La mobilisation des équipes et la préservation de la santé mentale sont sur toutes les lèvres, même celles de notre gouvernement. Le moral de la population serait à plat et les signes ne mentent pas. Mais à force de programmes et de webinaires pour optimiser le télétravail, stimuler l’engagement et devenir plus productif, le risque d’occulter la santé des équipes de travail augmente.
Certaines questions permettent de prendre le pouls de son équipe :
- Les membres de mon équipe admettent-ils leurs points faibles et leurs erreurs? Communiquent-ils ouvertement leurs opinions? Sacrifient-ils leurs intérêts personnels pour le bien du collectif?
- Les réunions sont-elles productives?
- Les décisions sont-elles prises efficacement?
Si vous avez répondu « non » à l'une de ces questions, votre équipe souffre peut-être de l’une des cinq dysfonctions d’équipe, modèle conceptualisé par Patrick Lencioni dans son ouvrage éponyme, où il nous enseigne que ce ne sont pas les ressources financières, les stratégies et la technologie qui feront d’une entreprise une organisation performante et concurrentielle… « Non, c’est le travail d'équipe qui demeure l'ultime avantage concurrentiel, […] parce qu'il est si puissant et si rare.[1] »
En effet, les membres d’une équipe homogène se font mutuellement confiance, débattent ouvertement de leurs idées, s’engagent à mettre en œuvre leurs plans d’action, se tiennent mutuellement responsables de la mise en œuvre de ces plans et se concentrent sur l’atteinte de résultats collectifs.
Cependant, lorsque les membres d’une équipe présentent des dysfonctions, les conséquences pour une entreprise et pour ses ressources humaines sont catastrophiques.
Lencioni a créé un modèle qui, d’une part, permet aux collectifs de s’évaluer et de déterminer les forces et les domaines d’amélioration, et d’autre part, de mettre en place des pistes de progrès en fonction des dysfonctionnements les plus importants.
Les cinq dysfonctionnements d’une équipe se présentent sous la forme d’une pyramide à cinq niveaux.
Source : LENCIONI, Patrick (2005). Optimisez votre équipe - Les cinq dysfonctions d’une équipe : une fable pour les dirigeants, Un monde différent.
1. Le manque de confiance
La tentation est grande de ne pas communiquer à propos de ses erreurs et de ses émotions. Bien que de laisser paraître sa vulnérabilité soit un enjeu pour certains, on ne peut pas construire une équipe solide sans établir la confiance. Il faut apprendre à se connaître et à se rendre vulnérable.
Quelques conseils pour développer un climat de confiance : favorisez le travail d’équipe et organisez des séances de travail en dyade ou en triade. Réalisez également des séances de rétroaction en effectuant des bilans et tenez des séances de remerciement en équipe pour souligner les bons coups.
2. La peur de la confrontation
En l’absence de confiance, une équipe ne peut pas s’engager dans un débat passionné d’idées duquel émergent la créativité et l’intelligence collective. En contrepartie, en établissant un environnement de travail ouvert au débat d’idées et bienveillant envers la différence des opinions, une équipe rend possible cette confrontation idéologique salutaire à la créativité. Dans ce contexte, les membres de l’équipe ne doivent pas être pénalisés en formulant des opinions et des commentaires divergents, mais respectueux puisque des reproches entraîneraient de la censure.
Quelques conseils pour s’engager dans une saine confrontation : mettez en place des méthodes de travail en équipe qui forcent à prendre des positions fermes et à les exprimer, à en débattre. Créez un mécanisme pour la prise de décision en groupe. Soyez un leader qui rassure et confirme la valeur ajoutée de la confrontation idéologique, et donnant une rétroaction claire sur les retombées positives.
3. L’absence d'engagement
L’engagement est fonction de deux éléments : la clarté et l’acceptation. En tirant parti des points de vue et des opinions de l’ensemble de ses membres, une équipe peut prendre une décision avec confiance et s’engager à sa mise en œuvre, sachant qu’elle a su bénéficier des idées de chacun. Quant à l’absence d’engagement, cela entraîne la déresponsabilisation et nuit à l’intelligence collective. Les répercussions sont néfastes, car les membres de l’équipe auront tendance à se censurer plutôt qu’à échanger lorsqu’ils sont en présence d’une personne désengagée, alors que d’autres peuvent passer beaucoup de temps précieux à tenter de mobiliser une personne qui finalement est indifférente aux résultats.
Quelques conseils pour assurer l’engagement : mettez par écrit les décisions prises, établissez le plan d’action à mettre en œuvre et l’échéancier à respecter. Soyez un leader qui pousse à prendre des décisions à l’intérieur d’une marge discrétionnaire.
4. Le manque de responsabilisation
Selon Lencioni, « la responsabilité serait la volonté qu’ont les membres de l’équipe de souligner à leurs pairs tout ce qui, dans leur rendement ou leur comportement, pourrait nuire au groupe ». Cette dernière est souvent peu pratiquée dans les équipes, car le besoin de plaire prend parfois le dessus sur le besoin de responsabilisation. On note une hausse de la demande pour le développement du leadership des gestionnaires, mais le manque de responsabilisation a longtemps pris sa source dans la difficulté de vivre le malaise interpersonnel que suscite une conversation difficile. Se déresponsabiliser est moins culpabilisant et permet d’éviter les conséquences négatives d’une action ou d’une décision audacieuse. Il faut du courage managérial pour agir et tenir des conversations difficiles.
Quelques conseils pour renforcer la responsabilisation : établissez et communiquez les buts et les critères de rendement. Soyez un leader qui utilise la rétroaction constructive et agissez comme arbitre disciplinaire lorsque nécessaire. Encouragez le développement et les manifestations du courage managérial respectueux.
5. L’indifférence aux résultats
Si les membres de l’équipe ne se tiennent pas mutuellement responsables de leurs contributions, ils auront tendance à se concentrer sur leurs besoins personnels, contribuant ainsi à nourrir l’égo et l’individualisme.
Quelques conseils pour orienter l’attention aux résultats collectifs : établissez les résultats que l’équipe doit atteindre et centrez la dynamique des récompenses sur les résultats et non sur d’autres facteurs personnels. Soyez un leader qui se montre humble et objectif.
En conclusion, Patrick Lencioni nous rappelle lui-même que « la confiance serait la certitude qu’ont chacun des membres de l’équipe que les intentions de leurs pairs sont bonnes, et qu’il est inutile d’être sur ses gardes. » Naturellement, une belle lecture complémentaire pour développer des relations de confiance mutuelle avec autrui serait Les quatre accords toltèques de Don Miguel Ruiz.
Médina Cayer, MBA, Adm.A., C.M.C, CRHA, ACC
Coach, formatrice, consultante et cofondatrice d’Iceberg Management
Julie Tardif, CRHA
Conférencière, formatrice, consultante et cofondatrice d’Iceberg Management