- Qu’est-ce que le recours à l’encontre d’un congédiement sans cause juste et suffisante ?
- Quels sont les éléments que le salarié doit prouver concernant la question de la recevabilité d’une plainte déposée selon l’article 124 L.N.T. ?
- Que signifie l’expression « inexistence d’un autre recours valable » ?
- Quel est le délai pour déposer une plainte concernant un congédiement sans cause juste et suffisante ? Et s’agit-il d’un délai de rigueur ?
- Que signifie l’expression « croyance en un congédiement sans cause juste et suffisante » ?
- Qu’est-ce qu’un congédiement ?
- Qu’est-ce qu’un licenciement ?
- Qu’est-ce qu’un congédiement déguisé ?
- Dans quel cas le salarié peut-il déposer une plainte ? Est-ce en cas de congédiement ou en cas de licenciement ?
- Le salarié peut-il se plaindre d’un congédiement déguisé ?
- En cas de licenciement, le juge peut-il décider que les critères retenus par l’employeur pour faire le choix du salarié à licencier ne sont pas les bons ?
- Que signifie l’expression « cause juste et suffisante de congédiement » ?
- Quels exemples peut-on donner de ce que constitue une cause juste et suffisante de congédiement ?
- L’employeur peut-il imposer le congédiement au premier manquement ?
- L’employeur doit-il trouver un autre poste à l’employé concerné ou tenter de le replacer en cas de licenciement ?
- À qui revient le fardeau de prouver la cause juste et suffisante ?
- Quel est le délai pour déposer une plainte concernant un congédiement sans cause juste et suffisante ? Et s’agit-il d’un délai de rigueur ?
- Comment procéder au dépôt d’une plainte ?
- Est-ce que le salarié doit envoyer une mise en demeure à l’employeur avant d’entreprendre un recours ?
- Est-ce que le salarié peut se faire représenter par avocat ?
- Est-ce que la médiation est obligatoire ?
LES MESURES DE RÉPARATION - Quelles sont les mesures de réparations possibles si le tribunal casse la sanction prise par l’employeur à l’égard du salarié ?
- Quels sont les pouvoirs d’indemnisation du juge ?
- Comment établir le montant auquel a droit le salarié ?
- Le salarié a-t-il droit à d’autres mesures de réparation ?
17.1 Qu’est-ce que le recours à l’encontre d’un congédiement sans cause juste et suffisante ?
C’est un recours qui permet au salarié qui justifie de deux ans de service continu dans une même entreprise et qui croit avoir été congédié sans une cause juste et suffisante de soumettre une plainte par écrit à la CNESST dans les 45 jours de son congédiement, sauf si une procédure de réparation, autre que le recours en dommages-intérêts, est prévue ailleurs dans la Loi sur les normes, dans une autre loi ou dans une convention.
Ce recours crée également une voie de droit, interdisant le congédiement ou la cessation d’emploi d’un salarié, en l’absence de cause juste et suffisante, pourvu que celui-ci ait complété la durée de service requise. Cette norme du travail s’impose donc à tout contrat individuel à durée déterminée ou indéterminée et également aux conventions collectives de travail.
Elle déroge ainsi au principe traditionnel de la liberté contractuelle et elle restreint le pouvoir discrétionnaire de l’employeur de mettre fin, à son gré, à tout contrat de travail à durée indéterminée sous réserve d’un avis suffisant. La Loi sur les normes du travail crée aussi un recours auquel peut faire appel un salarié en cas de violation de la norme substantielle.
Ce recours permet donc à chaque salarié congédié d’obtenir l’exécution en nature de l’obligation de l’employeur, que ce soit par sa réintégration en milieu de travail ou par une compensation financière équivalente. Il a toutefois un caractère subsidiaire en ce qu’il ne peut être exercé devant le Tribunal administratif du travail qu’en l’absence d’une procédure de réparation équivalente prévue ailleurs dans la Loi sur les normes du travail, dans une autre loi ou dans une convention, et notamment une convention collective.
