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Journées d’absence consécutives = perte d’ancienneté

L'employeur n'a pas agi de manière excessive ou déraisonnable en appliquant la clause de perte d'ancienneté, puis en fermant le dossier d'une infirmière qui a omis de justifier plusieurs journées consécutives d'absence avant de cesser de donner de ses nouvelles et de se présenter au travail.
13 novembre 2024

Intitulé

Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes et infirmiers auxiliaires de Laval (SIIIALCSQ) et Centre intégré de santé et de services sociaux de Laval (Isabelle Cloutier), 2024 QCTA 401

Juridiction

Tribunal d'arbitrage (T.A.)

Type d'action

Griefs contestant des avis écrits, une perte d'ancienneté et une fermeture de dossier. Rejetés. Grief réclamant des prestations d'assurance-salaire. Accueilli en partie.

Décision de

Me Natacha Lecompte, arbitre

Date

9 août 2024


La plaignante, une infirmière en hémato-oncologie, a perdu son ancienneté en septembre 2019 après avoir omis de justifier des absences survenues dans les jours précédents. Le mois suivant, l'employeur a fermé son dossier après qu'elle eut omis de justifier de nouvelles absences dans le délai imparti. Le syndicat soutient que l'employeur a traité le dossier de la plaignante de manière disciplinaire et qu'il doit donc démontrer avoir agi proportionnellement. Il réclame également des prestations d'assurance-salaire que la plaignante n'aurait pas reçues durant l'arrêt de travail ayant précédé sa fin d'emploi. L'employeur considère que la perte d'ancienneté et la fermeture du dossier constituaient des mesures administratives et que la plaignante a volontairement abandonné son emploi en ne lui donnant plus de nouvelles.

Décision

La plaignante effectuait un retour progressif au travail lorsqu'elle a pris ses vacances estivales. Elle devait revenir au travail le 25 août 2019, mais a dû s'absenter en raison d'un accident d'automobile. Elle n'en a avisé l'employeur que le lendemain. Le 28 août, elle a de nouveau avisé l'employeur de son absence et prétend avoir été informée qu'elle serait considérée comme en absence pour maladie tant qu'elle n'enverrait pas de billet médical. Or, ce n'est pas ce que son relevé de présence indique. Le 4 septembre, l'employeur a transmis un avis écrit demandant à la plaignante de fournir une pièce justificative pour ses absences depuis le 25 août. Le Tribunal estime que cet avis était de nature administrative puisque l'employeur n'a pas tenté de punir la plaignante pour ses absences non autorisées. Au contraire, il lui a accordé un délai supplémentaire pour justifier ses absences tout en précisant que sa justification serait examinée à la lumière de la clause de perte d'ancienneté. Le 6 septembre, la plaignante a transmis un billet médical daté du 4 septembre et lui prescrivant rétroactivement un arrêt de travail du 26 août au 22 septembre. Le 13 septembre, l'employeur a transmis une lettre avisant la plaignante de sa perte d'ancienneté. Cette lettre constitue une mesure administrative qui n'est que la suite logique de celle du 4 septembre. La plaignante s'est de nouveau absentée les 23 et 25 septembre, et ce, sans fournir d'avis ou d'excuse valable. Le 26 septembre, l'employeur lui a transmis un ultime avis lui demandant de justifier ces nouvelles absences, sans quoi il considérerait qu'elle avait abandonné son emploi. N'ayant reçu aucune justification de la plaignante, l'employeur a fermé son dossier le 4 octobre. Le Tribunal estime que la lettre du 26 septembre et la fermeture du dossier sont des mesures administratives.

Considérant les obligations du salarié et les droits de l'employeur prévus à la convention collective, il n'était pas déraisonnable ni excessif d'exiger un certificat médical dans l'avis du 4 septembre puisque la plaignante s'était absentée plusieurs fois sans autorisation depuis le 25 juin. Il en va de même du fait de l'avoir prévenue qu'elle risquait de perdre son ancienneté si elle omettait de justifier ses absences. L'avis du 4 septembre n'était pas excessif, déraisonnable ou arbitraire. Quant à l'avis du 13 septembre, relatif à la perte d'ancienneté, l'employeur n'a pas reconnu le billet médical du 4 septembre à titre de justification de l'absence du 26 août au 3 septembre puisqu'une politique prévoit qu'un médecin ne peut faire rétroagir le début d'une invalidité s'il n'a pas pu évaluer la condition médicale du salarié au moment où celui-ci allègue être malade. Rien ne démontre que la plaignante a été empêchée de consulter un médecin à compter de son absence du 25 août. L'employeur a démontré que cette dernière ne l'avait pas informé de son absence du 25 août, qu'elle n'avait pas fourni d'excuse valable à cet égard et qu'il n'avait pas accepté les justifications pour ses absences subséquentes. La plaignante s'étant absentée du travail 6 jours consécutifs sans avis ni excuse valable, la clause de perte d'ancienneté s'appliquait automatiquement. Le syndicat n'a pas démontré que l'employeur avait agi de manière excessive, déraisonnable ou arbitraire.

L'employeur n'a pas agi de manière excessive, déraisonnable ou arbitraire en transmettant l'avis du 26 septembre et en fermant le dossier de la plaignante. Son congé pour invalidité se terminait le 22 septembre, mais celle-ci s'est de nouveau absentée sans autorisation les 23 et 25 septembre. Le 26 septembre, la plaignante n'avait donné aucun signe de vie à l'employeur. Malgré la demande de ce dernier, elle n'a pas fourni le formulaire de réclamation de prestations d'assurance-salaire dans le délai imparti. Même s'il s'agit de ouï-dire qui ne fait pas preuve de son contenu, il appert que la plaignante a communiqué avec l'employeur le 3 octobre afin de signifier qu'elle ne voulait plus travailler tant qu'il ne lui restituerait pas son ancienneté. Le lendemain, l'employeur a décidé de fermer le dossier à partir des informations dont il disposait à ce moment. Le 14 octobre, la plaignante a transmis un certificat médical daté du 3 octobre prolongeant son invalidité du 23 septembre au 4 octobre. Elle avait peutêtre changé d'avis à la mi-octobre, mais il était trop tard. Considérant la conduite de la plaignante, rien ne permettait de conclure à autre chose qu'à une démission implicite de sa part.

La plaignante n'a pas droit aux prestations d'assurance-salaire pour les périodes pendant lesquelles elle était en absence non autorisée, soit du 25 août au 3 septembre ainsi qu'entre le 23 septembre et la fermeture de son dossier. Par ailleurs, l'employeur ayant accepté l'invalidité de la plaignante pour la période du 4 au 22 septembre, elle a droit aux prestations durant cette période.