Intitulé
Alliance des professeures et professeurs de Montréal et Centre de services scolaire de Montréal (Patrice Robergeau), 2025 QCTA 242
Juridiction
Tribunal d'arbitrage (T.A.)
Type d'action
Griefs contestant des suspensions (1, 3, 6, 12 et 24 jours), une suspension à des fins d'enquête, une recommandation de résiliation d'un engagement et un congédiement. Rejetés.
Décision de
Me Nathalie Faucher, arbitre
Date
28 mai 2025
La direction de l'école reproche au plaignant, un enseignant, d'intimider et d'humilier ses élèves, ce qui a entraîné un grand nombre de plaintes de la part de ces derniers et de leurs parents. En outre, il fait valoir l'attitude irrespectueuse du plaignant envers les parents des élèves visés lors de réunions de parents ainsi que son attitude non coopérative et d'affrontement à l'égard de la direction de l'école et de ses représentants, ou encore des autres professionnels de l'établissement. De son côté, le plaignant considère que les mesures qui lui ont été imposées constituent un abus du droit de direction de l'employeur. Il estime que ses propos étaient tout à fait acceptables lorsqu'ils sont pris dans leur contexte et qu'il n'a jamais voulu offusquer ou humilier qui que ce soit. Selon lui, le but de ses propos était de stimuler les élèves afin de favoriser leur réussite. Enfin, il reproche à l'employeur de ne pas avoir respecté le principe de la progression des sanctions.
Décision
Les enseignants sont des experts en pédagogie et il leur appartient de gérer la conduite de chaque groupe d'élèves qui leur est confié ainsi que d'adopter des modalités d'intervention pédagogique correspondant aux besoins et aux objectifs de ceux-ci. Toutefois, les reproches qui sont faits au plaignant ne concernent pas sa façon d'enseigner ni ses méthodes pédagogiques, mais plutôt le fait de ridiculiser ou d'humilier les élèves qui ont de moins bons résultats ou qui ne font pas leurs devoirs, ou encore le fait de ne pas tenir compte des diagnostics et des besoins particuliers de certains élèves. Ce faisant, le plaignant a contrevenu à ses devoirs de donner le goût d'apprendre et d'agir de manière juste et impartiale envers ses élèves. Ces derniers ont également des droits, y compris ceux d'avoir un environnement scolaire sain et sécuritaire ainsi que d'être respectés, au même titre qu'ils doivent respecter leur enseignant, le personnel et les autres élèves. Quant à l'attitude négative et irrespectueuse du plaignant envers la direction de l'école, la preuve corrobore les reproches invoqués, alors que le plaignant adoptait régulièrement une attitude de défi et de contestation. Il en va de même de son attitude envers les autres professionnels de l'école. Par ailleurs, les étudiants n'ont pas à savoir qu'un conflit oppose leur enseignant à la direction. De plus, il est inapproprié d'humilier un parent en lui reprochant de ne pas avoir appris le français depuis son arrivée au pays, et ce, devant son enfant et un tiers. Il a également été démontré que le plaignant avait fait une trentaine de copies de l'une des mesures disciplinaires qui lui avaient été imposées et qu'il les avait remises à ses collègues. Ce faisant, le plaignant a commis une faute. Ce n'est pas tant le geste de photocopier un document qui lui est reproché, mais plutôt son intention derrière ce geste et ses effets, celui-ci ayant miné la crédibilité de la direction et ayant nui au climat de travail. En outre, ce geste est de la même nature que certains reproches précédents en lien avec son attitude d'affrontement à l'égard de la direction. Le plaignant a ensuite fait l'objet d'une assignation à domicile ou d'une suspension à des fins d'enquête, suivant la réception d'une nouvelle plainte. Ainsi, malgré l'importance de la sanction disciplinaire précédente et, surtout, la mention claire que l'employeur songeait à résilier son contrat d'emploi, le plaignant a récidivé. Dans ce contexte, l'assignation à domicile avec solde s'imposait afin de mener une enquête auprès des collègues et des élèves du plaignant. Vu les résultats de cette enquête et les nombreux comportements fautifs démontrés par celle-ci, la décision de recommander la résiliation de l'engagement du plaignant était bien fondée et le relevé temporaire de fonction sans solde était conforme aux exigences de la convention collective. Enfin, en ce qui concerne la résiliation du contrat d'engagement du plaignant, l'employeur a fait la preuve des manquements reprochés, lesquels sont des fautes de la nature de l'insubordination et d'une inconduite professionnelle. Compte tenu du refus du plaignant de s'amender, l'employeur a tenté de lui faire comprendre ses attentes et a espéré qu'il retiendrait le message. Cependant, la discipline progressive n'a donné aucun résultat. À ce stade, le lien de confiance ne pouvait plus exister. La résiliation du contrat d'engagement du plaignant était donc justifiée.