est pas protégée par le secret professionnel, elle peut demeurer confidentielle ou anonyme.
  8. Le CRHA | CRIA doit éviter d’accumuler inutilement des renseignements confidentiels.
  9. Ultimement, le droit à la protection du secret professionnel a préséance sur toute autre obligation découlant du contrat de travail ainsi que sur l’obligation de loyauté envers l’employeur prévue au Code civil du Québec.

Que signifient ces principes?

  1. Toute organisation doit respecter certaines obligations en matière de protection des renseignements personnels.

Les organisations ont à l’égard de leurs employés diverses obligations en matière de confidentialité des dossiers et de respect de la vie privée.

Ces obligations proviennent de diverses législations, fédérales et provinciales, qui s’appliquent selon le champ d’activité des organisations :

  • Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (fédéral)
  • Loi sur la protection des renseignements personnels (fédéral)
  • Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé (provincial)
  • Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (provincial)
  • Charte des droits et libertés de la personne (provincial)
  • Code civil du Québec

En cas de manquement, l’organisation en répondra entre autres devant la Commission d’accès à l’information du Québec et le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada.

Une organisation qui emploie un CRHA | CRIA a les mêmes obligations légales que le professionnel, qui est tenu, par son Code de déontologie, à des obligations similaires (respect du secret professionnel notamment), constitue même un atout qui peut aider l’organisation à se conformer aux lois en vigueur. En effet, selon l’article 12 du Code de déontologie des CRHA | CRIA, un professionnel ne peut avoir recours à des pratiques illégales, frauduleuses ou discriminatoires et doit refuser de participer à de telles pratiques. Selon la Charte des droits et libertés de la personne, il doit de plus respecter le secret professionnel. L’article 9 de la Charte prévoit en effet que :

« Toute personne tenue par la loi au secret professionnel et tout prêtre ou autre ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en raison de leur état ou profession, à moins qu’ils n’y soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ou par une disposition expresse de la loi.

Le tribunal doit, d’office, assurer le respect du secret professionnel. »

Le Code des professions, à son article 60.4, et le Code de déontologie, à son article 51, vont dans le même sens. Et c’est devant l’Ordre qu’un professionnel devra répondre des manquements aux lois mentionnées ci-dessus.

  1. Dans une organisation, le rôle principal d’un CRHA | CRIA consiste généralement à agir pour le compte de l’employeur.

À moins d’indications contraires (dans un contrat d’embauche, une description de poste ou autre), le rôle principal d’un CRHA | CRIA dans une organisation est d’agir comme professionnel pour le compte de l’employeur, qui devient son principal client. Mais ce faisant, le CRHA | CRIA peut exercer plusieurs rôles de nature différente. Ceux-ci l’obligent à moduler la nature de ses rapports avec son employeur.

En plus d’exercer divers rôles pour le compte de l’employeur, un CRHA | CRIA peut, de façon accessoire et ponctuelle, avoir comme clients d’autres personnes que l’employeur au sein de l’organisation : collègues, membres de la direction, employés, etc.

La notion de client recoupe en effet un ensemble de réalités. La jurisprudence à ce sujet indique qu’il s’agit d’une notion qui ne doit pas être interprétée restrictivement et qui, par exemple, ne désigne pas seulement un « payeur de services » (par un salaire ou des honoraires). Bref, toute personne qui requiert les services et avis professionnels du CRHA | CRIA peut être considérée comme un client.

Exemple (rôles)

Lorsqu’il négocie une convention collective pour le compte de l’employeur, le CRHA | CRIA joue un rôle de représentant et de conseiller. Il est mandaté pour défendre les intérêts de l’entreprise à la table de négociation. Toutefois, s’il est mandaté par l’employeur pour appliquer la procédure relative au harcèlement psychologique et mener une enquête interne à la suite de la dénonciation d’un cas de harcèlement, le CRHA | CRIA a alors un rôle neutre et indépendant d’enquêteur à la recherche des faits et non de « défenseur des intérêts de l’entreprise ».

Exemple (clients)

Souhaitant entreprendre des traitements médicaux, un employé demande de l’information sur le régime d’assurance de l’organisation. Le CRHA | CRIA exerce son rôle-conseil à l’égard de l’employé, qui devient son client. L’information échangée est confidentielle et protégée par le secret professionnel.

