Intitulé
Hamelin et Flash Graphix inc., 2025 QCTAT 2480
Juridiction
Tribunal administratif du travail, Division de la santé et de la sécurité du travail (T.A.T.), Laval
Type d'action
Contestation par le travailleur d'une décision ayant déclaré qu'il n'avait pas subi de lésion professionnelle. Contestation accueillie.
Décision de
Marie-Anne Lecavalier, juge administrative
Date
16 juin 2025
Le travailleur, un pressier, a produit une réclamation pour un trouble de l'adaptation avec humeur dépressive qu'il attribuait à une surcharge de travail. La CNESST a refusé sa réclamation. L'instance de révision a confirmé cette décision.
Décision
À compter de décembre 2021, le travailleur s'est retrouvé seul pour effectuer le travail sur une presse à la suite du départ de certains employés. Il effectuait donc l'ensemble des tâches nécessaires à lui seul, ce qui signifiait que 1 seule tâche d'impression pouvait lui prendre plus de 1 journée alors que, habituellement, il en réalisait au moins 2 par jour. La préparation de la presse prenait environ le double du temps également. Le Tribunal retient de la description des tâches effectuées qu'il s'agit d'un travail excessivement physique. Le travailleur devait manipuler de grosses plaques d'impression seul, lesquelles mesurent 65 pouces de large par 45 pouces de haut. S'il introduisait le papier à l'un des bouts de la presse, il devait ensuite courir jusqu'à l'autre bout pour s'assurer que le papier était en bonne position. Le Tribunal comprend également que le fait de manoeuvrer la presse seul pouvait avoir d'importantes répercussions, comme celle de ne pas nécessairement voir que les affiches étaient mal alignées dans la machine ou encore le bris des blanchets sur la presse, ce qui était susceptible d'engendrer des coûts représentant des milliers de dollars. La situation a culminé en novembre 2022, alors que l'employeur a obtenu plusieurs contrats, dont l'un important nécessitant un grand nombre d'impressions.
La preuve démontre la présence d'une surcharge de travail en lien avec le fait que, pendant de nombreux mois, le travailleur a dû manoeuvrer seul une machine qui, en temps normal, nécessitait au minimum 2 ou 3 employés pour le faire. Cela a engendré une augmentation de l'effort physique du travailleur et a généré de la fatigue. En outre, la situation a entraîné un stress et de la pression quant à la qualité du travail que ce dernier devait fournir. Même si l'employeur comprenait la situation et n'imposait pas de conséquence sur le fait que les tâches nécessitaient plus de temps, il n'en demeure pas moins qu'il s'agissait d'un travail précis et qui devait être de qualité. Les conséquences d'une impression mal faite ou ratée étaient importantes. Le Tribunal ne retient pas l'argument de l'employeur selon lequel il s'agissait davantage d'une perception que d'une réelle surcharge. Bien que le travailleur n'ait pas effectué d'heures supplémentaires, c'est le manque de personnel et ses conséquences, soit l'exigence physique supplémentaire pour l'exercice des tâches et la pression occasionnée sur la qualité du travail, qui fait que la surcharge est retenue. Il n'est pas normal que le travailleur ait eu à manoeuvrer seul une presse de cette envergure durant autant de mois, d'autant moins que la preuve montre que, postérieurement à son arrêt de travail, l'employeur a affecté 2 personnes presque en tout temps à cette même machine. Toute cette situation est qualifiable d'objectivement particulière, singulière, anormale ou inhabituelle. La survenance d'un événement imprévu et soudain a été démontrée.
Quant à la relation causale entre la maladie et l'événement, la preuve tant médicale que factuelle la démontre de manière probante. Par conséquent, le travailleur a subi une lésion professionnelle.