17.2 Quels sont les éléments que le salarié doit prouver concernant la question de la recevabilité d’une plainte déposée selon l’article 124 L.N.T. ?
Le salarié doit démontrer de façon préliminaire qu’il satisfait aux cinq exigences prévues par la loi pour que sa plainte soit jugée recevable au moment du dépôt, soit:
- qu’il est un salarié au sens de la Loi sur les normes du travail;
- qu’il croit avoir été l’objet d’un congédiement;
- qu’il justifie de deux ans de service continu;
- qu’il ne bénéficie pas d’une autre procédure de réparation à part le recours en dommages-intérêts;
- qu’il a déposé sa plainte dans le délai imparti de 45 jours prévu par la Loi sur les normes du travail.
17.3 Que signifie l’expression « inexistence d’un autre recours valable » ?
Elle signifie qu’il ne doit pas exister une autre procédure disponible pour le salarié. Dans les faits, la procédure de réparation équitable et acceptable doit être constatée par écrit et être connue des parties. Elle doit contenir les noms et qualités de celles-ci, la désignation des décideurs et l’objet des litiges sujets à cette procédure. Enfin, elle doit préciser la compétence et les pouvoirs du décideur et le délai imposé à celui-ci pour rendre sa décision.
L’autre procédure de réparation doit permettre d’ordonner la réintégration ou le paiement d’une indemnité, ou encore les deux. Cette procédure doit pouvoir donner les mêmes résultats avec la même objectivité et la même impartialité.
17.4 Quel est le délai pour déposer une plainte concernant un congédiement sans cause juste et suffisante? Et s’agit-il d’un délai de rigueur ?
Le délai pour déposer une plainte est de 45 jours et c’est un délai de rigueur, donc de déchéance, qui s’impose d’office au juge.
La date du point de départ du délai accordé au salarié pour déposer sa plainte est celle où la cessation de travail devient effective, ou encore le moment où le salarié prend connaissance ou aurait dû prendre connaissance du fait que l’employeur ne désirait plus ses services.
17.5 Que signifie l’expression « croyance en un congédiement sans cause juste et suffisante » ?
La croyance en un congédiement est subjective, le plaignant ayant la latitude nécessaire pour qualifier lui-même la situation dans laquelle il se trouve. La loi telle que rédigée permet au salarié concerné de qualifier lui-même dès le départ la situation ou la position dans laquelle il se trouve.
Le plaignant doit établir juridiquement sa croyance personnelle à l’effet qu’il a été congédié sans cause juste et suffisante. L’employeur a le fardeau de démontrer le contraire.
17.6 Qu’est-ce qu’un congédiement ?
Le terme «congédiement» n’est pas défini dans la loi, mais il ne vise que les ruptures du lien d’emploi qui sont causées par des motifs subjectifs et liés aux caractéristiques propres du salarié. Le terme «congédiement» comprend toute forme de rupture du lien d’emploi, qu’elle soit de nature disciplinaire ou administrative.
Le congédiement est d’abord et avant tout le renvoi d’un salarié par l’employeur; il y a donc congédiement lorsque l’employeur décide unilatéralement de mettre fin de façon définitive au contrat de travail qui le liait jusque-là à l’employé.
La notion de congédiement implique que l’employeur a toujours besoin des services que lui rendait le salarié, mais qu’il ne désire plus que ces services soient rendus par le salarié qu’il a congédié.
La réalité du congédiement administratif renvoie aux situations de mise à pied (possibilité de retour au travail) ou de licenciement (non-possibilité de retour au travail).
17.7 Qu’est-ce qu’un licenciement ?
Le licenciement, ou le congédiement administratif, n’est pas non plus défini dans la loi, mais l’on peut affirmer qu’il est fondé sur des motifs et objectifs reliés à l’entreprise, telle la diminution de la vitalité économique, la réorganisation administrative ou l’inadéquation entre le profil de l’emploi et celui de l’individu en cause.
