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La gouvernance consciente pour réaliser l’inclusion

Dans l'ère actuelle axée sur l'environnement, la société et la gouvernance, l'inclusivité est cruciale pour les organisations. Constater, comprendre, décider et s’engager sont les quatre étapes d’une gouvernance consciente en route vers une culture inclusive.
30 avril 2024

À l’heure des valeurs environnementales, sociales et de bonne gouvernance, les organisations se doivent d’être inclusives. Mais l’inclusivité reste parfois théorique. C’est ce qu’observe Hubert Makwanda, M. Éd., CRHA, président et fondateur de Concilium Capital Humain, une entreprise d’accompagnement en développement organisationnel. Si les organisations peinent à passer de la parole aux actes et à se doter d’une culture inclusive, c’est parce que la gouvernance consciente leur fait défaut. Pour y remédier, il propose un cheminement en quatre étapes.

Chaque organisation a sa culture avec ses valeurs et ses pratiques qui se reflètent sur les comportements du personnel. C’est à cette culture organisationnelle déjà présente qu’il faut greffer les valeurs inclusives de la diversité, l’équité et le respect de sorte que chaque personne au sein de l’organisation se sente considérée et intégrée. Or, la greffe ne prend pas toujours facilement. « Il y a souvent une rupture entre la direction de l’organisation et la réalité. L’intention de la gouvernance est bonne, les intentions sont claires, mais les actions ne suivent pas », fait observer Hubert Makwanda. C’est ce qu’il appelle une gouvernance inconsciente par opposition à une gouvernance consciente, qui « vise à transformer la façon dont les organisations sont dirigées et gérées en mettant l’accent sur la responsabilité sociale, la durabilité et la conscience éthique ». Cette transformation est un processus continu, partant de la culture ancrée, évoluant vers une culture émergente pour aboutir à la culture inclusive.

De la culture ancrée à la culture inclusive

La culture ancrée s’appuie sur des valeurs et des pratiques inscrites dans l’histoire de l’organisation. « Dans cette culture ancrée, on voit des façons de faire incrustées, des éléments sacrés auxquels il ne faut pas toucher. C’est une culture conservatrice qui préfère maintenir ses méthodes et structures éprouvées au fil du temps », illustre Hubert Makwanda.

Si dans l’organisation se pointent de nouvelles valeurs menant à l’expérimentation de nouvelles pratiques, une culture dite émergente s’installe. « Ces valeurs sont souvent portées par la jeune génération ou des gens qui ont des profils non traditionnels », précise Hubert Makwanda. Au risque de créer des conflits, car ces valeurs interfèrent parfois avec la culture ancrée. C’est pourquoi les cultures émergentes se caractérisent par une attitude d’écoute et d’ouverture, une communication authentique, de la flexibilité et une capacité d’adaptation aux .

Ces nouvelles valeurs et pratiques qui s’installent sont les pistes à développer pour poursuivre la transformation vers la culture inclusive.

Cette transformation commence par une phase d’analyse pour établir des constats sur la nature de la culture de l’organisation et comprendre le sens de ces constats. Elle demande ensuite de l’audace pour décider des actions à prendre et s’y engager. Constater, comprendre, décider et s’engager sont les quatre étapes d’une gouvernance consciente en route vers une culture inclusive.

Constater

Constater consiste à repérer dans la culture de l’organisation les éléments relevant d’une culture ancrée, d’une culture émergente et d’une culture inclusive. Hubert Makwanda propose une série de questions à soulever au sein de l’organisation pour dresser ces constats.

Quelles sont les pratiques et les valeurs ancrées dans l’organisation? Quelles valeurs, pratiques et quels comportements devraient alors être maintenus et lesquels pourraient faire obstacle à l’inclusivité? Ce sont des pistes pour transiter vers la culture émergente.

Quelles sont ensuite les pratiques et les valeurs émergentes dans l’organisation et quels défis celles-ci engendrent-elles dans l’organisation? Il peut s’agir de bienveillance, d’authenticité ou de processus de travail collaboratifs qui peuvent devenir des pistes à développer pour évoluer vers la culture inclusive.

Enfin, quelles sont les valeurs et les pratiques essentielles au développement d’une culture inclusive et la mise en place d’une gouvernance consciente et responsable? Il peut s’agir de pratiques visant la responsabilité partagée, l’engagement des membres du personnel ou le partage des connaissances et des coutumes des communautés présentes dans l’organisation.

Comprendre

Après avoir constaté les pistes d’action potentielles pour transiter vers la culture inclusive, il faut comprendre les enjeux et les conflits qu’elles soulèvent. Certaines valeurs portées par la jeune génération ou la diversité culturelle peuvent entrer en contradiction avec les convictions ou les croyances fondatrices de l’organisation. Certaines méthodes de travail peuvent déboucher sur des conflits d’intérêts. « Si une façon de faire privilégie une catégorie de personnes et qu’on adopte une autre façon de faire, qui leur fait perdre les privilèges qu’elles considèrent comme acquis, ces personnes risquent de réagir en résistant au changement », donne en exemple Hubert Makwanda. Mais par essence, une organisation équitable et inclusive devrait tendre à effacer les privilèges. Il faut donc analyser les pistes d’action et déceler les dilemmes potentiels qu’elles présentent.

Décider

Le défi est alors de choisir les pistes d’action et de résoudre les dilemmes en jeu. « Quand on s’ouvre sur une gouvernance consciente et une culture inclusive, on doit composer avec des contradictions », dit Hubert Makwanda. Pour les résoudre, il faut changer de logique. « On est habitués à prendre des décisions dans la logique du “ou”. C’est ça ou ça. La logique inclusive est une logique du “et”. C’est ça et ça », explique Hubert Makwanda. Après avoir décidé des actions à prendre, il faut encore en analyser les effets, et cela, avant de passer à l’action. De cette étape de décision découleront une vision et les orientations stratégiques à adopter.

S’engager

C’est là où le bât blesse. « L’engagement reste souvent en suspens. Une ou deux actions vont peut-être aboutir dans un plan d’action, mais la plupart du temps, les orientations restent dans un beau document sur une tablette et trois, quatre ans plus tard, on recommence », regrette Hubert Makwanda.

Si tel est le cas, c’est que la gouvernance n’était pas encore consciente.