- Auteur / Collaborateurs et collaboratrices
- Droits d’auteur
- Avis d’utilisation
- Introduction
- Les objectifs du plan de réintégration
- À garder en tête
- Quoi faire et comment le faire
- Rencontre de planification du retour
- Prévoir une communication aux collègues
- Réintégration (accueil)
- Suivis ponctuels
- Suivi hebdomadaire
- Quelques bonnes pratiques de réintégration au travail
- Conclusion
Auteur
Merci à David Fiset McGrath, CRIA, MBA, directeur en services-conseils, gestion stratégique des ressources humaines chez Mallette S.E.N.C.R.L., pour sa collaboration à l’élaboration du contenu de cet outil.
Collaborateur et collaboratrices
Merci à Me Marie-Krystel Ouellet, CRHA, avocate senior chez Norton Rose Fulbright Canada S.E.N.C.R.L., s.r.l./LPP, pour sa collaboration à la rédaction de la section « À garder en tête » et à la révision juridique de l’outil.
Merci à Joanne Poitras, CRHA, consultante chez Les consultants Arsenault et Poitras Inc., pour la validation de
cet outil.
Merci à Jean-Pierre Morin, CRHA, inspecteur pour l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, pour la validation déontologique et réglementaire de cet outil.
Droits d’auteur
La reproduction, la publication et communication de ce document dans son intégralité sous quelque forme ou par quelque moyen (électronique, mécanique ou autre, y compris la photocopie, l’enregistrement ou l’introduction dans tout système informatique de recherche documentaire) est interdite sans le consentement écrit de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés.
Par contre, pour les CRHA ǀ CRIA ainsi que les abonnés au Carrefour RH, il est permis d’utiliser les exemples contenus dans ce document avec les adaptations nécessaires sans autorisation de l’Ordre.
Avis d’utilisation
Dans le cadre de sa mission de protection du public, l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés vous propose cet outil. Ce dernier doit toujours être adapté selon le contexte, les besoins de votre organisation ainsi qu’en tenant compte de l’ensemble des parties prenantes. Il ne constitue en aucun cas un avis juridique.
Si vous êtes un professionnel agréé, vous devez toujours vous référer à votre code de déontologie, aux normes professionnelles, ainsi qu’aux lois et règlements en vigueur et consulter un conseiller juridique au besoin.
Par ailleurs, les propos qui y sont exprimés n’engagent que leur auteur et l’Ordre des conseillers en ressources humaines et en relations industrielles agréés décline toute responsabilité à leurs égards.
Introduction
Qu’il s’agisse d’une absence prolongée suivant une invalidité, un congé de maternité, un congé sans solde ou pour toute autre raison, l’absence d’un employé demeure un enjeu de taille. En plus du potentiel humain manquant, l’absence engendre d’autres contraintes ainsi que des coûts importants pour l’entreprise et son écosystème.
Les absences prolongées étant périodiques, il y a fort à parier que l’employé touché reprendra ses fonctions le moment venu, et il est donc crucial de prévoir ce retour. Afin d’assurer le succès de cette démarche de retour au travail, on se doit de planifier correctement la réintégration de l’employé qui revient d’une absence ou d’une absence prolongée afin de lui offrir un environnement de travail idéal, adapté à sa situation. Le présent document expose les objectifs, étapes et bonnes pratiques à adopter en matière de réintégration au travail.
Les objectifs du plan de réintégration
- Favoriser la réussite de la réintégration de l’employé du premier coup;
- Adapter le contexte du travail à la capacité physique et psychologique de l’employé;
- Clarifier les attentes de chacun;
- Faciliter la communication entre l’employé et son gestionnaire quant aux aspects liés à son retour au travail.
À garder en tête
La Charte des droits et libertés de la personne[i] (ci-après appelée « la Charte ») couvre tous les rapports privés au Québec, dont les rapports de travail. En tant qu’employeur, vous avez l’obligation d’adapter le travail ou les conditions de travail d’un employé qui se trouve dans l’incapacité d’effectuer ses tâches régulières en raison d’un motif énoncé à l’article 10 de la Charte, à moins de pouvoir démontrer que cet accommodement représente une contrainte excessive. L’obligation d’accommodement raisonnable comporte par ailleurs l’obligation de chercher une solution raisonnable en vue de minimiser les impacts résultant de la mesure d’accommodement mise en place pour l’employé. Elle ne vous oblige cependant pas à satisfaire pleinement toutes les attentes de l’employé qui réintègre son travail[ii]. Le processus d’accommodement exige en effet que l’employé y participe de bonne foi et se montre ouvert à considérer des mesures autres que celle qu’il a proposée si cette dernière constitue une contrainte excessive pour l’employeur[iii].
Dans un contexte de retour au travail, l’interdiction de discriminer en fonction d’un handicap revêt une importance particulière pour l’employé qui exerce les droits et libertés prévus à la Charte[iv]. À titre d’exemples, pourront notamment être considérées comme un handicap les douleurs lombaires, les limitations à déplacer des charges lourdes, une condition pulmonaire limitante, la dépression, les troubles d’anxiété et de la personnalité, et la fibromyalgie[v].
Ainsi que l’ont rappelé les tribunaux supérieurs très récemment, l’obligation d’accommodement a pour objectif de « maintenir au travail en toute égalité [un employé] incapable de reprendre son travail en raison d’un handicap, en lui offrant un emploi auquel s’attachent des conditions de travail et des possibilités de gains comparables à celles de son emploi originel, sans imposer à l’employeur une contrainte excessive »[vi].