La réalité du congédiement administratif renvoie aux situations de mise à pied (possibilité de retour au travail) ou de licenciement (non-possibilité de retour au travail).
17.8 Qu’est-ce qu’un congédiement déguisé ?
Lorsque l’employeur décide unilatéralement de modifier de façon substantielle les conditions du contrat de travail du salarié et que celui-ci n’accepte pas les modifications et quitte son emploi, son départ constitue non pas une démission, mais un véritable congédiement. Compte tenu de l’absence de congédiement formel de la part de l’employeur, on qualifie cette situation de «congédiement déguisé».
De plus, il est établi que la conduite de l’employeur constitue un congédiement déguisé lorsqu’elle traduit généralement son intention de ne plus être lié par le contrat. Les tribunaux ont statué qu’on pouvait conclure au congédiement déguisé du salarié sans invoquer la violation d’une condition particulière du contrat de travail lorsque le comportement de l’employeur vis-à-vis du salarié avait rendu la situation intolérable au travail.
Dans ce cas, la démarche est nécessairement rétrospective dans la mesure où il faut tenir compte de l’effet cumulatif des actes antérieurs de l’employeur et déterminer si ces actes étaient ou non la manifestation de son intention de ne plus être lié par le contrat.
Selon le premier volet du critère applicable au congédiement déguisé, celui qui s’attache aux clauses précises du contrat, deux conditions doivent être satisfaites: en premier lieu, la modification unilatérale apportée par l’employeur doit constituer une violation du contrat de travail; deuxièmement, s’il s’agit d’une violation, elle doit modifier substantiellement une condition essentielle du contrat.
Souvent, le respect de la première condition requiert peu d’analyse, car la violation est patente. Cependant, lorsque la violation est moins évidente, ce qui arrive fréquemment dans le cas d’une suspension, une analyse poussée peut s’imposer. Cette première étape de l’analyse exige du tribunal qu’il se prononce objectivement sur l’existence d’une violation. Il lui faut alors examiner si l’employeur a modifié unilatéralement le contrat.
Lorsqu’une stipulation expresse ou tacite autorise l’employeur à apporter la modification, ou que le salarié consent à celle-ci, il ne s’agit pas d’un acte unilatéral, de sorte qu’il n’y a pas de violation ni, par conséquent, de congédiement déguisé. En outre, pour constituer une violation, la modification doit être préjudiciable au salarié.
Cette première étape se distingue du second volet dont l’objet est de déterminer si la violation revêt ou non un caractère substantiel, même si les tribunaux saisis d’une allégation de congédiement déguisé confondent souvent les deux.
Une fois la violation objectivement établie, le tribunal doit alors se demander en second lieu si, au moment où la violation a eu lieu, une personne raisonnable, se trouvant dans la même situation que le salarié, aurait considéré qu’il s’agissait d’une modification substantielle des conditions essentielles du contrat de travail. La violation mineure, celle qui ne pourrait être considérée comme ayant modifié substantiellement une condition essentielle du contrat, n’équivaut pas à un congédiement déguisé.
17.9 Dans quel cas le salarié peut-il déposer une plainte ? Est-ce en cas de congédiement ou en cas de licenciement ?
Le recours n’est disponible au salarié qu’en cas de congédiement. Il n’est pas ouvert en cas de licenciement.
Lorsque la mesure imposée par l’employeur est de nature administrative, tel un licenciement pour un motif économique ou à cause d’une réorganisation de l’entreprise, le rôle du juge se limite à vérifier la rigueur du processus suivi. Ainsi, à moins qu’il ne s’agisse d’une mesure disciplinaire camouflée en mesure administrative, le juge ne peut que maintenir ou annuler la décision, après avoir vérifié qu’elle n’est ni arbitraire, ni discriminatoire, ni déraisonnable.
