Chapitre I
- Quelle est l’origine de la protection contre le harcèlement psychologique et sexuel au travail ?
- Quel est l’objectif premier de la protection contre le harcèlement psychologique et sexuel au travail ?
- Quelle est la portée de cette protection ?
- Qui a droit à la protection en cas de harcèlement psychologique et sexuel au travail ?
- Quelle est la définition du harcèlement psychologique et sexuel au sens des dispositions de la Loi sur les normes du travail ?
- De façon plus spécifique, qu’est-ce que le harcèlement psychologique au sens des dispositions de la Loi sur les normes du travail ?
- Est-ce que le harcèlement lié à de la discrimination est aussi visé ?
- Quels sont les droits du salarié en lien avec le harcèlement psychologique au travail ?
- Quels sont les éléments à prouver pour démontrer la présence du harcèlement psychologique au sens des dispositions de la Loi sur les normes du travail ?
- De façon plus précise, quels sont les éléments à prouver en cette matière ?
- Pour déterminer si les allégations de harcèlement psychologique sont justifiées, quels sont les éléments qui doivent être pris en considération ?
- Qu’est-ce que le modèle subjectif/objectif ?
- Que vise le harcèlement psychologique et comment il engage la responsabilité de l’employeur ?
- Qu’est-ce qui ne constitue pas du harcèlement psychologique ?
- Qu’est-ce qu’une conduite vexatoire ?
- Pourquoi doit-on tenir compte du critère de la personne raisonnable ?
- Pourquoi la conduite vexatoire doit s’apprécier de façon objective en fonction de la personne raisonnable, normalement diligente et prudente, placée dans les mêmes circonstances ?
- De quel point de vue apprécie-t-on le harcèlement psychologique ?
- Pourquoi doit-on tenir compte de la version du salarié plaignant, et en fonction de quels critères ?
- Est-ce que la conduite reprochée doit être illégale, prohibée ou déraisonnable pour constituer du harcèlement psychologique ?
- Doit-on prouver la mauvaise foi ou l’intention de nuire de la personne visée pour qualifier une situation de harcèlement psychologique ?
- De quelle façon se manifeste la conduite vexatoire chez une personne ?
- Est-ce que l’on doit tenir compte, en matière de harcèlement psychologique, des caractéristiques personnelles du salarié ?
- Quelles sont les obligations des parties concernant le harcèlement psychologique en mode télétravail ?
- Quelles sont les obligations de l’employeur en matière de harcèlement psychologique ?
- Est-ce que l’employeur est responsable du fait d’un tiers ?
1.1 Quelle est l’origine de la protection contre le harcèlement psychologique et sexuel au travail?
Il faut bien comprendre avant tout que la notion de harcèlement psychologique en milieu de travail n’est pas nouvelle et a fait l’objet de plusieurs décisions arbitrales antérieures à l’adoption du texte de la Loi sur les normes du travail, particulièrement dans le domaine des relations de travail. Toutefois, même si cette notion n’est pas nouvelle en droit du travail, c’est depuis 2004 qu’elle est clairement encadrée par cette loi. Ses dispositions envoient un puissant signal: l’assurance d’un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique qui devient alors une norme minimale de travail. Elles s’appliquent à tout salarié, même les cadres supérieurs, et à tout employeur. On voit donc ainsi l’importance qu’accorde le législateur à ce sujet. Ces dispositions s’inscrivent dans la foulée d’autres mesures adoptées par celui-ci, qui concernent la protection du salarié.
1.2 Quel est l’objectif premier de la protection contre le harcèlement psychologique et sexuel au travail?
Vous devez savoir que l’objectif de l’adoption des dispositions de la Loi sur les normes du travail concernant le harcèlement psychologique est d’assainir le milieu de travail, et non pas d’éliminer le problème par l’exclusion de la victime des lieux du travail. Les dispositions sur le harcèlement psychologique n’ont pas été édictées pour assurer un milieu de travail idéal et exemplaire. Il ne s’agit pas d’imposer une norme de conduite «angélique» aux personnes au travail. En effet, il peut y avoir présence de comportements qui ne sont pas appropriés, comme le manque de politesse ou des sautes d’humeur, mais cela ne constitue pas nécessairement du harcèlement psychologique. Il faut faire la distinction entre les différentes situations.
1.3 Quelle est la portée de cette protection?
Il faut bien comprendre que le harcèlement psychologique ou sexuel auquel font référence les dispositions de la loi ne se limite pas à la situation où une ou plusieurs victimes, prises individuellement, ont subi des gestes vexatoires répétitifs. Il comprend aussi la conduite d’un salarié qui porte atteinte à plusieurs victimes successivement, même si chacune d’elles n’est pas nécessairement l’objet, individuellement, de gestes vexatoires répétés. Dans les faits, la loi vise toutes les situations de harcèlement psychologique et sexuel au travail, peu importe quelle en est la source ou qui en est la cause et peu importe qui en est la victime, pourvu que cette dernière soit un salarié de l’entreprise de son employeur.