Par ailleurs, le niveau hiérarchique d’un CRHA | CRIA dans une organisation doit être considéré lorsqu’il s’agit de déterminer exactement son rôle dans l’organisation et par rapport à ses différents clients. Un directeur, un chef d’équipe, un superviseur ou un vice-président ont de fortes chances d’exercer un rôle important, sinon exclusif, pour le compte de l’employeur. Outre la dénomination du poste, il faut aussi rechercher d’autres indices tels que la structure organisationnelle, le fait de faire partie du comité de direction ou d’un syndicat, etc.

Si un professionnel est le seul gestionnaire des ressources humaines dans l’organisation, même s’il porte le titre de « coordonnateur », il est fort possible que son rôle soit principalement, sinon exclusivement, au service de l’employeur. Il ne faut donc pas considérer simplement le titre du poste, mais aussi le contexte où les fonctions sont exercées.

  1. Le CRHA | CRIA a le devoir de clarifier son ou ses rôles auprès des employés et de la direction, aussi régulièrement que nécessaire.

Comme les changements de rôles peuvent être fréquents et rapides, et que le cumul de plusieurs fonctions au sein d’une organisation peut créer une confusion des rôles, le CRHA | CRIA doit régulièrement clarifier son ou ses rôles. Cette clarification lui permet de dissiper tout malentendu de part et d’autre et d’éviter de se placer en situation de conflit d’intérêts, comme il est prévu à l’article 19, paragraphe 3, du Code de déontologie, lorsque les intérêts de ses clients (la direction et les employés) s’opposent. Il est ainsi moins susceptible d’avoir à se questionner sur l’application de l’article 37 du Code de déontologie qui prévoit que « [d]ès qu’il constate qu’il se trouve dans une situation de conflit d’intérêts, le membre doit en aviser le client et lui demander s’il l’autorise à continuer son mandat ».

Exemple

Un professionnel, directeur des ressources humaines siégeant au comité de direction, doit analyser une plainte pour harcèlement psychologique mettant en cause un directeur. Il fait face à un dilemme entre ses différentes obligations : membre du comité de direction et enquêteur sur un cas de harcèlement psychologique.

L’Ordre recommande donc aux organisations d’être vigilantes quant au cumul de fonctions incompatibles et de tenter d’éviter le plus possible de nuire au caractère indépendant d’une fonction par l’ajout de rôles additionnels allant à l’encontre du mandat d’indépendance confié.

Clarification lors de l’embauche

Dès l’embauche, le CRHA | CRIA doit savoir si, en raison de la nature du poste, du niveau hiérarchique, de la structure organisationnelle ou de tout autre indicateur, son rôle principal consiste à, selon le cas (liste non exhaustive) :

  • représenter l’employeur (ex. : directeur des relations du travail);
  • agir en toute indépendance et pour le bénéfice ultime des personnes (ex. : « ombudsman » de l’organisation, responsable de la gestion des cas de harcèlement psychologique ou des enquêtes à la suite d’une dénonciation interne pour conduite frauduleuse);
  • agir pour les employés exclusivement (« défenseur des employés », coaching d’un cadre, centre de service aux employés);
  • agir pour les deux parties à la fois (médiation, enquête sur climat de travail, gestion de crise).

Dès lors, il lui sera plus facile d’annoncer clairement à tout le personnel de l’organisation quel est son rôle dans l’entreprise. Le risque de se retrouver en situation de conflit d’intérêts tout en étant dans l’impossibilité d’alerter l’employeur, parce que lié par le secret professionnel, se trouvera dès lors diminué.

Clarification de façon périodique

Comme le CRHA | CRIA peut exercer principalement son rôle auprès de l’employeur, mais aussi être appelé de façon ponctuelle à agir pour le compte d’un employé, il doit se demander, à l’égard de chaque mandat ou de chaque intervention, quel rôle est alors sollicité et en faire part au personnel.

  1. Le CRHA | CRIA a le devoir de faire des mises en garde appropriées aux personnes qui requièrent ses services ou conseils quant à son rôle et aux limites de la confidentialité et du secret professionnel.

