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Compte-rendu de lecture : les 50 ans de la Charte québécoise en emploi - terre promise ou paradis perdu

Dans le livre Les 50 ans de la Charte québécoise en emploi : terre promise ou paradis perdu, les auteurs s’interrogent sur l’effet de la loi sur les relations d’emploi dans la province.
14 novembre 2025
Samuel Dinel, CRIA

Il est facile de tenir pour acquise la Charte québécoise, pourtant une « loi fondamentale et sans précédent dans l’histoire du Québec », qui a bouleversé les rapports individuels et collectifs du travail. Aujourd’hui intégrée à notre pratique, la loi a inspiré l’article 12 du Code de déontologie de l’Ordre qui stipule que le membre doit « […] éviter d’avoir recours à des pratiques discriminatoires, frauduleuses ou illégales et doit refuser de participer à de telles pratiques. »[1]  

Les 50 ans de la Charte québécoise en emploi est donc un recueil de textes dirigé par les professeurs Sébastien Parent et Charles Tremblay Potvin. Il réunit les perspectives de juristes d’exception autour d’une question complexe qui permet de mieux comprendre le caractère exceptionnel de la Charte :

 « Un demi-siècle plus tard, la Charte a-t-elle véritablement permis d’ériger un monde du travail plus juste et équitable ou bien l’idéal initial s’est-il heurté aux limites du réel, transformant la terre promise en paradis perdu? »

Donc, un premier mandat — réussi — de l’ouvrage est de dresser un bilan rétrospectif de l’effet de la Charte sur les milieux de travail. Plusieurs auteurs et autrices détaillent ainsi la mobilisation progressive et aux desseins variés des droits garantis par la Charte. C’est généralement à la suite de longues contestations judiciaires que les protections ont progressivement pris place dans les milieux de travail. Ces constats sont appuyés par plusieurs analyses statistiques et historiques qui enrichissent les multiples articles de ce recueil.

Les 50 ans de la Charte québécoise en emploi est beaucoup plus qu’un ouvrage historique. Comme le synthétise en préface l’honorable Christian Brunelle, président par intérim du Tribunal des droits de la personne, trois constats émergent de la lecture du livre :

  1. L’effectivité d’un droit repose sur l’interprétation que le tribunal est enclin à lui donner;
  2. L’accès à la justice reste problématique pour bien des salariés et salariées; et
  3. 50 années de charte n’auront pas suffi à garantir la dignité de nombreuses personnes.

La question de l’accès à un milieu de travail juste est au cœur des différents chapitres dont les sujets variés abordent avec finesse un large éventail de situations et de conditions. On y trouve des textes portant sur les développements récents en matière de syndicalisation des cadres, la couverture identitaire au nom du professionnalisme, la protection des personnes bénévoles, la justiciabilité dans les milieux non syndiqués ou encore la situation des travailleuses et travailleurs migrants temporaires.

À l’étude de ces situations, s’ajoutent plusieurs analyses portant sur l’application des principes centraux de la Charte, notamment la concrétisation des droits et libertés dans la relation d’emploi, ainsi que sur l’égalité et la dignité au travail. Notons au passage l’importance de l’article 46[2] , présenté dans plusieurs textes comme un outil précieux qui pourrait accroître la capacité de protection, par exemple en prévention et postvention de la santé au travail. 

Alors, pour en revenir à la question de fond, paradis perdu ou terre promise? La question porteuse posée en préambule est donc beaucoup plus vulgarisée que l’ensemble de l’ouvrage dont le ton est caractéristique de la rigueur académique. Ce recueil de textes intéressera un lectorat déjà averti et familier de la littérature scientifique sur le droit du travail ou à la doctrine juridique.

Dès lors, le constat sera nuancé, soulignant à la fois les avancées en matière de justice ainsi que les différentes lacunes. C’est un livre qui encourage l’audace dans l’appropriation sociale de l’outil et qui, sans être pessimiste, pose ses constats avec beaucoup de réalisme. Il reste encore beaucoup de travail à faire pour atteindre l’idéal initial qui a motivé l’adoption de la Charte.

Et donc, pour les CRHA | CRIA, pourquoi en faire la lecture? Notre profession est souvent à l’intersection entre deux questions épineuses « Qu’est-ce que nous pouvons faire? » et « Qu’avons-nous le droit de faire? ». Confronté à la Charte qui s’impose comme un élément incontournable de la pratique contemporaine, Les 50 ans de la Charte québécoise en emploi permet de répondre aussi à deux questions supplémentaires : « Pourquoi avons-nous ces droits (ou obligations) et quels futurs pour ceux-ci? »

Relativement à ce dernier volet, plusieurs auteurs et autrices encouragent une interprétation juridique audacieuse de la Charte afin de continuer le progrès vers l’égalité. Et de la même manière, l’application dont nous avons la responsabilité en milieu de travail peut, elle aussi, être empreinte du même esprit.

Rappelons que la lecture d’un livre de ce type peut constituer une activité d’autoapprentissage autodidacte au sens du Guide sur la formation continue obligatoire[3] de l’Ordre.