1.4 Qui a droit à la protection en cas de harcèlement psychologique et sexuel au travail?
Il faut savoir que tous les salariés au sens de la Loi sur les normes du travail ont droit à la protection prévue par la loi, y compris le cadre supérieur. En effet, même si celui-ci est exclu de la plupart des protections, il bénéficie de celle-ci et de certaines autres protections spécifiques. De plus, le législateur a inclus dans cette protection tous les salariés visés ou non par une convention collective, en décrétant que les dispositions de la Loi sur les normes du travail encadrant le harcèlement psychologique font partie intégrante de toute convention collective. En somme, la protection de la loi s’applique à toutes les personnes salariées de l’entreprise, et ce, peu importe l’échelon dans lequel elles se situent.
1.5 Quelle est la définition du harcèlement psychologique et sexuel au sens des dispositions de la Loi sur les normes du travail?
Il est important de savoir et de comprendre que la Loi sur les normes du travail définit cette notion de la façon suivante, soit: Une conduite vexatoire se manifestant par des comportements, des paroles, des actes ou des gestes répétés, qui sont hostiles ou non désirés, laquelle porte atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique d’un membre du personnel et qui entraîne, pour celui-ci, un milieu de travail néfaste. Le harcèlement psychologique comprend également une conduite qui se manifeste par de telles paroles ou de tels gestes à caractère sexuel.
On ajoute aussi la précision suivante, soit: Une seule conduite grave peut aussi constituer du harcèlement psychologique si elle porte atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique d’un membre du personnel et produit un effet nocif continu pour celui-ci.
La définition de «harcèlement psychologique» réfère invariablement à l’examen des comportements des autres employés et de l’employeur, et cette définition conduit inévitablement à évaluer si ces personnes ont eu des conduites ou des comportements vexatoires. Cette définition ne fait pas de distinction, à savoir si les gestes ou les comportements allégués visent particulièrement la personne qui se dit harcelée, son voisin ou un groupe de personnes.
1.6 De façon plus spécifique, qu’est-ce que le harcèlement psychologique au sens des dispositions de la Loi sur les normes du travail?
Il y a eu au fil des ans de nombreuses décisions rendues en cette matière et il y a eu beaucoup d’écrits pour tenter de cerner le sens de la définition proposée. Sans entrer dans les méandres de tous les détails, l’on peut affirmer que pour que les dispositions de la Loi sur les normes du travail sur le harcèlement psychologique s’appliquent, cinq critères doivent être rencontrés: 1) une conduite vexatoire; 2) qui se manifeste de façon répétitive; 3) de manière hostile et non désirée; 4) qui porte atteinte à la dignité ou à l’intégrité du salarié; 5) qui entraîne un milieu de travail néfaste.
L’on peut aussi tenter de résumer l’état actuel du droit de la façon suivante, soit: en ce qui concerne le harcèlement, l’on ne peut exiger que la conduite vexatoire se manifeste par des agissements eux-mêmes vexatoires. En effet, retenir une telle démarche pourrait écarter de l’analyse des éléments pertinents jugés anodins et occulter ainsi une situation de véritable harcèlement. Relativement au critère de la répétition, des gestes qui, au départ, sont anodins, plus ou moins graves, peuvent, à la suite de leur accumulation, produire les conséquences néfastes du harcèlement. De plus, il n’est pas nécessaire que les gestes qui constituent le harcèlement soient incessants.
Quant aux actes non désirés, ils font référence à des gestes non nécessairement hostiles, mais dont on peut aisément se passer. Par voie de conséquence, il faut considérer l’ensemble des circonstances pour conclure aux gestes non désirés, car le contexte, le milieu et la culture du travail comptent pour beaucoup dans l’évaluation de ce qui est acceptable dans un milieu de travail donné.
Également, il existe une distinction fondamentale entre l’atteinte à la dignité et l’atteinte à l’intégrité physique ou psychologique. La première ne commande pas la preuve de séquelles qui se perpétuent, au contraire de la seconde. Par conséquent, le fardeau de la preuve est différent dans une situation ou dans une autre.
Un milieu de travail néfaste est donc un milieu défavorable pour le salarié, dans lequel il ne peut s’épanouir ni se réaliser. Celui-ci est créé non pas par le travail en soi, mais par les actions répétées qui constituent la conduite vexatoire, actions qui alourdissent le climat, lequel devient malheureux et inhospitalier.
Le décideur doit donc être prudent lorsqu’il apprécie les faits, car plusieurs situations, tels les conflits de personnalités, les malentendus, le stress et les conflits non réglés, peuvent être la source de plaintes de harcèlement, alors que, en réalité, les faits ne rencontrent pas les conditions nécessaires à l’établissement du harcèlement psychologique.
Enfin, dans le cas où une seule conduite grave est alléguée, la loi précise que la conduite reprochée doit avoir entraîné un effet nocif continu sur le salarié. Dans tous les cas, il suffit qu’un seul de ces critères ne soit pas rencontré pour que la plainte soit rejetée.
1.7 Est-ce que le harcèlement lié à de la discrimination est aussi visé?
Il est reconnu que la définition du harcèlement psychologique et sexuel au sens des dispositions de la Loi sur les normes du travail comprend aussi le harcèlement lié à de la discrimination pour un des motifs contenus à l’article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, c’est-à-dire:
- la race;
- la couleur;
- le sexe;
- l’identité ou l’expression de genre;
- la grossesse;
- l’orientation sexuelle;
- l’état civil;
- l’âge, sauf dans la mesure prévue par la loi;
- la religion;
- les convictions politiques;
- la langue, l’origine ethnique ou nationale;
- la condition sociale;
- le handicap ou l’utilisation d’un moyen pour pallier ce handicap.
