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Entrave aux activités syndicales

La plainte pour pratique interdite est accueillie, l'employeur ne pouvant reprocher au représentant syndical d'avoir enfreint une directive qui visait à lui dicter la manière d'exercer son devoir de représentation auprès des salariés.
6 août 2025

Intitulé

Morency c. Réseau de transport de la Capitale, 2025 QCTAT 1742

Juridiction

Tribunal administratif du travail, Division des relations du travail (T.A.T.), Québec

Type d'action

Plaintes en vertu des articles 12 et 15 du Code du travail pour pratique interdite et entrave aux activités du syndicat — accueillies.

Décision de

Pierre-Étienne Morand, juge administratif

Date

29 avril 2025


Décision

Le plaignant, qui était le secrétaire du syndicat, soutient que l'avis écrit que lui a remis l'employeur, et dans lequel on lui reproche d'avoir discuté avec un salarié sans avoir donné un préavis au contremaître (contrevenant ainsi à une exigence de l'employeur) ainsi que d'avoir manqué de civilité à l'occasion d'une discussion avec celui-ci, a été fait en représailles à ses activités syndicales — le syndicat, quant à lui, voit dans la décision de l'employeur de l'entrave à ses activités — le plaignant est libéré de la majorité de son temps de travail pour s'acquitter de ses tâches syndicales — à ce titre, il bénéficie de la présomption légale — par ailleurs, le Tribunal estime que les faits et gestes reprochés par l'employeur au plaignant sont couverts par l'immunité relative dont bénéficient les dirigeants syndicaux — en effet, le plaignant exécutait des fonctions syndicales — c'est en sa qualité de représentant qu'il s'est rendu auprès du salarié et qu'il a ensuite discuté avec le contremaître, et ce, avec fermeté et détermination, mais sans outrepasser son mandat — le refus du plaignant de se conformer à la directive patronale ne lui a pas fait perdre le bénéfice de l'immunité — c'est une chose d'affirmer qu'un employeur peut user de son droit résiduaire de direction pour établir une directive à laquelle doivent se conformer les salariés de l'entreprise — c'en est une autre de soutenir qu'il peut aussi s'autoriser de son droit de direction pour dicter au syndicat la façon dont celui-ci doit agir en s'acquittant de son devoir de représentation — de toute façon, qu'il y ait ou non une cause juste et suffisante, il existe une preuve directe que la qualité de représentant syndical du plaignant a été prise en considération par l'employeur — il y aurait donc cohabitation de la cause juste et suffisante alléguée et d'un motif illicite — quant à la plainte pour entrave, si le geste patronal n'est pas délibéré, il dénote assurément une imprudence qui trahit une intention antisyndicale — de plus, il faut tenir compte du contexte particulier de vulnérabilité du syndicat en raison de l'expiration récente de la convention collective et de l'amorce des négociations visant son renouvellement — dans un tel contexte, il y a lieu de faire droit à la plainte et d'accorder la somme de 1 500 $ à titre de dommages punitifs vu l'atteinte illicite à la liberté d'association protégée par la Charte des droits et libertés de la personne.