Chez Sogitex, une entreprise spécialisée dans l’hygiène et la salubrité des commerces, institutions et industries, la pénurie de main-d’œuvre s’est fait sentir bien avant la pandémie.
« Déjà, on est en Abitibi-Témiscamingue, explique la directrice des ressources humaines de l’entreprise, Marie-Pascale McGuire. En étant en région plus éloignée, c’est encore plus difficile de recruter. On a déjà affiché des postes pendant des mois parce que personne ne postulait. Alors, on n’a pas eu le choix d’être créatifs dans notre façon de faire. »
Avant même de songer à recruter du nouveau personnel, l’entreprise a pris les devants et s’est interrogée sur la manière de retenir la main-d’œuvre qui œuvrait déjà en son sein.
« Comme employeur, on pense qu’on sait ce que les employés veulent, ce qui les intéresse et ce qui les attire, mentionne Marie-Pascale McGuire. Nous, on a préféré réaliser un sondage interne auprès des employés pour connaître ce qu’ils pensaient et de quelle manière on pouvait rendre nos conditions de travail plus attrayantes pour eux et de futurs collègues. »
Au bout du compte, les conditions de travail et les avantages sociaux ont été revus de fond en comble. Fini les quarts de nuit; les postes sont désormais davantage axés sur le terrain; la formation offerte et les cheminements de carrière ont été bonifiés, tout comme les avantages sociaux.
« On a aussi revu notre programme d’assurance collective, précise Marie-Pascale McGuire. On a amélioré les modules et la couverture, la télémédecine est maintenant offerte, et le programme d’aide aux employés a été bonifié. »
« Ce qui nous démarque, c’est notre flexibilité au travail, poursuit la directrice. À la base, on est une entreprise familiale. On a conservé cet aspect-là et on mise là-dessus. »
Nouveaux employés et employées, nouvelles réalités
Malgré tout, la situation géographique de Sogitex ne lui permet pas d’embaucher à la hauteur de ses besoins. C’est pourquoi la PME s’est tournée vers le recrutement à l’international, principalement en Afrique.
Une réalité qui amène toutefois de nouveaux enjeux en matière de gestion des ressources humaines, reconnaît Marie-Pascale McGuire.
« Évidemment, le fait qu’on parle français dans beaucoup de pays africains est facilitant, mais ce n’est pas le même français qui est parlé au Québec, indique-t-elle. Au début, se comprendre, ce n’est pas toujours évident! »
L’adaptation à une nouvelle culture est aussi à prendre en compte. Car en plus de devoir loger adéquatement ces nouvelles recrues – le tout dans un contexte de pénurie de logements, d’enseignants et même de garderies, en Abitibi, rappelle la directrice – il faut les intégrer comme il se doit.
« Bien avant l’intégration professionnelle, il y a l’intégration personnelle. Si on veut que ça soit un succès, on doit s’investir pleinement comme employeur. Ces personnes-là, il a fallu tout leur apprendre de A à Z, ajoute Mme McGuire. Ce sont des adultes qui toutefois ne connaissent pas nos façons de faire. C’est comme si on partait à zéro. »
Voir à son transport, à ses finances personnelles, apprivoiser l’hiver, pelleter et même utiliser un four : autant de connaissances qu’il a fallu transmettre aux nouvelles recrues.
La recette du succès
En parallèle, Sogitex a aussi préparé les membres de son personnel à l’accueil de ces nouveaux collègues venus d’ailleurs.
« On a divisé notre personnel en plusieurs petites équipes pour pouvoir y greffer de nouveaux travailleurs, relate Marie-Pascale McGuire. On a ensuite rencontré tout le monde et on leur a dit : « Voici ce qui va se passer, voici ce qui pourrait arriver.» On leur a donné une formation et un guide préparatoire pour que chaque personne soit en mesure de bien accueillir ces nouvelles ressources. »
Sur les 250 personnes employées par Sogitex, environ une cinquantaine est issue de l’immigration.
L’intégration s’est finalement bien déroulée. Tous sont encore à l’œuvre chez Sogitex; trois autres recrues devraient débarquer à Rouyn-Noranda d’ici la fin de l’année. Un employé originaire du Maroc a recommandé son frère, qui sera embauché sous peu.
« Ça veut dire qu’on est un facteur de succès. On est en renouvellement de permis de travail pour un grand nombre de ces gens. Ça veut dire qu’ils veulent rester et qu’on veut les garder », relève Marie-Pascale McGuire.
« Tout ça me fait dire que la préparation est la clé du succès, poursuit-elle. On s’est investi bien avant l’arrivée de ces travailleuses et travailleurs d’Afrique. Oui, c’était difficile au début, c’était nouveau pour nous aussi. »
L’approche de l’entreprise lui a valu plusieurs prix dans la dernière année. Sogitex a notamment remporté les prix Diversité et inclusion et Entreprise de l’année de la Chambre de commerce et d’industrie de Rouyn-Noranda; celle de Val-d’Or l’a nommée Employeur de choix, tandis que celle d'Amos lui a décerné le Coup de cœur du jury.
Signe que l’approche a porté ses fruits, une employée appartenant à la première cohorte rapporte toujours des robes à Marie-Pascale McGuire lorsqu’elle retourne dans son pays.
« Dans sa culture, c’est une manière de dire qu’on fait partie de la famille », explique la directrice.
N’est-ce pas là le meilleur symbole d’intégration qui soit?