1.8 Quels sont les droits du salarié en lien avec le harcèlement psychologique au travail?
Il y a plusieurs droits du salarié qui découlent de l’application du contrat de travail et de cette loi, par exemple, le droit de voir protégées par l’employeur sa santé, sa sécurité et sa dignité au travail, mais le droit le plus important découlant de la Loi sur les normes du travail est celui qu’a tout salarié à un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique. Les dispositions de la Loi sur les normes du travail qui interdisent le harcèlement psychologique n’ont pas pour objectif de punir l’auteur du harcèlement; elles visent à éliminer l’atteinte illicite à la dignité ou à l’intégrité des personnes qui en sont victimes. On a donc imposé à l’employeur l’obligation de prendre les moyens raisonnables afin de prévenir ou de faire cesser toute forme de harcèlement psychologique au travail. Ainsi, sa responsabilité est engagée lorsqu’un cadre ou un salarié sous sa direction s’adonne à une forme de harcèlement répondant à la définition prévue par les dispositions de la loi, et ce, sans égard à l’intention malveillante du harceleur. C’est en tenant compte du contexte et de la situation d’ensemble que les faits et gestes mis en preuve doivent être appréciés par le décideur.
Principalement, chaque salarié a le droit de travailler dans un milieu exempt de harcèlement psychologique. Ce droit a un corollaire, l’employeur doit prendre les moyens raisonnables afin de prévenir et de faire cesser le harcèlement psychologique au travail. Les obligations qui incombent à celui-ci sont, dans les faits, des obligations de moyens.
Par voie de conséquence, non seulement l’employeur est tenu de prendre tous les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement psychologique au travail et y mettre fin, mais il doit aussi agir avec prudence et diligence. Si l’employeur manque à son devoir de fournir un milieu de travail sain et exempt de harcèlement, il ne respecte pas toutes ses obligations, il engage nécessairement sa responsabilité et sera ainsi tenu d’indemniser la victime.
De plus, l’adoption d’une politique de prévention et de gestion du harcèlement constitue une mesure d’exonération de l’employeur. Toutefois, il est tenu de l’appliquer correctement et rigoureusement. Ainsi, même en présence d’une politique qui remplit les critères d’efficacité recherchés, sa conduite est déterminante dans l’établissement des redressements. L’employeur est tenu d’agir dès qu’il a connaissance d’une conduite indésirable de la part d’une personne. Il ne doit pas attendre le dépôt d’une plainte officielle en harcèlement psychologique ni se réfugier derrière sa politique.
1.9 Quels sont les éléments à prouver pour démontrer la présence du harcèlement psychologique au sens des dispositions de la Loi sur les normes du travail?
Dans tous les cas le plaignant doit démontrer tous les éléments suivants :
- Pour la conduite vexatoire, soit:
- Que cette conduite est humiliante, offensante ou abusive pour la personne qui la subit;
- Qu’elle blesse la personne dans son amour-propre et l’angoisse;
- Qu’elle dépasse ce qu’une personne raisonnable estime correct dans le cadre de son travail.
- Pour le caractère répétitif, soit:
- Que considérés isolément, une parole, un geste, un comportement peuvent sembler anodins. Mais c’est l’accumulation de celles-ci ou l’ensemble de ces conduites qui peut devenir du harcèlement.
- Pour les paroles, gestes, comportements hostiles ou non désirés, soit:
- Que les paroles, les gestes ou les comportements reprochés doivent être perçus comme hostiles ou non désirés. S’ils sont à caractère sexuel, ils pourraient être reconnus comme du harcèlement même si la victime n’a pas exprimé clairement son refus.
- Pour l’atteinte à la dignité ou à l’intégrité, soit:
- Que le harcèlement psychologique a un impact négatif sur la personne;
- Que la victime peut se sentir diminuée, dévalorisée, dénigrée tant sur le plan personnel que professionnel;
- Que la santé physique de la personne harcelée peut aussi en souffrir.
- Pour le milieu de travail rendu néfaste, soit:
- Que le harcèlement psychologique rend le milieu de travail néfaste pour celui qui en est victime. Le harcelé peut, par exemple, être isolé de ses collègues à cause de paroles, de gestes ou de comportements hostiles à son endroit ou à son sujet.
1.10 De façon plus précise, quels sont les éléments à prouver en cette matière?
Mentionnons de façon plus précise et détaillée que le premier élément à prouver est celui de la preuve de la conduite vexatoire. Chaque intervention auprès du salarié, prise séparément, pourrait être insignifiante ou constituer une forme si légère qu’elle ne justifierait pas une sanction légale. Elle peut être néanmoins pertinente, même si sa gravité est minime. Pour qu’il y ait harcèlement, il faut que les interventions mises en preuve, envisagées collectivement, constituent une conduite vexatoire. Dans l’expression «conduite vexatoire», le mot «conduite» est difficile à distinguer d’un «comportement», dont il constitue souvent un synonyme. Il désigne une manière d’agir ou de se comporter, vu comme la résultante d’un certain nombre d’actions ponctuelles, comme dans les expressions «bonne conduite» ou «mauvaise conduite». On peut y voir une connotation de durée.
