Intitulé
Syndicat des professeurs et professeures de l'Université Laval et Université Laval (Patrick Provost), 2025 QCTA 126 *
Juridiction
Tribunal d'arbitrage (T.A.)
Type d'action
Griefs contestant une suspension (8 semaines). Accueillis en partie; la suspension est réduite à 4 semaines.
Décision de
Me Rosaire S. Houde, arbitre
Date
31 mars 2025
L'employeur, une université, reproche au plaignant, qui occupe le poste de professeur titulaire au département de microbiologie-infectiologie et d'immunologie de sa Faculté de médecine, d'avoir enfreint, à l'occasion de la conférence «Réinfo COVID Québec», la «Politique sur la conduite responsable en recherche et en création et innovation à l'Université Laval». La trame de fond des griefs est de nature scientifique. Il est question du «discours dominant» et du «consensus scientifique» entourant les mesures sanitaires et la vaccination pendant la pandémie de la COVID-19, ainsi que de l'autre point de vue, soit celui des personnes qui s'opposent aux vaccins et aux mesures sanitaires, dont le plaignant fait partie.
Décision
Le manque de rigueur et le biais de confirmation sont sans doute ce qui ressort le plus de la preuve, et particulièrement des propos du plaignant lui-même. Il a été démontré que le plaignant n'était pas dans une véritable quête de savoir, qu'il n'a pas traité les données à sa disposition avec la rigueur nécessaire et que cela a entraîné la diffusion non responsable de certaines informations inexactes, voire fausses. Le Tribunal souligne le caractère mensonger des propos tenus par le plaignant devant le Tribunal et un manque de sincérité, lequel explique le grand nombre d'atteintes à la rigueur. Il s'agit d'un manquement grave. Par ailleurs, demander de la rigueur à un scientifique n'est pas une atteinte démesurée à sa liberté d'expression. En effet, l'objectif de l'Université se rapporte à des préoccupations réelles dans une société libre et démocratique. Le moyen utilisé, c'est-à-dire le respect des principes énoncés dans la politique, paraît proportionnel à l'objectif de protéger la liberté universitaire et il ne peut être considéré que cela porte exagérément atteinte à la liberté d'expression ou empiète sur la liberté d'expression au point où celle-ci est niée. Il est possible de critiquer le discours dominant tout en restant rigoureux. Le noeud du différend se trouve dans la rigueur des propos, en l'occurrence de l'information transmise au grand public, ce qui relève de la liberté universitaire. Or, le Tribunal ne voit aucune atteinte à la liberté universitaire non plus. Celle-ci n'autorise pas un membre de l'établissement à dire n'importe quoi. Autrement, il en résulterait une perte de confiance du public envers les universitaires. Pour éviter cela, il faut protéger la liberté universitaire de toutes ses dérives. Cette responsabilité revient, en premier lieu, à ceux qui en sont titulaires. Retenant donc la gravité objective de la faute pour un scientifique d'expérience comme le plaignant, considérant l'utilisation de fausses données et le manque de sincérité des propos que cela révèle et, enfin, tenant compte de l'importance de la liberté universitaire et de la protection qu'elle exige, une sanction sévère s'impose. Par contre, la suspension imposée par l'employeur est démesurée pour une première faute et doit être réduite à 4 semaines.
Suivi
Pourvoi en contrôle judiciaire, 2025-05-02 (C.S.), 200-17-037480-258. Demande en rejet d'un pourvoi en contrôle judiciaire, 2025-05-22 (C.S.), 200-17-037480-258.