ressources / revue-rh / volume-24-no-2

Pérenniser les acquis de la crise : pour une meilleure collaboration entre employeurs et travailleurs

Depuis le début de la crise, les experts en ressources humaines, en relations de travail et en santé et sécurité du travail ont démontré toute leur pertinence et leur expertise.
13 avril 2021

Voilà plus d’un an que plane sur notre quotidien l’ombre de la COVID -19. Évidemment, les milieux de travail n’y ont pas échappé et ont été profondément touchés par cette nouvelle réalité. Plus que jamais, nous avons dû retrousser nos manches et travailler conjointement afin de faire face aux défis auxquels nous étions et sommes toujours confrontés. Depuis le début de la crise, les experts en ressources humaines, en relations de travail et en santé et sécurité du travail ont démontré toute leur pertinence et leur expertise.

La collaboration s’est manifestée sur tous les plans. D’abord dans le milieu politique, où les partis fédéraux et provinciaux ont mis de côté les débats politiques afin de travailler de concert à la mise en place de mesures de santé publique et de soutien aux personnes et organisations durement touchées par la pandémie. 

Dans le domaine associatif, les principales associations patronales et syndicales ont été très présentes pour conseiller et appuyer les acteurs publics dans leur mission de protection du public et dans la mise en place de plans de sauvegarde et de relance économique. Que ce soit avec la CNESST pour la rédaction de guides permettant les retours au travail, au sein d’un comité de vigie afin de pouvoir agir rapidement en cas de conflits de travail, comme promoteurs de formations lors de la mise en place du fameux PACME ou encore maintenant, dans la préparation des efforts de vaccination dans les milieux de travail, les acteurs du marché du travail jouent un rôle de premier plan pour s’assurer que les programmes gouvernementaux soient les plus efficaces possible. Les associations telles que la nôtre n’auront jamais été aussi sollicitées et actives!

Cet esprit de collaboration s’est également manifesté dans nos milieux de travail. L’aménagement du travail a été complètement repensé pour faire place au télétravail, l’imposition de limites d’employés en présentiel et la fermeture de commerces à la clientèle. Nous aurions pu croire que cela aurait engendré une pluie de griefs et de conflits de travail, mais ce ne fut pas le cas. Tous se sont rangés derrière des objectifs communs, à savoir se protéger de la pandémie et veiller à ce que nos entreprises puissent survivre et même compétitionner malgré le contexte difficile. 

De nombreuses ententes sont survenues afin de revoir les horaires de travail, la séparation des tâches, les règles de fonctionnement interne et même la rémunération. Certains milieux ont dû faire des diminutions temporaires de la rémunération, alors que d’autres ont même relevé les salaires afin de reconnaître la situation particulière dans laquelle les travailleurs devaient exercer leur métier. Devant une circonstance exceptionnelle, nous avons fait preuve de créativité et de flexibilité à l’avantage de tous. 

Par ailleurs, certains reconnaissent que la crise aura facilité l’adoption du télétravail par nos organisations. Elle a également été un catalyseur de changement vers la numérisation de nos entreprises. La révolution 4.0 annoncée depuis de nombreuses années, et pourtant si lente à s’implanter au Québec peut enfin se faire à grande vitesse. Face aux enjeux de rareté de main-d’œuvre dans de nombreux secteurs économiques, les entreprises continuent à faire preuve de résilience et de créativité afin de poursuivre leurs activités en comptant sur moins de travailleurs que par le passé. Pendant la crise, les employeurs ont démontré être capables de mobiliser leurs équipes de travail afin de s’adapter dans les moments propices et malgré des obstacles que l’on considérait jusqu’à tout récemment comme insurmontables. Le rêve de tout expert en gestion du changement s’est finalement réalisé!

Comment pérenniser les acquis de la crise

Que pourraient faire les gestionnaires pour conserver cette mobilisation exceptionnelle? La recette est connue depuis longtemps, mais elle s’est manifestée de façon éclatante dans la dernière année. Ce qui a fait le succès des changements récemment intervenus, c’est non seulement le sentiment d’urgence ressenti, mais également une adhésion générale à des objectifs communs. Nombreuses sont les organisations qui disparaissent chaque année après avoir échoué à adapter leurs façons de faire aux nouvelles réalités de l’économie ou du marché du travail. 

Chaque organisation doit trouver les moyens de mobiliser son équipe. Évidemment, cela ne peut pas se concrétiser sans une adhésion indéfectible de l’ensemble des acteurs de l’entreprise. La cause doit sembler naturelle et doit pouvoir aller au-delà des objectifs personnels de chacun. Serait-ce la mise sur pied d’un nouveau produit? La conquête d’un nouveau marché? L’atteinte d’un seuil de productivité en particulier? La solution devra venir de l’interne. Les employés, comme les gestionnaires, devront participer aux prochains exercices de planification stratégique. 

Nos organisations ne doivent pas considérer la fin éventuelle de la pandémie comme une occasion de revenir à la situation qui prévalait avant mars 2020. Les organisations québécoises doivent s’inspirer de ce que nous avons vécu pour donner son sens large à l’expression « équipe de travail ». Le style de leadership de nos gestionnaires devra à nouveau s’adapter, et ce, dans tous les domaines d’activités. Pour peu que nous laissions de côté nos vieilles façons de faire, l’économie du Québec et nos entreprises pourront finalement s’en voir grandies et plus résilientes.

AUTEUR_Charles_Milliard.jpg

Charles Milliard, président-directeur général, Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)


Source : Revue RH, volume 24, numéro 2 ─ MARS AVRIL 2021