17.10 Le salarié peut-il se plaindre d’un congédiement déguisé ?
Il revient au juge de déterminer si la décision de l’employeur est un licenciement ou un congédiement déguisé. Pour ce faire, le juge est autorisé à se pencher sur les critères de sélection utilisés par l’employeur. S’ils sont raisonnables, ils ne sont pas indicatifs d’un congédiement déguisé; s’ils ne le sont pas, ils constituent un indice. Si le juge conclut qu’il s’agit d’un licenciement et non d’un congédiement, sa compétence est épuisée et il doit rejeter la plainte du salarié sans se pencher sur la sélection des employés.
17.11 En cas de licenciement, le juge peut-il décider que les critères retenus par l’employeur pour faire le choix du salarié à licencier ne sont pas les bons ?
Pour décider si la terminaison d’emploi est un congédiement ou un licenciement, le juge est autorisé à se pencher sur les critères de sélection de l’employeur. S’ils sont raisonnables, ils ne sont pas indicatifs d’un congédiement déguisé. S’ils ne le sont pas, ils en sont toutefois un indice. Dans l’examen que le juge peut faire des motifs de sélection pour déterminer s’il s’agit d’un congédiement ou d’un licenciement, il ne peut jamais imposer ses propres critères. Il peut seulement s’assurer que les motifs déclarés sont réels et non des prétextes destinés à camoufler un dessein illégal.
17.12 Que signifie l’expression « cause juste et suffisante de congédiement » ?
Cette expression n’est pas définie dans la loi, mais il est bien établi que les mots «juste et suffisante» signifient qu’il doit exister une cause qui, selon le juge, est suffisamment importante pour justifier un congédiement. En d’autres termes, il n’y a pas de cause juste et suffisante si, dans l’esprit du juge, le congédiement est une sanction disproportionnée par rapport à la faute.
La notion de cause juste et suffisante implique des motifs sérieux telles la malhonnêteté, l’insubordination ou la négligence grossière et non seulement l’incompétence, surtout lorsque l’emploi est occupé depuis longtemps.
Elle est associée au comportement fautif du salarié ou à son incapacité à remplir ses fonctions. Elle est aussi reliée à la faute grave, ou à une accumulation de manquements à la discipline. La cause peut également être reliée à l’employeur, telle une réorganisation de l’entreprise ou des difficultés économiques.
17.13 Quels exemples peut-on donner de ce que constitue une cause juste et suffisante de congédiement ?
Il existe une véritable multitude de causes justes et suffisantes de congédiement. Chaque cas est un cas d’espèce et doit être jugé selon les faits et les circonstances de chacune des situations.
Des exemples de causes justes et suffisantes sont: l’absence de motivation, l’attitude et le comportement insatisfaisants, l’absentéisme et les retards, les activités de pression, la prise d’alcool et de drogue, les assauts et les menaces, le fait de développer une attitude négative, de se placer en situation de conflit d’intérêts ou de dormir au travail, le harcèlement psychologique et les manquements aux règlements de l’entreprise.
17.14 L’employeur peut-il imposer le congédiement au premier manquement ?
L’objectif visé par la sanction disciplinaire est d’inciter le salarié à corriger sa conduite ou à modifier son comportement, et c’est uniquement lorsque des sanctions moins sévères ont été imposées sans succès qu’il faut appliquer la sanction disciplinaire définitive qu’est le congédiement.
La règle de la gradation des sanctions a pour objectif d’informer l’employé des difficultés rencontrées et des attentes à son égard. Il n’y a pas d’automaticité dans la façon de graduer les sanctions. La sanction imposée doit être proportionnelle à la fois au manquement reproché, tenant compte du dossier disciplinaire, et à l’objectif de l’amener à modifier son comportement. Chaque cas est donc un cas d’espèce. Toutefois, la règle n’exige pas que les fautes reprochées, notamment le dernier incident, soient similaires aux précédentes.
