Lorsque Goodfood décide de s’attaquer de front aux enjeux de santé et sécurité, elle doit composer avec plusieurs difficultés.
Typique des startups technologiques, Goodfood vivait une croissance phénoménale, notamment en raison des restrictions pandémiques et par la décision de vendre des produits d’épicerie par le biais d’une interface en ligne.
« Comme la plupart des entreprises en démarrage, les initiatives liées à la santé et sécurité au travail étaient pleines de bonnes intentions, mais souvent spontanées, avec des tâches éparpillées entre les responsables des opérations et les responsables des fonctions RH naissantes, explique Benoît Fillion, CRHA, vice-président — Personnes et culture. Il nous fallait ajouter de la cohérence, des compétences et des processus, sans ralentir notre croissance. »
Opérer un service comme Goodfood implique une grande complexité. Et celle-ci ne se situe pas nécessairement en cuisine, qui, chez Goodfood, s’appuie sur une équipe restreinte. Les défis relèvent davantage de l’assemblage et de l’expédition. Ces tâches sont effectuées 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, sur trois quarts de travail (les quarts de jour étant prédominants).
Il s’agit donc d’un concept de juste-à-temps, car les produits arrivent chaque jour, et les commandes sont reçues et expédiées quotidiennement à la clientèle.
Le volume varie selon les commandes à traiter. Certaines sections de l’usine se consacrent au proportionnage, d’autres à la production, à l’emballage des sacs et des boîtes ainsi qu’à l’expédition. Une équipe gère les stocks. « On dispose de 60 000 pieds carrés de frigos ainsi qu’un vaste garde-manger. On déplace constamment les aliments, selon les besoins de chaque service », explique Alexandre Rouleau, directeur national — Santé et sécurité.
Ces mouvements varient selon le type de produits et, surtout, selon le poids ou la quantité. Certains se font à pied ou par des chariots élévateurs, qui déplacent des palettes chargées de boîtes de produits alimentaires. Selon les commandes, le personnel peut déplacer des dizaines ou des centaines de boîtes d’un produit. Par exemple, s’il faut traiter trois recettes avec du brocoli au cours d’une semaine, l’équipe pourrait avoir à déplacer 26 palettes de brocoli. Et pour certains produits (viande, produits laitiers), il faut maintenir en permanence la chaîne de froid.
Comme Goodfood était en mode croissance, certains services ont subi cinq configurations différentes en quelques mois. Plus la croissance s’intensifiait, plus les enjeux en santé et sécurité prenaient de l’importance, car 65 % des accidents étaient liés à l’organisation du travail ou à la manutention.
« Il fallait créer l’identité de Goodfood en matière de santé et de sécurité, en partant de la base », dit Alexandre Rouleau. L’année 2020 était la première de Goodfood au régime rétrospectif de la CNESST. Il y avait de nombreux défis quant à la prévention des accidents, à la gestion des réclamations et à la gestion financière. « Pour ajouter au contexte, précise le directeur, nous étions encore intensément dans la gestion quotidienne de la pandémie, nous avions de nouveaux sites au Québec, en Ontario et une expansion en Colombie-Britannique. »
Goodfood avait en outre un important défi de culture à relever : continuer de gérer la pression quotidienne des opérations, en croissance exponentielle, sans avoir le sentiment de faire des compromis quant à l’intégrité physique des personnes qu’elle emploie, qu’elle nomme Goodfoodies. « Il fallait passer d’une gestion spontanée principalement axée sur nos préoccupations quotidiennes, à une gestion plus réfléchie axée sur des préoccupations à long terme. Et il fallait implanter cette transformation alors que les ressources humaines et financières étaient plus limitées que jamais », dit Benoît Fillion.
La direction de l’entreprise était consciente qu’elle s’engageait non pas dans un sprint, mais dans un marathon.
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