Lorsque le CRHA | CRIA exerce sa profession auprès de plusieurs clients qui peuvent avoir des intérêts divergents, il leur fait part de son devoir d’indépendance et des actions spécifiques qu’il devra entreprendre pour rendre ses services professionnels. Si la situation devient inconciliable avec son devoir d’indépendance, il doit informer ses clients qu’il doit mettre fin à la relation professionnelle. Ce sont les articles 17 et 19 du Code de déontologie qui prévoient cette obligation.

Selon les articles 17, 37 et 47 du Code de déontologie, lorsque le CRHA | CRIA réalise qu’il est dans une situation de conflit d’intérêts ou que son indépendance professionnelle est mise en question, il doit en aviser les parties concernées et prendre les mesures nécessaires pour rectifier la situation, même si cela peut exiger de lui qu’il mette fin au mandat confié par un client.

Par ailleurs, autant que possible, le CRHA | CRIA doit faire les mises en garde appropriées aux personnes qui le consultent (employeur ou employé) avant qu’elles lui communiquent des renseignements confidentiels. Il doit s’assurer qu’elles sont pleinement informées des utilisations éventuelles des renseignements confidentiels qui lui sont dévoilés et éviter de les induire en erreur. La personne qui consulte le CRHA | CRIA doit connaître les limites du rôle de celui-ci et savoir si l’entretien sera protégé par le secret professionnel et s’il demeurera confidentiel. C’est ainsi que, si cette personne sait qu’il agit pour le compte de l’employeur et que ses propos peuvent lui être rapportés, elle fera un choix plus judicieux des renseignements qu’elle divulguera. Bref, la transparence est la meilleure approche à adopter.

Exemple

Un employé consulte le conseiller en ressources humaines de l’entreprise pour laquelle il travaille pour lui faire part de la situation de harcèlement psychologique dont il est victime. Il ne veut pas que le conseiller fasse enquête, car il craint des représailles.

Les employés doivent être informés qu’aucune information relative à du harcèlement psychologique ou sexuel ne pourra être protégée par le secret professionnel. En effet, puisque les organisations ont le devoir d’éradiquer ces formes de harcèlement en milieu de travail, aucune personne ne peut avoir le mandat de « protéger » une situation de harcèlement.

  1. Toutes les informations ne sont pas protégées par le secret professionnel.

Le secret professionnel sert à protéger la personne qui fait des confidences à un CRHA | CRIA et vise à établir un climat de confiance entre celui-ci et son client. Toute personne qui confie des renseignements de nature confidentielle a droit au respect du secret. Il n’est donc pas nécessaire de payer des honoraires professionnels ou un salaire pour que le privilège s’applique.

Ainsi, ce n’est pas seulement le client au sens classique du terme qui peut bénéficier de cette protection. En effet, bien souvent, la personne qui paie les services professionnels n’est pas celle qui donne le mandat ou qui reçoit le travail final ni celle qui fait l’objet des services professionnels.

Exemple

Les coûts d’un programme d’aide aux employés sont payés par l’employeur. En vertu de ce programme, les employés ont accès à des consultations gratuites données par des professionnels. Lors de ces consultations, les employés bénéficient du droit au secret professionnel et l’employeur, qui paie pour le programme, n’a pas accès au contenu des entretiens confidentiels entre les employés et les professionnels qu’ils consultent.

C’est l’article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne qui consacre le droit fondamental au respect du secret professionnel.

L’article 60.4 du Code des professions, qui s’applique spécifiquement aux membres des ordres professionnels, reprend cette obligation de respecter le secret professionnel.

L’article 51 du Code de déontologie de l’Ordre vient apporter des précisions à ces dispositions plus générales; il prévoit en effet qu’afin de préserver le secret des renseignements de nature confidentielle qui viennent à sa connaissance dans l’exercice de sa profession, le professionnel doit :

« 1° s’abstenir de faire usage de tels renseignements au préjudice du client ou en vue d’obtenir, directement ou indirectement, un avantage pour lui-même ou pour autrui;

« 2° prendre les mesures nécessaires pour que ses collaborateurs et les personnes qu’il a sous son autorité ou sa supervision ne divulguent pas ou ne se servent pas de tels renseignements qui viennent à leur connaissance dans l’exercice de leurs fonctions;

« 3° éviter de tenir ou de participer à des conversations indiscrètes au sujet d’un client et des services qui lui sont rendus. »

Cependant, ce ne sont pas tous les renseignements qui sont protégés par le secret professionnel.

