Dans le contexte de pénurie de personnel qui affecte tous les secteurs, beaucoup d’organisations en viennent à promouvoir un employé technique ou un professionnel déjà en place pour assumer un poste de gestion, et ce, même si certaines compétences font défaut. Elles sont aussi prêtes à endurer les performances d’un gestionnaire en deçà des attentes quelque temps, sachant que le remplacer sera long et ardu. Puis, après un certain moment, la tolérance est épuisée et il importe d’implanter des solutions sur-le-champ.
En tant que coachs, beaucoup d’organisations nous appellent lorsque la goutte vient de déborder. Si le gestionnaire qui offre une performance insatisfaisante admet ses difficultés et se montre motivé à s’améliorer, tout va bien. Mais s’il ne reconnaît pas ses limites et ne se montre pas intéressé à s’investir dans une démarche de coaching, peut-on malgré tout lui imposer un coaching comme condition non négociable à rester en poste ?
Techniquement, d’un point de vue légal, imposer un coaching pour améliorer la performance contre la volonté d’un gestionnaire pourrait tenir la route pour remplir ses obligations de soutien comme employeur. Cependant, en pratique, cette initiative est vouée à l’échec puisque personne n’en ressortira gagnant. Voici pourquoi :
Une question de biologie du cerveau
Le vaste courant des recherches en neurosciences nous a révélé des processus surprenants relativement au fonctionnement du cerveau humain. Ainsi, lorsqu’il s’agit d’apprendre, l’adulte a besoin d’être motivé intrinsèquement et poussé par un besoin. On a aussi découvert que les émotions ont un impact majeur sur l’apprentissage. En effet, les émotions positives et la soif d’apprendre facilitent l’apprentissage, tandis que les émotions négatives le bloquent.
D’ailleurs, quand une menace est perçue par le cerveau, en l’occurrence ici, quand on cherche à nous imposer un coaching contre notre gré, le cerveau tombe en mode survie et déclenche des réactions de protection, lesquelles se manifestent en résistance.
Ainsi, les coachs qui seront présentés à ces gestionnaires verront essentiellement l’un ou l’autre des comportements contreproductifs suivants apparaître :
- Nier ses difficultés ou se montrer évasif quant à celles-ci ;
- Participer en apparence sans s’investir;
- Attribuer ses difficultés aux autres (équipe difficile, manque de soutien de l’organisation, processus défaillants, etc.) ;
- Présenter peu ou pas de progrès au fil des rencontres, ne poser aucune action à la suite de ses prises d’engagement, laisser planer un silence radio après quelques rendez-vous ;
- Confronter son coach, mettre en doute son approche, s’outrer d’être infantilisé, etc.
Bref, pour qu’un coaching produise des résultats, cette démarche doit être volontaire. C’est pourquoi les coachs vigilants et sensibles au contexte refuseront d’accompagner un gestionnaire qui se voit imposer une telle approche, pour le bien de tous.
Quoi faire avant d’entreprendre des démarches pour offrir un coaching à un gestionnaire en difficulté ?
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Évaluer votre propre confiance envers le gestionnaire
Avant d’entreprendre toute action, posez-vous les questions suivantes et répondez-y en toute honnêteté : croyez-vous vraiment en l’amélioration de ce gestionnaire ? Avez-vous confiance qu’il pourra éventuellement satisfaire vos attentes ? Êtes-vous prêt à vous investir pleinement dans le succès de son développement ? Si l’une de vos réponses reste négative, n’allez pas vers le coaching. Ce gestionnaire semble déjà brûlé dans votre esprit et il serait vain de lui faire miroiter de l’espoir.
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Favoriser de l’ouverture au coaching
En outre, si le gestionnaire éprouve une difficulté à reconnaître ses lacunes, favoriser l’introspection est la prochaine étape à réaliser. Attention, il faut y aller en douceur pour donner de la rétroaction ! En effet, imposer un "feedback" sans attendre que la personne se dise réceptive déclenchera inévitablement des mécanismes de défense. Ainsi, une attitude bienveillante axée sur le non-jugement est à prôner afin de l’amener à se confier plus aisément sur ses zones d’inconfort. L’autre alternative demeure de s’adjoindre un coach externe qui pourra offrir un "feedback 360", sans obligation de partager les résultats à l’organisation. Le 360 est le meilleur outil pour prendre conscience de son impact sur son environnement, mais il est hautement confrontant, surtout pour une personne avec une faible introspection. C’est pourquoi lever l’obligation de partager les résultats à l’employeur réduira considérablement les réticences à se prêter à un tel exercice.
Pour arriver à des résultats prometteurs, rappelez-vous que la patience sera de mise ! En effet, laisser tomber son armure peut s’avérer un long processus pour votre gestionnaire.
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Créer un espace sécuritaire
Enfin, vous devez mettre en place un espace sécuritaire qui favorisera des émotions positives et qui dissipera le stress autour de la démarche.
À cet égard, voici quelques actions à poser :
- Assurer le soutien de l’organisation et du supérieur hiérarchique, faire équipe tous ensemble pour l’amélioration ;
- Changer l’appellation coaching de redressement par coaching de développement ;
- Détacher les résultats du coaching de toute conséquence négative comme une rétrogradation, une baisse de salaire ou un congédiement ;
- Éviter de donner un échéancier serré pour observer des progrès, comme le fameux 3 mois pour s’améliorer ;
- Laisser le gestionnaire choisir son coach.
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À propos des auteurs
Associée et directrice des services-conseils depuis 2017, Anik Charest possède plus de 30 années d’expérience en gestion, en développement organisationnel, en coaching ainsi qu’en formation.
Psychologue organisationnel et Coach ICF (International Coach Federation), Richard Desgagné est un professionnel en consultations depuis plus de 30 ans. Sa vaste expérience en évaluation de potentiel et de coaching lui a permis d’être en relation avec une multitude de gestionnaires à différents niveaux dans le secteur privé, public, parapublic et des multinationales.
À propos de brh
Chez brh, l’humain fait la force. Brh œuvre dans l’évaluation, le recrutement, le coaching, le développement organisationnel et la gestion de carrière. La mission brh, c’est de développer et de propulser les talents afin de faire rayonner les entreprises partenaires à travers une couverture provinciale, qui est constituée d’une force collective de 60 experts, 10 bureaux et 5 champs de pratiques.