Le second élément pour qu’il y ait harcèlement exige que les événements soient hostiles, répétés, multiples et qu’ils aient un certain étalement dans le temps. Une seule conduite grave peut aussi constituer du harcèlement, si elle a les mêmes effets que les interventions hostiles répétées, c’est-à-dire si elle produit un effet nocif continu pour le salarié. Le simple fait de la répétition ne constitue pas du harcèlement si cela est fondé sur un motif légitime. L’exercice du pouvoir de direction peut parfois justifier la répétition. Ainsi, un supérieur qui répète les mêmes consignes à un salarié qui néglige de les respecter n’exerce pas nécessairement du harcèlement à son égard.
Le troisième élément à prouver est que l’intervention non désirée est celle pour laquelle la victime exprime une forme quelconque de refus ou de déplaisir. Une personne hostile en est une qui se comporte en ennemie. Une intervention hostile en est une qui caractérise un ennemi. Dans le contexte de la Loi sur les normes du travail, il s’agit de l’hostilité qui vise la personne du salarié. Ce comportement est inadmissible en milieu de travail, car les personnes s’y trouvent pour collaborer et non pour se battre. Il est permis d’être hostile à une proposition, de combattre un projet, mais il n’est pas permis d’adopter envers une personne un comportement hostile et injustifié.
Le quatrième élément pour qu’il y ait harcèlement, c’est que la conduite vexatoire porte atteinte à la dignité de la victime ou à son intégrité, psychique ou physique. Une conduite vexatoire constitue, par définition, une atteinte à la dignité d’une personne. La répétition renforce l’idée, mais semble peu ajouter à la substance. On peut cependant y voir une nuance. La vexation suppose que la personne qui en est victime la ressente. L’atteinte à la dignité impose un standard objectif. L’atteinte à la dignité est indépendante de la conscience qu’une personne en a, comme la mutilation d’un bébé ou la maltraitance d’une personne inconsciente ou démente.
Le cinquième élément pour qu’il y ait harcèlement, c’est lorsque la conduite vexatoire du harceleur entraîne un milieu de travail néfaste. Le mot «néfaste» est un terme flou qui ne semble pas ajouter beaucoup à la règle. Une personne néfaste est celle qui cause du dommage. Une chose néfaste en est une qu’une personne juge nuisible ou contraire à son bien, comme une idéologie néfaste. La loi donne «harmful» comme équivalent anglais, qui veut dire «préjudiciable». On peut dire qu’un milieu de travail est néfaste s’il fait du tort, s’il cause préjudice.
La dimension la plus utile de ce cinquième élément est implicite: elle ressort de la notion du «milieu de travail». Cette notion implique que la conduite vexatoire s’installe de façon récurrente et prolongée dans la relation de travail, de manière à la rendre quotidiennement ou régulièrement préjudiciable ou pénible. L’idée est mieux rendue au deuxième alinéa de l’article 81.18 L.N.T. où la conduite inacceptable est celle qui produit un effet nocif continu pour le salarié. C’est le critère qu’il convient de rechercher pour l’application de cet élément. Il peut se manifester notamment par la répugnance à entrer au travail pour se retrouver en présence du harceleur, ou par un état d’abattement chronique à la fin de chaque journée passée en sa compagnie.
1.11 Pour déterminer si les allégations de harcèlement psychologique sont justifiées, quels sont les éléments qui doivent être pris en considération?
Globalement et généralement, pour déterminer si les allégations de harcèlement psychologique sont justifiées, les éléments suivants doivent être pris en considération:
- Les conduites, paroles ou gestes considérés comme vexatoires et hostiles par le plaignant doivent être replacés dans leur contexte aux fins de leur juste appréciation;
- Une décision illégale, prohibée ou déraisonnable n’entraîne pas automatiquement une conclusion de conduite harcelante. Cependant, il n’est pas nécessaire qu’une mesure prise à l’égard d’une personne salariée soit illégale, prohibée ou déraisonnable pour qu’elle puisse constituer une vexation ou une attaque susceptible de devenir un élément de harcèlement;
- Une série de mesures, de paroles, d’actes ou de gestes pris isolément peuvent ne pas être graves, mais leur cumul peut porter atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique de la personne salariée et rendre son milieu de travail néfaste;
- Une conduite agressive ou de confrontation de la part d’une personne salariée qui se dit victime de harcèlement n’autorise pas à conclure que le prétendu harceleur n’a pas eu une conduite vexatoire ayant porté atteinte à la dignité ou à l’intégrité de la présumée victime;
- Une perspective d’ensemble doit être adoptée pour apprécier le caractère vexatoire de la conduite reprochée;
- La perception de la victime est importante, mais non déterminante;
- La conduite reprochée doit être analysée à partir du critère de la personne raisonnable, diligente et prudente qui, placée dans la même situation, conclurait à son caractère vexatoire;
- Enfin, il n’est pas pertinent de s’interroger sur l’intention malicieuse du harceleur pour apprécier une preuve sur le harcèlement.