Pour que le secret professionnel s’applique, l’existence d’une intervention professionnelle est nécessaire. L’information doit être révélée au CRHA | CRIA dans le cadre de ses fonctions et en sa qualité de professionnel.

Qui plus est, pour être protégée, l’information doit avoir un caractère confidentiel, intime, personnel. En font partie par exemple les faits de la vie privée qui ne sont pas généralement connus du public, l’état de santé, la situation familiale et sociale, la situation financière, la vie religieuse, la réputation ou les affaires juridiques. Les faits notoires, connus de tous, ne sont donc pas visés par le secret.

Bien entendu, certains renseignements ne sont pas protégés par le secret professionnel : ce sont ceux qui concernent non seulement la perpétration d’un acte criminel, mais aussi de toute action ayant un but illicite, illégal.

Le Code des professions prévoit également, à l’article 60.4, qu’un professionnel peut être relevé de son secret dans des cas précis : lorsque le client l’autorise, lorsqu’une disposition d’une loi le permet et dans le but de prévenir un acte de violence, dont un suicide, lorsqu’il y a un risque sérieux de causer la mort ou des blessures graves (physiques ou psychologiques). Les modalités de cette communication sont prévues à l’article 51.1 du Code de déontologie des CRHA | CRIA lorsqu’il s’agit de prévenir un acte de violence.

Exemple

Un médecin avise le directeur de la santé publique qu’un patient atteint de la COVID-19 s’est présenté au travail alors qu’il était porteur du virus et qu’il a potentiellement contaminé d’autres travailleurs. À la suite de cette information, le directeur de la santé publique mène une enquête et demande à l’employeur du patient infecté à voir les dossiers d’employés. Ces dossiers sont sous la garde du conseiller en ressources humaines de l’entreprise. Celui-ci ne pourra s’opposer à la demande de consultation des dossiers des employés sous motif qu’il s’agit d’informations protégées par le secret professionnel, puisque la Loi sur la santé publique prévoit expressément que, dans le cas d’une enquête épidémiologique, le directeur de la santé publique peut ordonner à toute personne de lui donner accès à des documents, même s’ils contiennent des renseignements confidentiels.

  1. La personne qui a livré une information protégée par le secret professionnel peut consentir à sa communication par le CRHA | CRIA ou à une intervention directe de sa part.

Un professionnel peut être relevé du secret professionnel avec l’autorisation de la personne dont les renseignements sont protégés. Ainsi la personne autorisera le professionnel à divulguer ses renseignements à d’autres personnes. Il faut toutefois être vigilant; on ne peut présumer qu’il y a eu autorisation : celle-ci doit être volontaire et claire, qu’elle soit donnée de manière expresse ou tacite.

Exemple

Lorsqu’un client poursuit le CRHA | CRIA pour faute professionnelle, la jurisprudence reconnaît qu’il renonce alors tacitement au secret.

Lorsqu’une personne renonce à la protection du secret professionnel, il est fortement recommandé de signer une déclaration à cet effet. Mais, auparavant, le professionnel doit bien lui faire comprendre les conséquences de la levée du secret et l’informer qu’il est possible d’intervenir tout en préservant son anonymat.

  1. Même si une information n’est pas protégée par le secret professionnel, elle peut demeurer confidentielle ou anonyme.

Même dans un contexte où le secret professionnel ne s’applique pas, la confidentialité ou l’anonymat peuvent être des garanties qui ont été offertes à une personne. Il existe plusieurs types de mandats où le CRHA | CRIA agit à la demande de l’employeur et doit lui faire rapport, mais où il est prévu que la confidentialité des échanges ou l’anonymat des personnes seront protégés (ex. : enquête sur le climat organisationnel, entrevue de départ, sondage des employés). Bien entendu, certains cas ne permettent pas de préserver l’anonymat ou la confidentialité (ex. : nombre restreint de participants). La question de la garantie de confidentialité ou d’anonymat doit donc être abordée dès le début du mandat.

En outre, l’article 6 (6°) du Code de déontologie stipule que le professionnel doit, particulièrement dans l’exercice de fonctions qui l’amènent à gérer des ressources humaines, tenir compte « de la confidentialité des dossiers des personnes qu’il a sous son autorité ou sa supervision et des informations ou renseignements de nature confidentielle concernant ces personnes et qui viennent à sa connaissance dans l’exercice de sa profession ».