Le salarié doit connaître les objectifs précis de l’employeur, son insatisfaction; il doit bénéficier d’une période de temps raisonnable pour faire preuve d’amélioration, et avoir reçu un avertissement suivant lequel son omission de s’améliorer entraînera son congédiement.
En l’absence de sanctions disciplinaires progressives, seule une faute grave autorise le congédiement.
17.15 L’employeur doit-il trouver un autre poste à l’employé concerné ou tenter de le replacer en cas de licenciement ?
Actuellement, la jurisprudence est divergente à ce propos. Toutefois, l’on peut affirmer que pour justifier un licenciement fondé sur des motifs économiques, l’employeur doit établir l’incapacité du salarié licencié à effectuer d’autres tâches et à occuper d’autres postes. De plus, il doit au minimum offrir un autre poste à ce salarié.
Il est bon de mentionner que l’employeur doit offrir au salarié le travail à temps partiel avant de l’offrir à quelqu’un d’autre. Le fait de ne pas offrir le poste à temps partiel au salarié licencié peut équivaloir à un congédiement.
Enfin, le juge a compétence pour conclure que l’employeur doit tenter de replacer un salarié dans le cadre d’une réorganisation administrative ou de difficultés financières.
17.16 À qui revient le fardeau de prouver la cause juste et suffisante ?
Il revient à l’employeur d’établir une cause juste et suffisante de congédiement ainsi que la nature du renvoi.
La question du fardeau de preuve doit se comprendre ainsi: le plaignant doit s’acquitter d’une preuve préliminaire se limitant à soutenir sa prétention à l’effet qu’il a été congédié sans cause juste et suffisante.
Par la suite, le fardeau de démontrer que le congédiement est fondé sur une cause juste et suffisante repose sur les épaules de l’employeur. Si une telle démonstration est complétée selon le degré de preuve requis, le plaignant a alors le fardeau de contredire ou d’affaiblir la preuve de l’employeur, par exemple en démontrant que les actes reprochés n’ont pas été commis par lui ou qu’il existe des circonstances atténuantes.
Par ailleurs, en cas de licenciement, à partir du moment où l’employeur fait la preuve à la fois des sérieuses difficultés économiques auxquelles il a fait face et de la nécessité d’abolir des postes, le fardeau de la preuve repose alors sur les épaules du salarié de démontrer que, contrairement aux apparences, la fin de son emploi était fondée sur des critères partiaux, illicites ou discriminatoires.
17.17 Quel est le délai pour déposer une plainte concernant un congédiement sans cause juste et suffisante? Et s’agit-il d’un délai de rigueur ?
Le délai pour déposer une plainte est de 45 jours et c’est un délai de rigueur, donc de déchéance, qui s’impose d’office au juge.
De plus, la loi mentionne que la computation du délai de 45 jours pour porter plainte débute à partir du moment où la personne croit qu’elle a commencé à être victime d’un congédiement. Cette croyance doit être appréciée sous l’angle d’une personne raisonnable qui, informée de la position de l’employeur, serait d’avis qu’elle est l’objet d’une sanction. Par exemple, dans le cas du refus d’autoriser un retour au travail suivant une mise à pied temporaire, le délai débute lorsque le salarié en a connaissance.
17.18 Comment procéder au dépôt d’une plainte ?
Le dépôt d’une plainte peut se faire directement sur le site Internet de la CNESST par le salarié lui-même. Ou encore, le salarié peut se rendre dans l’un des bureaux de la CNESST pour déposer la plainte en personne. Dans tous les cas, il faut conserver une copie de la plainte et plus particulièrement la preuve de la date du dépôt de celle-ci.
