Intitulé
Lessard-Gauvin c. Société de l'assurance automobile du Québec, 2025 QCTAT 1930
Juridiction
Tribunal administratif du travail, Division des relations du travail (T.A.T.), Québec
Type d'action
Plaintes en vertu de l'article 122 de la Loi sur les normes du travail à l'encontre de mesures de représailles — rejetées.
Décision de
Dominic Fiset, juge administratif
Date
9 mai 2025
Décision
Le plaignant, un technicien en administration, prétend que diverses mesures lui ont été imposées parce qu'il avait exercé son droit de s'absenter pour cause de maladie — il estime avoir été victime de discrimination en raison d'un handicap et que cela a influé sur les mesures qu'il conteste — malgré des demandes claires et légitimes de l'employeur, ce n'est que près de 1 an 1/2 après son embauche que le plaignant a transmis un rapport médical faisant état de ses limitations fonctionnelles — dans les circonstances, le Tribunal ne saurait conclure que l'employeur a discriminé le plaignant — sur le fond, celui-ci conteste un refus d'avancement d'échelon — or, le plaignant n'a pas fait valoir un motif raisonnable pour être relevé de l'omission d'avoir déposé sa plainte dans le délai prescrit — il n'a pas démontré que l'omission de l'employeur de reconnaître ses crédits de vacances et de congés de maladie serait survenue dans les 45 jours ayant précédé le dépôt de 2 autres plaintes, lesquelles sont vouées à l'échec — l'employeur ayant finalement décidé de prolonger le plan de redressement applicable au plaignant, la plainte à cet égard est devenue sans objet.
Le plaignant conteste ses évaluations de rendement — il n'a toutefois pas démontré un motif raisonnable permettant de le relever de l'omission d'avoir déposé une plainte dans le délai prescrit pour contester ses évaluations antérieures à juin 2021 — l'évaluation du 8 juin contient des remarques négatives à l'égard de sa prestation de travail — il s'agit d'une «mesure» au sens de l'article 17 du Code du travail — le plaignant bénéficie de la présomption légale — l'évaluation de rendement en question fait état d'une productivité insuffisante, d'absences du travail sans avoir respecté les procédures internes à cet effet, de relations interpersonnelles difficiles et d'un refus de collaborer positivement à l'amélioration de sa prestation de travail — le Tribunal conclut que ces lacunes ont été objectivées par l'employeur — la productivité du plaignant a été évaluée en fonction du nombre de dossiers traités en comparaison avec sa performance au cours des périodes de référence précédentes ainsi qu'avec celle de ses pairs — l'employeur n'a pas pris en compte les absences du plaignant aux fins du calcul de la moyenne des dossiers traités — il était fréquent que le plaignant avisait l'employeur de son absence quelques minutes à peine avant le début de son quart de travail — le gestionnaire du plaignant a expliqué que ce dernier accaparait le double du temps de gestion requis par les 12 autres techniciens de l'équipe — il a également mentionné que le plaignant avait déjà exercé du chantage à l'endroit de l'employeur afin de négocier les conditions de son retour au travail après une absence pour cause de maladie — le fait que le plaignant se soit parfois autodéclaré malade est préoccupant — un salarié ne peut valablement se diagnostiquer lui-même un problème de santé justifiant une absence prolongée du travail — un employeur qui tient compte d'un tel comportement dans une évaluation de rendement ne contamine pas celle-ci par un motif illicite — l'employeur a repoussé la présomption légale.
Le plaignant bénéficie également de la présomption légale en lien avec le plan de redressement imposé le 30 juin 2021 et avec le refus de l'employeur de prolonger le délai pour soumettre ses commentaires relativement à l'évaluation de rendement du 8 juin précédent — le plan de redressement étant l'accessoire de l'évaluation, il doit être considéré comme ayant été imposé pour une cause tout aussi juste et suffisante — l'employeur a repoussé la présomption à cet égard — la convention collective applicable au plaignant prévoit un délai de 30 jours pour transmettre des commentaires en réponse à une évaluation de rendement — malgré une prolongation du délai, ce n'est que le 1er septembre 2021 que le plaignant a transmis une «ébauche de commentaires» de 46 pages — il a demandé que le délai soit prolongé au 23 septembre pour transmettre une version finale — l'employeur lui a refusé cette prolongation et l'a informé que ses commentaires du 1er septembre seraient pris en considération — il a été démontré que la vaste majorité des salariés qui commentent leur évaluation y consacrent un maximum de 2 heures — l'employeur a été conciliant en acceptant de rémunérer les 28 heures que le plaignant a consacrées à cette tâche — le Tribunal retient qu'il aurait été inutile d'accorder la prolongation demandée par le plaignant puisque ses commentaires ont été soumis et pris en considération par l'employeur — la présomption à cet égard a également été repoussée.