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Mobiliser pour avancer – Des communautés comme piliers de votre stratégie

Les communautés internes constituent un excellent levier pour contribuer à la diversité, à l’équité et à l’inclusion dans l’entreprise, en complément au rôle joué par l’équipe dédiée à la thématique. 
23 avril 2024
Christophe Lo Giudice

Les communautés internes constituent un excellent levier pour contribuer à la diversité, à l’équité et à l’inclusion dans l’entreprise, en complément au rôle joué par l’équipe dédiée à la thématique. Ces dynamiques vont permettre à celles et ceux qui s’y engagent – « alliés » compris – de partager des ressentis, d’être force de proposition et de générer des initiatives innovantes et/ou transversales. 

Pour en témoigner, le Htag Summer Campus a accueilli Anne Charlier, présidente du Réseau MixCity chez BNP Paribas Fortis, Larissa Matundu, à l’animation du nouveau réseau BEING (Black Employee Inclusion Group) créé chez ING, et René Mat, directeur associé chez Accenture Technology, par ailleurs au pilotage de l’approche Diversité et inclusion pour la Belgique et le Luxembourg et sponsor/allié du réseau LGBT. Experte en diversité et inclusion chez Febelfin, Claire Godding a, quant à elle, livré une perspective plus « hélicoptère » en évoquant deux initiatives sectorielles – Wo·Men in Finance et Multicultural Bankers – ainsi que la communauté de pratique Diversity Managers Association Belgium (DMAB) qui rassemble les personnes actives en diversité et inclusion de 65 entreprises du pays.

Pourquoi cette nouvelle communauté sur l’inclusion des employées et employés d’origines africaines et caribéennes a-t-elle été créée au sein d’ING? Larissa Matundu : « Il existait déjà différentes communautés relatives à la diversité et à l’inclusion au sein de la banque, mais pas encore pour les personnes afrodescendantes. Elle existait par contre déjà aux Pays-Bas. Cette nouvelle communauté, inaugurée en avril de cette année, n’est toutefois pas réservée à ceux-ci : elle est ouverte aux alliés, c’est-à-dire à celles et ceux qui veulent faire l’effort de comprendre les difficultés auxquelles fait face le personnel de couleur et contribuer à leur donner plus de voix et de visibilité quand leurs talents ne sont pas assez mis en évidence. »

Claire Godding : « En 2020, nous avons fait une enquête sur l’inclusion multiculturelle dans le secteur financier. Cette enquête était anonyme et les personnes répondantes pouvaient indiquer l’origine à laquelle ils se sentaient appartenir. Elle a montré que l’expérience de travail des personnes originaires d’Afrique subsaharienne et d’Afrique du Nord était souvent perçue de façon différente de celle d’autres membres du personnel : un recrutement ne se passant pas tout à fait de la même manière, des progressions de carrière plus lentes, un sentiment mitigé par rapport à ce qui est fait en matière d’inclusion… Les employées et employés originaires d’Afrique subsaharienne et du Nord sont en outre beaucoup plus souvent confrontés à des microagressions racistes que leurs collègues d’origine européenne : deux tiers contre un cinquième. Ces microagressions au travail sont, par exemple, des blagues (déplacées), des questions répétées sur l’origine, des expressions blessantes. Des collègues peuvent en être les auteurs, mais aussi des clients. Nous avons donc fait le constat qu’il s’agissait d’un vrai sujet, ce qui a mené à la création du réseau Multicultural Bankers. »

Un axe tel que l’égalité entre hommes et femmes est plus « ancien ». Comment le faire vivre dans la durée?

Anne Charlier : « C’est tout le défi que nous relevons avec la communauté MixCity en réunissant des femmes comme des hommes avec pour mission de montrer toute la valeur ajoutée de la mixité. Ce qui nous anime, c’est la passion et l’envie de sensibiliser aux enjeux sous-jacents qui sont très nombreux. Il faut se rendre compte que tant les hommes que les femmes peuvent se sentir victimes de discriminations. MixCity est, en effet, un réseau plus ancien et il faut sans cesse le réinventer, mais également le faire connaître – car il y a du mouvement dans l’entreprise, de nouveaux collaborateurs la rejoignent, etc. – et montrer ce qu’il apporte. »

Comment fonctionne une communauté relative à la diversité et à l’inclusion? N’est-ce pas paradoxal de travailler à l’inclusion en réunissant des membres d’une minorité?

Claire Godding : « Ces communautés ne sont jamais fermées. Elles sont volontairement ouvertes, et notamment à ce qu’on appelle les ‘alliés’ : il est parfaitement possible de lutter contre la discrimination quand on ne fait pas partie de la minorité et d’œuvrer à l’inclusion quand on ne subit pas soi-même d’exclusion, en se rangeant du côté de la minorité. »

René Mat : « Je m’occupe, depuis une dizaine d’années, du réseau diversité et inclusion au sein d’Accenture. Nous avons plusieurs communautés internes qui couvrent différentes dimensions de la diversité, dont l’orientation sexuelle. Et elles sont un formidable révélateur de leadership et de créativité chez les personnes qui les animent. »

Quels indicateurs utiliser pour mesurer les répercussions des communautés?

Anne Charlier : « Le principal résultat se mesure au feedback que nous rapportent nos membres, sur ce que la communauté leur apporte. Par ailleurs, il y a deux ans, l’équipe Diversité et inclusion a créé un tableau de bord qui permet de suivre les évolutions de la mixité dans les différentes entités. »

Claire Godding : « Une communauté peut avoir des répercussions en interne, mais aussi en externe. Le réseau dont j’ai vu le plus d’effets à l’extérieur de l’institution est le réseau Friends of Africa, porté à la base par des employées et employés de couleur. Elles et ils ont animé des sessions dans des universités et des salons de l’emploi pour convaincre des étudiantes et étudiants de talent chercheurs d’emploi qui n’osaient pas poser leur candidature dans le secteur bancaire – qui reflétait une image tellement ‘blanche’ – de le faire. Cela a donné de véritables résultats avec des talents qui font carrière dans le groupe aujourd’hui… »


Author
Christophe Lo Giudice Rédacteur en chef de la Revue Htag (Belgique)

Source : Revue RH, volume 27, numéro 2 ─ AVRIL MAI JUIN 2024