17.19 Est-ce que le salarié doit envoyer une mise en demeure à l’employeur avant d’entreprendre un recours ?
C’est la CNESST qui peut prendre en charge le dossier complet pour le bénéfice du salarié. Avant d’envoyer une communication, elle procède à une forme d’enquête pour établir s’il y a un fondement à la plainte, le cas échéant.
17.20 Est-ce que le salarié peut se faire représenter par avocat ?
Lorsqu’il s’agit d’un recours à l’encontre d’une pratique interdite, la CNESST peut fournir les services juridiques nécessaires et peut entreprendre le recours, le cas échéant. Les services sont alors sans frais pour le salarié. Le salarié peut aussi se faire représenter par l’avocat de son choix, en retenant les services d’un avocat qui pratique au privé.
17.21 Est-ce que la médiation est obligatoire ?
Non, la médiation offerte par la CNESST et par le Tribunal administratif du travail n’est pas obligatoire. La médiation est toujours volontaire. L’expérience nous enseigne qu’il arrive souvent que les dossiers soient réglés par le biais de la médiation. Il s’agit d’un service sans frais offert par la CNESST et qui a comme avantage de pouvoir régler rapidement une affaire. Cependant, il faut bien comprendre que dans le processus de la médiation, tout le monde doit «mettre de l’eau dans son vin», comme le dit si bien l’adage.
À savoir ! |
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La notion de cause juste et suffisante n’est pas définie dans la loi. Toutefois, il est établi que les mots «juste et suffisante» signifient qu’il doit exister une cause qui, selon le juge, est suffisamment importante pour justifier un congédiement. |
À retenir ! |
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Le recours est accessible au salarié uniquement en cas de congédiement sans cause juste et suffisante. Il ne s’applique pas en cas d’abolition de poste, de licenciement, de à mise à pied causée par des motifs économiques, etc. |
Attention ! |
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Avant d’en venir à la mesure drastique qu’est le congédiement, l’employeur doit appliquer le principe de la gradation progressive des peines imposées. Toutefois, il existe des situations où l’employeur peut passer outre à ce principe. |
LES MESURES DE RÉPARATION
17.22 Quelles sont les mesures de réparations possibles si le tribunal casse la sanction prise par l’employeur à l’égard du salarié ?
Lorsqu’un juge conclut à l’existence d’un congédiement sans cause juste et suffisante et à l’absence de faute de la part de l’employé, la réparation qui s’impose d’emblée est la réintégration.
Celle-ci s’impose à moins que les circonstances propres au dossier n’indiquent d’une façon prépondérante que la réintégration du salarié aurait pour effet de créer un climat de tension susceptible de perturber d’une manière réelle et significative les activités normales de l’employeur. Elle n’est pas appropriée lorsqu’elle risque de causer un ensemble de problèmes, tant pour le salarié que pour l’employeur.
17.23 Quels sont les pouvoirs d’indemnisation du juge ?
Un juge bénéficie de larges pouvoirs de réparation pour indemniser le salarié injustement congédié.
Les dispositions de la loi indiquent clairement que le tribunal ne peut accorder un montant supérieur à celui du salaire qui aurait été gagné en l’absence du congédiement, mais il peut accorder moins. Cette façon d’exprimer les choses impose à celui-ci de faire un exercice qui tient compte de la situation réelle du salarié pendant la période allant du congédiement à la réintégration.
Par exemple, si le salarié, pendant cette période, a travaillé chez un autre employeur, on déduira le salaire qu’il a gagné chez ce dernier du montant de l’indemnité. On tient compte aussi du fait que le salarié, durant cette période, a pu connaître des phases d’inaptitude au travail. Inversement, on tiendra compte des augmentations salariales octroyées dans l’entreprise, s’il en est, de la bonification des avantages sociaux pendant la période, etc.