1.12 Qu’est-ce que le modèle subjectif/objectif?
Il importe fondamentalement de comprendre que les dispositions de la loi définissent le harcèlement psychologique comme étant une conduite vexatoire. Pour déterminer si cela s’est produit, il faut analyser la preuve en adoptant le modèle subjectif/objectif, soit en se demandant si une personne raisonnable, dans la même situation que le salarié, estimerait qu’elle subit du harcèlement psychologique au sens de la loi. Ainsi, une situation de harcèlement psychologique s’apprécie de façon objective en vérifiant si les gestes et les attitudes allégués sont ceux qu’une personne raisonnable ne peut désirer.
La définition retenue dans la loi implique de tenir compte de la personnalité du salarié qui subit le harcèlement allégué (critère subjectif), des paroles, des actes ou des gestes prononcés et posés (critère esthétique), de l’atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique du salarié (critère éthique) et des conséquences sur la prestation de travail du salarié (critère matériel).
1.13 Que vise le harcèlement psychologique et comment il engage la responsabilité de l’employeur?
Le harcèlement psychologique vise essentiellement une manière d’agir ou un comportement inapproprié qui entraîne des conséquences préjudiciables. Le tribunal saisi d’une plainte pour harcèlement psychologique se doit d’appré- cier les faits dans une perspective globale et à partir du point de vue objectif de la victime présumée, c’est-à-dire en se référant aux critères de la personne raisonnable, normalement diligente et prudente, placée dans les mêmes circonstances que celle-ci. En cette matière il n’est pas pertinent de s’interroger sur l’intention malicieuse du harceleur. Telle preuve n’est pas requise puisque le législateur n’a pas voulu punir le coupable, mais redresser la situation, tout comme en matière de discrimination.
En matière de harcèlement psychologique, la responsabilité de l’employeur est objectivement engagée dès qu’un cadre ou un salarié sous sa direction s’adonne à une forme de harcèlement tel que défini par les dispositions de la loi, et ce, indépendamment de l’intention malveillante du harceleur.
Toutefois, en tout temps, le harcèlement psychologique doit être distingué des situations problématiques associées aux rapports sociaux conflictuels et aux phénomènes de victimisation ou de personnalité paranoïde. Ainsi, en ce qui a trait au conflit de personnalités, le harcèlement n’apparaîtra que si l’un des belligé- rants adopte une conduite vexatoire répétée et hostile mettant en cause l’intégrité et la dignité ainsi que le milieu de travail de l’autre. Relativement au phénomène de victimisation, il se reconnaît au manque de gravité ou à l’exagération de la conduite vexatoire dénoncée, à l’absence d’hostilité réelle du harceleur présumé et à l’absence de volonté du dénonciateur de trouver une solution à la situation.
En tout temps, l’exercice des droits de direction d’un employeur ne constitue un abus que si celui-ci agit de manière déraisonnable; cet abus ne peut être assimilé à du harcèlement que s’il remplit les critères essentiels de la définition prévue par les dispositions de la loi.
1.14 Qu’est-ce qui ne constitue pas du harcèlement psychologique?
Il existe une multitude de situations factuelles qui ne constituent pas du harcèlement psychologique au sens de la définition de le loi, par exemple, le droit de gérance de l’employeur, les conflits de travail, le stress relié au travail, les conditions de travail, les conditions difficiles de travail, les contraintes professionnelles difficiles, la victimisation ou la personnalité paranoïde, soit le sentiment excessif et exagéré d’être une victime, les changements de conditions de travail, l’application normale des mesures disciplinaires et administratives. Il existe plusieurs autres situations qui ne constituent pas du harcèlement psychologique. On discute de ces cas plus loin dans le présent ouvrage, à la section 5.1.
1.15 Qu’est-ce qu’une conduite vexatoire?
L’on peut aussi affirmer qu’une conduite vexatoire peut être définie comme étant un comportement qui peut blesser quelqu’un, l’humilier, le contrarier, le peiner. Il est établi qu’une conduite vexatoire est la manifestation de gestes, de paroles, de comportements ou d’attitudes qui humilient ou blessent quelqu’un dans son amour-propre et qui lui causent des tourments. Une conduite est vexatoire lorsqu’elle est humiliante ou encore abusive pour la personne qui la subit. Celle-ci sera diminuée, dénigrée, tant sur le plan personnel que professionnel. Le caractère vexatoire d’une conduite fait référence au résultat de celle-ci.
Le qualificatif «vexatoire» renvoie dans le contexte de la loi à une conduite qui contrarie ou qui blesse quelqu’un dans son amour-propre. Qui contrarie, c’est-à-dire qui cause du mécontentement, qui ennuie. Qui blesse, c’est-à-dire qui crée une sensation désagréable, un sentiment d’inconfort. Dans son amour-propre, c’est-à-dire le sentiment qu’a une personne de sa valeur. Il suffit donc d’une conduite qui rabaisse quelqu’un en le faisant paraître inférieur ou méprisable ou encore, non fréquentable.
En somme, on peut affirmer que la conduite vexatoire se manifeste par les caractères répétitifs, hostiles, non désirés des différents comportements, paroles, actes ou gestes, alors que le critère d’appréciation de la conduite vexatoire est celui de la victime raisonnable.
