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Stratégie de développement durable : gouvernance et rémunération des cadres

Cet article propose sans prétention quelques pistes de réflexion pour le conseiller en ressources humaines qui se soucie de la bonne direction de l’entreprise en collaboration avec le dirigeant de l’entreprise.
13 avril 2021

Inspiré par la saine gouvernance d’entreprise et le rôle que peuvent jouer les PME dans notre société, cet article propose sans prétention quelques pistes de réflexion pour le conseiller en ressources humaines qui se soucie de la bonne direction de l’entreprise en collaboration avec le dirigeant de l’entreprise. 

Bien évidemment, le propriétaire-actionnaire exigera la saine gouvernance financière, mais il se sentira également interpelé par la gouvernance des enjeux sociaux et environnementaux. En visant ces objectifs, le propriétaire-actionnaire, en collaboration avec son conseiller en ressources humaines, pourrait ainsi favoriser un lien fort entre la rémunération des cadres et la performance de son entreprise.

Qu’est-ce qu’une saine gouvernance d’entreprise?

La gouvernance d’entreprise consiste à assurer la bonne direction de l’entreprise afin qu’elle puisse déployer son plan stratégique de manière responsable, dans le respect des lois et une bonne gestion financière, et ce, en respectant l’intérêt des actionnaires et des autres parties prenantes, notamment les clients, les créanciers, les fournisseurs, les employés et l’environnement. 

De nos jours, une saine gouvernance doit tenir non seulement compte des profits, mais aussi de l’environnement, des enjeux sociaux et de la société. Ce n’est plus que l’affaire des grandes entreprises! Effectivement, les entreprises se dotent de plus en plus d’activités pour protéger l’environnement et elles désirent être de bons citoyens corporatifs en participant à des causes qui leur tiennent à cœur. En respectant des objectifs économiques, sociaux, mais aussi environnementaux, l’entreprise se trouve à faire ce qu’on appelle communément « du développement durable », et ce, pour répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures.

« La prise en compte des dimensions environnementale, sociale et économique est essentielle à la croissance à long terme d’une entreprise. La pression exercée sur les ressources naturelles, la concurrence sur les marchés internationaux et les défis d’attraction et de rétention d’une main-d’œuvre qualifiée font du développement durable non seulement une nécessité, mais aussi une occasion d’affaires. » (https://www.economie.gouv.qc.ca/f)

Pour revenir à la gouvernance proprement dite, ce sera normalement le conseil d’administration qui s’assure de bien harmoniser les intérêts des actionnaires et des autres parties prenantes. En d’autres mots et lorsqu’il existe, le CA devient un mécanisme de surveillance entre le plan stratégique de l’entreprise et le personnel dirigeant. Il délègue en quelque sorte aux dirigeants le pouvoir des actionnaires pour opérationnaliser les objectifs de l’entreprise. 

Rappelons-le, les objectifs délégués sont tant financiers que non financiers. Dans le contexte de la grande entreprise publique, le conseil va donc se réunir pour prendre des décisions sur les orientations de l’entreprise et veiller aux résultats. Pour ce faire, plusieurs comités dans diverses disciplines viendront l’appuyer, tels que le comité d’audit financier, le comité de rémunération, etc. Toutefois, pour s’assurer que les dirigeants travaillent bien en fonction des besoins des actionnaires, le plan de rémunération des cadres devient l’élément décisif et central en gouvernance pour que les intérêts des deux parties soient respectés. Mais qu’en est-il auprès de la PME?

De son côté, la PME ne possède pas toujours un conseil d’administration juridiquement constitué. Elle est plus souvent gérée par un entrepreneur-actionnaire ou un comité de direction ou un conseil de famille qui s’occupera de la régie de l’entreprise. Par conséquent, le président de la PME et son comité de gestion, qui veulent honorer un plan stratégique avec des objectifs financiers, sociaux et environnementaux peuvent le faire en collaboration. De la même façon, le propriétaire de la PME en tant qu’actionnaire principal bien souvent, ou en collaboration avec un investisseur institutionnel ou individuel, sera entouré de personnes avec des compétences clés pour veiller à la saine gouvernance de son entreprise. À ce sujet, le conseiller en ressources humaines est un agent de changement incontournable pour développer une culture tournée vers le développement durable, mais aussi pour bien comprendre les objectifs de l’entreprise afin de bien les communiquer au personnel. Doté d’une vision globale, le CRHA ǀ CRIA oriente les programmes en fonction des missions que se donne l’organisation et il devient un acteur clé dans la gouvernance stratégique des programmes de performance, de relève et de rémunération des cadres. 

