Intitulé
Aluminerie Alouette inc., 2025 QCTAT 2560
Juridiction
Tribunal administratif du travail, Division de la santé et de la sécurité du travail (T.A.T.), Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine, Bas-Saint-Laurent et Côte-Nord
Type d'action
Contestation par l'employeur d'une décision relative à l'imputation des coûts. Contestation rejetée. Contestation par l'employeur d'une décision relative à un transfert des coûts. Contestation rejetée.
Décision de
Louise Guay, juge administrative
Date
18 juin 2025
Le travailleur a subi une lésion professionnelle de nature psychologique en raison des propos de certains de ses collègues. Sa plainte pour harcèlement psychologique a également été accueillie par le Tribunal. L'employeur a contesté la décision générale d'imputation. L'instance de révision a confirmé cette décision. L'employeur a demandé un transfert d'imputation, alléguant avoir été obéré injustement puisque les circonstances liées à la survenance de la lésion professionnelle sont étrangères aux risques qu'il doit supporter. L'instance de révision a déclaré recevable la demande de l'employeur, mais l'a rejetée quant au fond.
Décision
La décision générale d'imputation est bien fondée et informe l'employeur qu'il est imputé du coût des prestations qui sont dues en raison de l'accident du travail subi par le travailleur. Elle est confirmée.
Quant à la demande de transfert, le Tribunal conclut également qu'elle est recevable. L'employeur n'a toutefois pas démontré qu'il est obéré injustement. Le Tribunal estime que le harcèlement psychologique fait partie des risques particuliers et inhérents à l'ensemble des activités de l'employeur, peu importe la nature des activités. Il s'agit d'une situation à laquelle ce dernier doit faire face et qui fait partie des relations du travail. Le présent tribunal fait siens les propos tenus dans Ville de Québec (T.A.T., 2024-04-30), 2024 QCTAT 1555, SOQUIJ AZ52024852, 2024EXPT-1051.
L'employeur convient que le contenu des conversations des 4 protagonistes démontre des propos inacceptables et empreints de racisme. Il prétend toutefois que la lésion professionnelle est survenue dans des circonstances revêtant un caractère extraordinaire, inusité, rare ou exceptionnel du fait qu'elle découle de la découverte d'échanges écrits contenus dans l'ancien téléphone cellulaire acheté par le travailleur à l'un des 4 harceleurs. Ces propos reconnus comme étant la source de la lésion professionnelle ont été tenus dans le cadre de conversations privées entre ces personnes dans un groupe de discussion privé, et ce, sur une plateforme non reliée au travail.
Même si l'employeur a réagi lorsqu'il a été informé des propos vexatoires que ses employés avaient tenus envers le travailleur, cela ne l'exonère pas de supporter le coût de la lésion professionnelle qui en découle. Par ailleurs, ce n'est pas la façon dont le travailleur prend connaissance des conversations constituant du harcèlement psychologique qui doit, aux fins de l'obtention d'un transfert d'imputation, revêtir un caractère extraordinaire, inusité, rare ou exceptionnel. Ce sont les circonstances du harcèlement lui-même qui doivent revêtir un tel caractère. Or, le Tribunal ne voit pas de circonstances extraordinaires, inusitées, rares ou exceptionnelles dans le fait que, de nos jours, des gens discutent sur des plateformes virtuelles en privé ou sur des médias sociaux ou qu'ils s'envoient des textos par leurs téléphones cellulaires, que ce soit pour se dire des banalités ou des méchancetés. De plus, en l'espèce, la lecture des conversations en cause démontre que plusieurs ont été écrites en temps réels sur les lieux du travail et décrivaient des faits se produisant durant le quart du travail. Par conséquent, l'employeur demeure imputé de la totalité des coûts de la lésion professionnelle.