1.16 Pourquoi doit-on tenir compte du critère de la personne raisonnable?
Certains décideurs stipulent qu’en matière de harcèlement psychologique, ce n’est pas d’abord et avant tout la conduite de la victime présumée qui doit être examinée. En effet, cette référence à la conduite de la victime peut porter à confusion. Ainsi, une plainte de cette nature ne devrait pas être vue ou perçue comme une audience mettant en cause, au premier titre, la conduite, la façon de faire ou d’agir de la personne qui formule ce type de reproche. L’examen d’une plainte de harcèlement psychologique doit d’abord tenir compte de la version des événements relatés par la personne qui s’en plaint.
En second lieu, il est nécessaire pour le décideur de prendre en considération les explications, atténuations et négations de la partie opposée. Il faut par la suite évaluer si, compte tenu de l’ensemble de la preuve entendue, du contexte, des personnes présentes ainsi que des faits généraux ou particuliers, la prétention de harcèlement psychologique est ou non fondée.
Également, il n’y a pas lieu de déterminer ce qu’une personne raisonnable aurait ou n’aurait pas conclu dans les circonstances, mais plutôt de décider, en fonction de la preuve et du droit, si le reproche de harcèlement psychologique était fondé ou non. Cette norme d’évaluation est pertinente en situation de plainte pour harcèlement sexuel. Toutefois, elle ne peut se substituer au fait que c’est l’adjudicateur, et non cet étalon théorique qu’est la personne raisonnable, qui doit évaluer si les faits et comportements reprochés constituent, eu égard à l’ensemble des circonstances du dossier et du droit applicable, du harcèlement psychologique.
1.17 Pourquoi la conduite vexatoire doit s’apprécier de façon objective en fonction de la personne raisonnable, normalement diligente et prudente, placée dans les mêmes circonstances?
La très grande majorité des décideurs, sinon l’ensemble, indique que pour qu’il y ait harcèlement psychologique, on doit être en présence de tous les éléments décrits par les dispositions de la loi. Il est établi qu’une conduite vexatoire est la manifestation de gestes, de paroles, de comportements ou d’attitudes qui humilient ou blessent quelqu’un dans son amour-propre et qui lui causent des tourments.
De plus, en règle générale, il faut que ces gestes, paroles ou comportements se répètent dans le temps. L’analyse de l’affaire par un décideur doit se faire globalement et non fait par fait, afin d’y déceler le caractère harcelant ou non des comportements, paroles ou gestes. De plus, ceux-ci doivent être hostiles ou non désirés. Quant au terme «hostile», il fait référence à un sentiment d’inimitié, d’opposition, voire à un comportement d’ennemi. Quant à la notion de «comportement non désiré», elle renvoie plutôt à une manifestation qui n’a pas été souhaitée par la victime, et ce, que celle-ci ait exprimé ou non sa désapprobation avant l’événement.
Toutefois, il faut noter que, dans certains cas, le silence de la victime peut être un facteur important dans l’analyse du bien-fondé de la plainte en matière de harcèlement psychologique. Aussi, la conduite vexatoire doit nécessairement porter atteinte soit à la dignité, soit à l’intégrité physique ou psychologique du salarié. La preuve doit également démontrer que l’atteinte chez le plaignant a laissé des marques ou des séquelles qui, sans être nécessairement permanentes, compromettent de façon plus que fugace l’équilibre physique, psychologique ou émotif de la victime. Également, il faut considérer qu’un milieu de travail est néfaste lorsqu’il est nuisible et dommageable et qu’il ne permet pas de réaliser de façon saine les objectifs liés au contrat de travail.
Ainsi, il serait périlleux de prendre comme unique point d’analyse d’une conduite la seule perception du salarié plaignant puisque cette dernière peut être celle d’une personne ayant des problèmes de victimisation ou souffrant de paranoïa. De plus, chaque individu, en raison de ses traits de personnalité, de son éducation, de sa religion et de son milieu de vie, réagit différemment à une même situation, voire à une même conduite. C’est pourquoi la conduite vexatoire doit s’apprécier de façon objective en fonction de la personne raisonnable, normalement diligente et prudente, placée dans les mêmes circonstances.
1.18 De quel point de vue apprécie-t-on le harcèlement psychologique?
Le harcèlement psychologique est d’abord analysé du point de vue de la présumée victime, de façon largement subjective. À ce propos, il faut bien comprendre que le test ultime pour déterminer s’il y a eu ou non harcèlement psychologique ou sexuel au travail est ce que conclurait à ce sujet une personne raisonnable, éclairée et prudente placée dans la même situation. C’est le critère largement reconnu et appliqué par les décideurs. Ainsi, ce n’est pas le critère de la personne forte ou prompte à s’opposer qui s’applique en matière de harcèlement psychologique. Ultimement, il est reconnu et établi que c’est ce test qui assure au décideur qu’il ne commet pas d’erreur.