Il ne s’agit pas, en effet, de surindemniser ou de sous-indemniser le salarié, mais de mesurer sa véritable perte, en faisant comme si le lien d’emploi n’avait jamais été rompu, tout en tenant compte des aléas qui l’affectent inévitablement. L’exercice, bien sûr, comporte sa part d’incertitude et d’imprécision, mais cherche à s’approcher d’aussi près que possible de ce qu’aurait été la situation du salarié en l’absence du congédiement.
17.24 Comment établir le montant auquel a droit le salarié ?
Dans l’établissement de l’indemnité à accorder au salarié, il faut tenir compte du contexte de l’engagement, de la durée de l’emploi, de la nature et de l’importance du poste détenu, de l’âge du plaignant, de sa conduite, de ses qualifications particulières, de la possibilité qu’il se retrouve un travail et des démarches accomplies pour ce faire.
La règle «un mois de salaire par année de service» ne tient pas en droit du travail et paraît tout à fait arbitraire. En effet, le juge exerce des pouvoirs judiciaires, c’est-à-dire qu’il doit juger uniquement le cas dont il est saisi et à partir de la preuve qui lui est soumise.
17.25 Le salarié a-t-il droit à d’autres mesures de réparation ?
Dans le contexte d’un congédiement fait sans cause juste et suffisante, la juge a le pouvoir de rendre toute autre décision juste et raisonnable compte tenu de toutes les circonstances de l’affaire.
L’expression «toute autre décision qui lui paraît juste et raisonnable» confère au juge une discrétion très large pour compenser les conséquences du congédiement injuste. Toutefois, il est impératif de préciser que discrétion ne veut pas dire arbitraire. Le juge, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, doit tenir compte des règles de droit applicables. Le droit du travail n’est pas une abstraction en vase clos et n’est pas autonome au point d’être coupé de toute réalité juridique.
Par exemple, la loi accorde au juge le pouvoir de modifier la sanction disciplinaire imposée par l’employeur, lorsqu’il est d’avis qu’il y a disproportion entre la faute et la sanction.
Il est aussi possible de compenser le plaignant pour la perte de son emploi, lorsqu’il n’y a pas de réintégration, ou encore pour la perte du droit au recours du congédiement sans cause juste et suffisante. Dans ce cas, le juge ordonne le versement d’un montant forfaitaire.
Les critères généralement retenus dans l’appréciation de l’octroi d’une indemnité pour perte d’emploi sont entre autres: la nature de l’emploi occupé, la possibilité d’occuper à nouveau un tel emploi, les années de service de la personne, son âge, son expérience, sa scolarité et les représentations faites par l’employeur.
Une pratique jurisprudentielle se dégage d’un bon nombre de décisions: accorder un mois de salaire par année de travail effectivement accompli dans le contexte où le salarié renonce à être réintégré dans son emploi.
Il existe aussi la possibilité pour un juge d’indemniser un salarié injustement congédié des manières suivantes :
- Des dommages exemplaires, qui peuvent être octroyés lorsque les gestes de l’employeur constituent une atteinte illicite et intentionnelle aux droits du salarié;
- Des dommages non pécuniaires ou moraux si l’employeur a utilisé un comportement vexatoire, empreint de mauvaise foi, ou a eu simplement une conduite abusive;
- Le remboursement des honoraires professionnels et des frais réclamés, lorsqu’ils sont raisonnables;
- Les frais de recherche d’emploi, qui constituent une perte pour laquelle un salarié injustement congédié peut être indemnisé;
- Pour la perte des avantages de retraite;
- L’indemnité de vacances à laquelle un salarié aurait eu droit;
- Pour la valeur de l’automobile qui était fournie par l’employeur;
- Une somme compensant le préjudice fiscal que subirait le plaignant en recevant une indemnité au cours de la même année, qui peut être octroyée par le juge. Cependant, ce préjudice ne doit pas être qu’une hypothèse;
- Pour les pertes salariales résultant de l’occupation d’un emploi moins bien rémunéré à la suite d’un congédiement injuste;
- Une indemnité pour le coût de remplacement des bénéfices d’assurances.