Il est facile de tenir pour acquise la Charte québécoise, pourtant une « loi fondamentale et sans précédent dans l’histoire du Québec », qui a bouleversé les rapports individuels et collectifs du travail. Aujourd’hui intégrée à notre pratique, la loi a inspiré l’article 12 du Code de déontologie de l’Ordre qui stipule que le membre doit « […] éviter d’avoir recours à des pratiques discriminatoires, frauduleuses ou illégales et doit refuser de participer à de telles pratiques. »[1]  

Les 50 ans de la Charte québécoise en emploi est donc un recueil de textes dirigé par les professeurs Sébastien Parent et Charles Tremblay Potvin. Il réunit les perspectives de juristes d’exception autour d’une question complexe qui permet de mieux comprendre le caractère exceptionnel de la Charte :

 « Un demi-siècle plus tard, la Charte a-t-elle véritablement permis d’ériger un monde du travail plus juste et équitable ou bien l’idéal initial s’est-il heurté aux limites du réel, transformant la terre promise en paradis perdu? »

Donc, un premier mandat — réussi — de l’ouvrage est de dresser un bilan rétrospectif de l’effet de la Charte sur les milieux de travail. Plusieurs auteurs et autrices détaillent ainsi la mobilisation progressive et aux desseins variés des droits garantis par la Charte. C’est généralement à la suite de longues contestations judiciaires que les protections ont progressivement pris place dans les milieux de travail. Ces constats sont appuyés par plusieurs analyses statistiques et historiques qui enrichissent les multiples articles de ce recueil.

Les 50 ans de la Charte québécoise en emploi est beaucoup plus qu’un ouvrage historique. Comme le synthétise en préface l’honorable Christian Brunelle, président par intérim du Tribunal des droits de la personne, trois constats émergent de la lecture du livre :

  1. L’effectivité d’un droit repose sur l’interprétation que le tribunal est enclin à lui donner;
  2. L’accès à la justice reste problématique pour bien des salariés et salariées; et
  3. 50 années de charte n’auront pas suffi à garantir la dignité de nombreuses personnes.

La question de l’accès à un milieu de travail juste est au cœur des différents chapitres dont les sujets variés abordent avec finesse un large éventail de situations et de conditions. On y trouve des textes portant sur les développements récents en matière de syndicalisation des cadres, la couverture identitaire au nom du professionnalisme, la protection des personnes bénévoles, la justiciabilité dans les milieux non syndiqués ou encore la situation des travailleuses et travailleurs migrants temporaires.

À l’étude de ces situations, s’ajoutent plusieurs analyses portant sur l’application des principes centraux de la Charte, notamment la concrétisation des droits et libertés dans la relation d’emploi, ainsi que sur l’égalité et la dignité au travail. Notons au passage l’importance de l’article 46[2] , présenté dans plusieurs textes comme un outil précieux qui pourrait accroître la capacité de protection, par exemple en prévention et postvention de la santé au travail. 

Alors, pour en revenir à la question de fond, paradis perdu ou terre promise? La question porteuse posée en préambule est donc beaucoup plus vulgarisée que l’ensemble de l’ouvrage dont le ton est caractéristique de la rigueur académique. Ce recueil de textes intéressera un lectorat déjà averti et familier de la littérature scientifique sur le droit du travail ou à la doctrine juridique.

Dès lors, le constat sera nuancé, soulignant à la fois les avancées en matière de justice ainsi que les différentes lacunes. C’est un livre qui encourage l’audace dans l’appropriation sociale de l’outil et qui, sans être pessimiste, pose ses constats avec beaucoup de réalisme. Il reste encore beaucoup de travail à faire pour atteindre l’idéal initial qui a motivé l’adoption de la Charte.

Et donc, pour les CRHA | CRIA, pourquoi en faire la lecture? Notre profession est souvent à l’intersection entre deux questions épineuses « Qu’est-ce que nous pouvons faire? » et « Qu’avons-nous le droit de faire? ». Confronté à la Charte qui s’impose comme un élément incontournable de la pratique contemporaine, Les 50 ans de la Charte québécoise en emploi permet de répondre aussi à deux questions supplémentaires : « Pourquoi avons-nous ces droits (ou obligations) et quels futurs pour ceux-ci? »

Relativement à ce dernier volet, plusieurs auteurs et autrices encouragent une interprétation juridique audacieuse de la Charte afin de continuer le progrès vers l’égalité. Et de la même manière, l’application dont nous avons la responsabilité en milieu de travail peut, elle aussi, être empreinte du même esprit.

Rappelons que la lecture d’un livre de ce type peut constituer une activité d’autoapprentissage autodidacte au sens du Guide sur la formation continue obligatoire[3] de l’Ordre.


Author
Samuel Dinel, CRIA Coordonnateur aux activités – Revue Relations industrielles/ Industrial Relations Chargé de cours au Département des relations industrielles de l’Université Laval

Source : Revue RH, volume 28, numéro 4 ─ Octobre/Novembre/Décembre 2025