Cet article fait directement référence aux obligations prévues dans la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé ainsi qu’aux articles 35 à 41 du Code civil du Québec qui portent sur la protection de la vie privée.

  1. Le CRHA | CRIA doit éviter d’accumuler inutilement des renseignements confidentiels.

Afin de ne pas se placer en situation de conflit d’intérêts, le CRHA | CRIA doit à tout prix éviter d’en connaître trop sur la vie personnelle des employés lorsque cela n’est pas pertinent ou utile à une intervention. Au besoin, il doit diriger les employés à des services ou ressources externes (programme d’aide aux employés, syndicat, CSSS, consultant, responsable désigné en matière de harcèlement psychologique, etc.). Le recours au programme d’aide aux employés peut s’avérer particulièrement utile lorsqu’il s’agit de problématiques personnelles des employés, à plus forte raison si le CRHA | CRIA est le seul professionnel de la gestion des ressources humaines au sein de l’organisation.

À moins qu’il ne s’agisse manifestement du rôle qui lui a été confié, le CRHA | CRIA doit rester vigilant et éviter de devenir le confident des employés, qui risquent de lui confier des éléments de leur vie privée allant à l’encontre des intérêts de son principal client, l’organisation, (ex. : consommation de drogue ou d’alcool en milieu de travail) et de réclamer ensuite la protection du secret professionnel.

Il est également important de rappeler que, dans le cadre de la tenue d’un dossier concernant un employé, le CRHA | CRIA est tenu, en vertu de l’article 5 de la Loi sur la protection des renseignements personnels du Québec ou du principe 4.4 de l’annexe 1 de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques du Canada, de n’y inscrire que les renseignements utiles à la nature de celui-ci. Ainsi, le CRHA | CRIA ne devra consigner dans le dossier d’un employé que les renseignements qui sont en lien avec le travail et qui sont pertinents. Il devra éviter de consigner des informations anecdotiques qui ne sont pas pertinentes avec le dossier d’emploi ou dont il aurait eu connaissance alors qu’il n’était pas dans le cadre de ses fonctions.

  1. Ultimement, le droit à la protection du secret professionnel a préséance sur toute autre obligation découlant du contrat de travail ainsi que sur l’obligation de loyauté envers l’employeur prévue au Code civil du Québec.

Les obligations de l’employé découlent de son contrat de travail. Plus précisément, l’article 2088 du Code civil du Québec lui impose un devoir de loyauté envers son employeur. Cette obligation est la plupart du temps négative, c’est-à-dire qu’elle a été interprétée par la jurisprudence comme étant une obligation de ne pas faire : ne pas faire preuve de malhonnêteté, ne pas utiliser de l’information confidentielle obtenue pendant l’emploi, ne pas faire concurrence à l’employeur, etc. La jurisprudence a aussi défini l’obligation de l’employé comme étant un devoir de probité, de droiture, d’honnêteté, de bonne foi et de fidélité. Par contre, ce devoir ne va jamais jusqu’à devenir une obligation de dénonciation.

L’obligation de loyauté de l’employé comporte toutefois son lot de zones grises : le poste occupé par l’employé peut imposer des obligations plus contraignantes.

Par exemple, si le CRHA | CRIA relève directement de la haute direction (ou s’il en fait partie), il est concevable que son obligation de loyauté soit plus importante que celle d’un professionnel dont le supérieur hiérarchique est un gestionnaire des ressources humaines. Dans ce dernier cas, il est un employé n’ayant qu’une obligation « négative » de loyauté et il n’y a pas de conflit d’intérêts entre ses obligations contractuelles et professionnelles. La vigilance s’impose donc à cet égard.

Quoi qu’il en soit, si un CRHA | CRIA est en possession d’une information qui lui a été révélée dans l’exercice de sa profession et qui va à l’encontre des intérêts de l’organisation, la protection du secret professionnel s’applique si aucune mise en garde venant la limiter n’a été faite. En effet, le droit au respect du secret professionnel est un droit fondamental qui prime sur les autres règles issues du contrat de travail.

Exemple

Dans l’affaire


Source :

Source : De premier ordre, Janvier 2008 – Vol. 10 N°1

Source : De premier ordre, Mars 2008 – Vol. 10 N°2