1.19 Pourquoi doit-on tenir compte de la version du salarié plaignant, et en fonction de quels critères?
Comme déjà mentionné, en matière de harcèlement psychologique, la version du salarié plaignant doit être analysée en fonction du critère de la victime raisonnable. En premier lieu, c’est la conduite de la prétendue victime qu’il faut examiner, compte tenu du fait que la définition de harcèlement psychologique a introduit des éléments qui ne se comprennent que du point de vue de celle-ci. Toutefois, il faut éviter que l’appréciation de la conduite de la victime ne soit purement subjective et, à cette fin, le critère qui a été retenu est celui de la personne raisonnable, normalement diligente et prudente placée dans les mêmes circonstances. En second lieu, il peut être approprié de tenir compte, le cas échéant, d’une preuve d’acte similaire, et ce, compte tenu des circonstances. Notamment, les versions contradictoires doivent s’apprécier en fonction des critères usuels en semblable matière.
1.20 Est-ce que la conduite reprochée doit être illégale, prohibée ou déraisonnable pour constituer du harcèlement psychologique?
En ce qui concerne le harcèlement psychologique, il n’est pas nécessaire que la conduite reprochée soit illégale, prohibée ou déraisonnable pour qu’elle puisse constituer une vexation ou une attaque susceptible de devenir un élément de harcèlement: le fait de faire preuve de plus de zèle à l’endroit d’un salarié, d’être moins tolérant envers celui-ci qu’envers les autres, d’être désagréable en actes ou en paroles ou, tout simplement, de l’ignorer totalement, peut très bien constituer à son égard une forme de vexation, d’attaque subtile, sans pour autant représenter en soi un acte illégal, prohibé ou déraisonnable.
Ce n’est donc pas pris isolément, mais étudiés dans leur ensemble, en tenant compte du contexte dans lequel ils ont été tenus, de la période de temps pendant laquelle ils ont perduré et de la motivation qui prévaut, qu’il faut analyser chacun des divers agissements qui constituent cette conduite. Ainsi, des mesures, somme toute anodines, pourront faire partie intégrante d’une trame de harcèlement psychologique en tenant compte de leur répétition et du contexte de leur imposition.
Dans tous les cas, il n’est pas essentiel qu’il ait été démontré que le harceleur ou l’auteur de ces propos, attitudes ou comportements inacceptables ou offensants aient été animés par une volonté de nuire, d’accabler ou de briser sa victime pour qu’ils donnent lieu à une situation de harcèlement psychologique lorsqu’ils sont le fait de l’employeur ou, encore, de ses représentants: il suffit de se demander si les droits exercés par la direction l’ont été dans un esprit de loyauté, de la manière prudente et diligente d’une personne raisonnable, la violation de cette obligation implicite engageant la responsabilité contractuelle de l’employeur.
Toutefois, il ne s’agit pas de ne s’en tenir qu’à la seule perception de la victime pour apprécier si celle-ci est fondée à se sentir harcelée. Il faut d’abord et avant tout se demander si une personne raisonnable, placée dans la même situation que la victime et dotée des mêmes attributs, estimerait vexatoire, blessante ou importune la conduite du présumé harceleur. Une simple altération sur le plan de la qualité du travail causée par le harcèlement psychologique suffit à créer un effet néfaste pour la victime, le critère de comparaison étant un milieu de travail sain, et la perspective étant celle des visées préventives de la loi.
1.21 Doit-on prouver la mauvaise foi ou l’intention de nuire de la personne visée pour qualifier une situation de harcèlement psychologique?
Non il n’est pas nécessaire de prouver la mauvaise foi ou l’intention de nuire d’une personne pour que son comportement soit qualifié de harcèlement psychologique au sens des dispositions de la Loi sur les normes du travail. En effet, le critère applicable par les tribunaux dans le contexte de la loi n’est pas celui-là. La philosophie derrière les mesures de protection n’est pas rattachée à des questions de mauvaise foi ou d’intention de nuire. L’objectif de la loi n’est pas celui-là. Il faut plutôt s’attarder à savoir si la conduite du salarié est une conduite vexatoire au sens de la définition. Globalement, c’est la conduite de la personne visée qui est importante.
1.22 De quelle façon se manifeste la conduite vexatoire chez une personne?
En matière de harcèlement psychologique en milieu de travail, la conduite vexatoire se manifeste par les caractères répétitifs, hostiles, non désirés des différents comportements, paroles, actes ou gestes, alors que le critère d’appréciation de la conduite vexatoire est celui de la victime raisonnable.
Cependant, ce critère n’est pas absolu pour ce qui est de l’appréciation de l’atteinte à la dignité ou à l’intégrité, de même qu’en ce qui a trait au milieu de travail néfaste. De plus, tel que déjà indiqué dans le présent ouvrage, la preuve doit être appréciée de façon globale, en gardant une perspective d’ensemble de la situation. Il faut ajouter que la perception subjective de la victime demeure pertinente, mais non déterminante, tout comme l’intention malicieuse du harceleur, qui pourrait avoir un effet sur les dommages et intérêts punitifs, entre autres.
Enfin, la dignité fait référence au respect, à l’estime de soi et à l’amour-propre d’une personne. De façon générale, pour qu’il y ait atteinte à la dignité, il n’est pas nécessaire qu’il y ait des séquelles définitives. Par ailleurs, quant à l’atteinte à l’intégrité psychologique ou physique, elle doit, en premier lieu, laisser des marques ou des séquelles et, en second lieu, occasionner un déséquilibre physique, psychologique ou émotif plus que fugace, sans qu’il soit nécessairement permanent.