Le plan de rémunération devient-il aussi important pour la PME entre l’actionnaire et son personnel dirigeant pour bien respecter les intérêts des deux parties? La réponse est oui. Le programme de rémunération constitue l’un des principaux incitatifs à l’atteinte des objectifs de l’organisation.  

Le propriétaire de la PME, avec ses proches conseillers, doit méticuleusement développer et surveiller le programme de rémunération. Celui-ci doit respecter les capacités financières de l’entreprise et du coup, être conforme aux intérêts des actionnaires. Il doit surtout encourager la performance des cadres, ce qui entraînera une amélioration de la performance de toute l’entreprise (du point de vue financier ou autre). 

En raison des forts budgets alloués à la rémunération des cadres et de leur influence sur la performance de l’entreprise, les systèmes de rémunération sont considérés comme des leviers essentiels pour la performance organisationnelle. Le propriétaire-actionnaire doit alors veiller à fixer des objectifs clairs et « SMART » à son personnel-cadre et bien évaluer leur performance par la suite. 

Parmi les objectifs à évaluer, on retrouve entre autres, l’amélioration des bénéfices de l’entreprise, la fidélisation des employés, le gain d’une part de marché, la structure des opérations pour assurer la croissance des ventes, des jalons à rencontrer pour diminuer l’empreinte gouvernementale, l’assurance d’une main-d’œuvre diversifiée, le développement et la formation des ressources humaines, etc. 

Se doter d’un bon outil d’évaluation de performance du personnel-cadre en harmonie avec les objectifs organisationnels est primordial. À ceci, s’ajoutent de bonnes habiletés d’évaluation ainsi qu’un bon courage managérial pour établir une évaluation juste, cohérente et corriger le tir au besoin! Bien évidemment, des changements peuvent survenir en cours d’année. Ces événements viennent toucher l’entreprise et sont parfois hors de son contrôle. Il faut donc faire un suivi périodique des objectifs donnés aux directeurs. En contexte particulier de pandémie, les entreprises verront à rajuster leur plan de rémunération incitative (primes de rendement par exemple) tout en respectant l’aspect financier et motivationnel.

Pour conclure, le propriétaire-actionnaire qui se retrouve trop au centre des opérations doit trouver du temps pour être au-dessus de la mêlée. En plus du programme de rémunération des cadres, il doit veiller à déployer une vision claire de l’entreprise, s’entourer des bons talents, prendre des décisions stratégiques de qualité, diriger et évaluer son équipe de direction, etc. Des employés responsables et une bonne structure organisationnelle libèrent le propriétaire-actionnaire afin qu’il puisse vaquer à ses responsabilités de gouvernance et de croissance de l’entreprise. 

Nous encourageons fortement la PME à se pencher sur une gouvernance forte tant pour l’atteinte de ses cibles financières que ses cibles sociales et environnementales; cela lui conférera un net avantage concurrentiel et être à l’avant-garde dans ses pratiques de gestion. 

Références

  • Jensen, C., Meckling, W., H., (1976) “Theory of the Firm: Managerial Behavior, Agency Costs and Ownership Structure”. Journal of Financial Economics, V. 3, No. 4, pp. 305-360.
  • Beaulieu, Marie-Christine (2018), La gouvernance et la rémunération des cadres, (essai de maîtrise dirigé par Mme Camélia Dumitriu). Université du Québec à Montréal.
  • Allali, Brahim (2002), Conseils d'administration de PME : un examen de la documentation, Cahier de recherche 2002-06 juin 2002 ISSN : 0840-853X   
  • https://www.economie.gouv.qc.ca/fileadmin/contenu/documents_soutien/developpement_durable/guide_demarche_dd.pdf
  • Dumitriu, C. (2020) Gouvernance et rémunération des cadres (article en cours de rédaction suite à mon essai déposé)
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Par : Marie-Christine Beaulieu, Msc., CRHA
Consultante senior en ressources humaines. Gestion, option stratégie et responsabilité sociale et environnementale de l’entreprise

Source : Revue RH, volume 24, numéro 2 ─ MARS AVRIL 2021