Intitulé
Alliance du personnel professionnel et administratif de la ville de Laval et Ville de Laval (grief syndical), 2025 QCTA 224
Juridiction
Tribunal d'arbitrage (T.A.)
Type d'action
Grief relatif à des avantages sociaux. Rejeté.
Décision de
Me Yann Bernard, arbitre
Date
27 mai 2025
Le syndicat conteste le refus de l'employeur d'accorder aux salariées qui accouchent le bénéfice d'un congé accordé à l'occasion de la naissance lorsque, au moment où elles souhaitent bénéficier de ce congé, elles se trouvent déjà en congé de maternité. Selon le syndicat, cette décision est contraire à la convention collective ainsi qu'à l'article 93 de la Loi sur les normes du travail (L.N.T.) et à l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne.
Décision
Les dispositions pertinentes de la convention collective ne souffrent d'aucune ambiguïté. Le texte introductif de la clause 22.01 fait mention d'un «droit de s'absenter», ce qui implique nécessairement que, n'eût été son absence ou un congé, le salarié aurait travaillé. Un salarié ne peut donc «s'absenter» du travail lorsqu'il est déjà en congé et qu'il n'a aucune «présence» à assurer. La salariée en l'espèce ne pouvait donc obtenir un congé à l'occasion de la naissance puisqu'elle se trouvait déjà en congé de maternité au moment de son accouchement. Par ailleurs, le Tribunal ne peut retenir l'argument du syndicat selon lequel la clause 22.06 doit être considérée comme nulle puisqu'elle contrevient à l'ordre public. En effet, l'absence est également une condition d'ouverture au droit au congé rémunéré prévu à l'article 81.1 L.N.T. Or, une absence suppose une obligation préalable de se présenter au travail, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Enfin, le Tribunal rejette l'argument selon lequel la clause 22.06 serait discriminatoire et contraire à la charte au motif qu'elle exclurait indûment les salariées qui sont déjà en congé de maternité, alors que les parents ne vivant pas de grossesse eux-mêmes auraient accès au congé à l'occasion de la naissance. Pourtant, tous bénéficient du même accès à ce congé et tous en sont privés par la clause 22.06 dès lors qu'ils sont en train de bénéficier d'un autre congé ou qu'il n'est pas prévu qu'ils travaillent. En outre, il y a lieu de faire une distinction entre une norme destinée à protéger une personne d'une situation défavorable et une norme accordant un bénéfice auquel la personne salariée a droit en vertu de son lien d'emploi. En effet, la position syndicale revient à faire de la norme en cause un bénéfice rattaché à la prestation de travail comme le seraient des vacances rémunérées ou des congés mobiles, alors qu'il s'agit au contraire d'une protection contre un aléa de la vie, en l'occurrence celui de placer la personne salariée dans une situation où elle doit à la fois offrir une prestation de travail et s'absenter à l'occasion de la naissance de son enfant. Les dispositions de la clause 22.01 ne créent pas des bénéfices que chacun peut espérer recevoir de façon égale, mais plutôt des protections auxquelles tous devraient avoir accès quand ils se trouvent dans une situation les rendant nécessaires. D'autres conditions de travail, comme le congé de maternité, permettent à la salariée qui accouche de s'absenter de son travail. Or, lorsque ces normes et dispositions sont mises en oeuvre selon les modalités requises par la salariée elle-même, les aléas donnant ouverture à l'application de la clause 22.01 sont écartés et la protection offerte par celle-ci n'est plus nécessaire. Ainsi, il n'y a pas lieu de conclure à l'existence d'une distinction, d'une exclusion ou d'une préférence fondée sur la grossesse.