1.23 Est-ce que l’on doit tenir compte, en matière de harcèlement psychologique, des caractéristiques personnelles du salarié?
En matière de harcèlement psychologique, comme déjà mentionné, l’existence d’une conduite vexatoire doit s’apprécier de façon objective en fonction de la personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances. Les caractéristiques personnelles de la prétendue victime peuvent être prises en considération afin d’établir si celle-ci a subi du harcèlement psychologique, cependant la théorie du «crâne fragile» doit être utilisée avec une grande prudence.
En effet, les caractéristiques personnelles d’une personne ne doivent pas être la norme de référence pour conclure si, dans la société civile, la personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances que la prétendue victime aurait considéré être victime de harcèlement psychologique. Face à une personne agressive, il faut analyser les faits à la lumière du critère fondamental de référence, soit celui de la personne raisonnable non agressive placée dans les mêmes circonstances que le salarié plaignant, notamment lorsque son agressivité est déraisonnable et non fondée.
1.24 Quelles sont les obligations des parties concernant le harcèlement psychologique en mode télétravail?
Il est bien établi que les moyens raisonnables qu’est tenu de prendre un employeur pour satisfaire aux devoirs que lui imposent les dispositions de la loi doivent être adaptés aux circonstances dans lesquelles il évolue, tel que par exemple le télétravail. L’obligation d’un employeur en cette matière comporte deux volets. D’abord, il doit prendre les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement psychologique. Cette obligation est généralement satisfaite par la mise en place d’une politique à cet égard et d’une procédure de plainte et d’intervention.
Ensuite, il doit prendre les moyens pour faire cesser toute conduite constituant du harcèlement psychologique, lorsque «portée à sa connaissance». Il faut bien comprendre qu’en mode télétravail les mêmes obligations s’appliquent à l’employeur. Toutefois, peut s’ajouter dans ce cas la question de la cyberintimidation et du cyberharcèlement, soit l’utilisation des technologies de communication telles que les sites Internet, les sites de réseautage social, le courriel, la messagerie texte, la messagerie instantanée, ou tout autre moyen de communication électronique, pour harceler ou intimider une personne. Ici, tout employeur devrait avoir prévu cet aspect dans sa politique pour enrayer cette possibilité.
Nb : Il s’agit d’un extrait de notre ouvrage: Le télétravail, Tout ce qu’il faut savoir, Wilson & Lafleur Ltée, 2020.
1.25 Quelles sont les obligations de l’employeur en matière de harcèlement psychologique?
Il y a principalement trois obligations, en premier lieu celle de fournir un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique. Il s’agit d’une obligation de moyens, et non pas d’une obligation de résultat. Dans les faits, le fardeau de preuve repose sur l’employeur qui doit prendre les moyens nécessaires pour faire cesser le harcèlement. En deuxième lieu, celle de faire de la prévention par des moyens raisonnables, soit, par exemple par l’adoption d’une politique interne qui est connue de tous et qui inclut un mécanisme pour traiter les plaintes et les situations dénoncées.
L’employeur doit adopter des mesures concrètes et tangibles, par exemple en mettant en place de la formation. En troisième lieu, il doit faire cesser le harcèlement lorsque celui-ci est porté à sa connaissance. Dans ce cas, une plainte formelle n’est pas nécessaire, mais il doit intervenir lorsqu’informé, faire une enquête, rencontrer la victime et l’accusé. L’employeur doit aussi s’assurer du fondement de la plainte pour être certain qu’il ne s’agit pas de fausses accusations ou d’une manipulation. Enfin, pour qu’il y ait des mesures disciplinaires ou administratives, la personne victime ne doit pas nécessairement dénoncer la situation puisqu’il revient à l’employeur d’être actif dès qu’il est informé d’une situation de harcèlement.
1.26 Est-ce que l’employeur est responsable du fait d’un tiers?
Non seulement l’employeur est responsable de ses propres salariés, mais il est aussi tenu de protéger ses propres salariés de la conduite harcelante des tiers, soit les clients, fournisseurs, visiteurs, usagers, etc. C’est pourquoi la plainte est déposée contre lui et non contre le harceleur. De plus, il faut comprendre et aussi mentionner que l’employeur pourrait dans ce cas théoriquement poursuivre devant les tribunaux civils la personne qui harcèle le salarié. Il devra toutefois prouver qu’il répond à ses propres obligations que lui impose la loi en matière de prévention et de correction.
À savoir ! |
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Pour qu’il y ait harcèlement psychologique au travail, les cinq éléments prévus dans la définition de la loi doivent tous être présents en même temps. À défaut, il s’agit d’une autre situation. |
À retenir ! |
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La conduite vexatoire doit s’apprécier de façon objective en fonction de la personne raisonnable, normalement diligente et prudente, placée dans les mêmes circonstances. |
Attention ! |
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La conduite reprochée ne doit pas nécessairement être illégale, prohibée ou déraisonnable pour constituer du harcèlement psychologique. Il revient à l’employeur de faire en sorte de prévenir le harcèlement et de le faire cesser lorsqu’il en est informé. |
Nb: Il s’agit d’un extrait de notre ouvrage: Les normes du travail, Tout ce qu’il faut savoir, Wilson & Lafleur Ltée, 2020.