L’accession à un poste différent, la fragmentation des tâches, le réaménagement des horaires habituels et la réorganisation administrative des tâches d’un groupe d’employés sont autant d’exemples de mesures d’accommodement raisonnables. Cela dit, l’obligation d’accommodement n’exige pas d’un employeur qu’il crée un poste sur mesure pour un employé aux capacités limitées[vii].
Mais comment savoir si un accommodement constitue une contrainte excessive pour une entreprise? La question, lorsqu’elle est posée, doit être évaluée avec souplesse et au cas par cas[viii], en tenant compte notamment des capacités et incapacités individuelles de l’employé, des exigences de son poste, du coût financier et de la taille de l’entreprise, de l'atteinte à la convention collective, de l’effet de la mesure sur les autres employés et de l'interchangeabilité des effectifs et des installations[ix].
Il y a contrainte excessive lorsqu’il est déterminé que l’employé ne pourra plus remplir les obligations fondamentales rattachées à la relation de travail dans un avenir prévisible, et qu’il est raisonnable de croire qu’aucune amélioration n’est possible à cet égard[x]. Sous réserve d’une contrainte excessive, la mesure d’accommodement doit donc permettre à l’employé de fournir sa prestation de travail[xi].
Soulignons que dans le domaine de l’emploi, un employeur peut imposer une exigence professionnelle ayant un effet discriminatoire prohibé en vertu de l’art. 10 de la Charte lorsqu’une telle exigence est fondée sur les aptitudes et compétences requises par un emploi[xii].
Enfin, le devoir d’accommodement cesse à partir du moment où l’employé est reconnu apte au travail[xiii] ou lorsqu’aucun retour au travail n’est envisageable dans un avenir prévisible.
Quoi faire et comment le faire
Voici quelques étapes à franchir, échéanciers à respecter, objectifs à atteindre et questions à aborder pour vous aider à préparer la réintégration au travail d’un employé. Procédant ainsi, vous éviterez d’omettre des éléments importants qui peuvent influencer l’issue du processus.
Conseil :
Si vous œuvrez dans un milieu syndiqué, ne manquez pas d’impliquer le syndicat à chacune des étapes présentées ci-dessous. Il est important de mentionner que l’obligation d’accommodement est une obligation partagée entre l’employeur, le syndicat et l’employé.
Tout au long du processus, assurez-vous également de préserver la confidentialité des informations et discussions, et veillez à ce que le dossier de l’employé soit complet et sécurisé. N’oubliez pas que le devoir de précaution du CRHA|CRIA exige qu’il protège les informations confidentielles recueillies dans l’exercice de ses fonctions.
Étape 1 - Rencontre de planification du retour
En présence de l’employé, de son gestionnaire, d’un représentant des ressources humaines, et du syndicat si on se trouve en milieu syndiqué.
Échéancier : 1 à 3 semaines avant le retour
Objectifs
- Planifier par écrit le déroulement du retour.
- Discuter des éléments qui entourent les conditions de travail.
- Valider la capacité physique et psychologique de l’employé à reprendre ses activités.
- Identifier les craintes liées au retour au travail.
- Évaluer les facteurs de rechute (dans le cas d’une invalidité).
- Si l’employé est non syndiqué, tenir compte de l’équité interne (respect de l’évaluation du poste).
- Préciser les attentes de l’employé ainsi que celles de son gestionnaire.
- Établir des indicateurs permettant de mesurer le succès du retour.
Questions à aborder
- L’horaire de travail doit-il être revu ?
- La charge de travail attendue doit-elle être revue ?
- Les compétences requises ont-elles évolué depuis l’arrêt de travail de l’employé ?
- L’employé a-t-il les compétences nécessaires pour effectuer ses nouvelles tâches ?
- L’employé a-t-il des appréhensions face à son retour au travail ?
- L’employé a-t-il besoin de mesures d'accommodement pour retourner au travail ?
Étape 2 - Prévoir une communication aux collègues
Organisée et dirigée par un représentant des ressources humaines, et du syndicat si on se trouve en milieu syndiqué.
Échéancier : ±1 semaine avant le retour
Objectifs
- Informer les collègues concernés du retour.
- Assurer une transparence quant aux modalités d’accommodement ou à la reprise du travail, sans toutefois divulguer d’informations confidentielles.
Questions à aborder
- Les collègues immédiats auront-ils un rôle particulier à jouer dans le retour de l’employé ?
- Quelles sont les informations pertinentes à transmettre aux collègues concernant le retour de l’employé ?
- Y a-t-il des communications précises à transmettre à des personnes particulières ?
- Comment les RH et le syndicat se partageront-ils les tâches au niveau des communications (dans un milieu syndiqué) ?
Étape 3 - Réintégration (accueil)
En présence de l’employé, de son gestionnaire, d’un représentant des ressources humaines, et du syndicat si on se trouve en milieu syndiqué.
Échéancier : Le jour du retour
Objectifs
- Réviser le plan de retour.
- Faire une mise à jour de l’évolution des dossiers et/ou projets en cours.
- S’assurer de l’adhésion de l’employé au plan de retour.
- Adopter les changements nécessaires. Exposer le travailleur aux mêmes problèmes qu’avant son départ n’est pas garant de réussite. N'oublions pas qu’une deuxième absence risque d'être plus longue.
- Adapter au besoin le plan de retour.
Questions à aborder
- L’employé est-il à l’aise avec les éléments prévus pour assurer la qualité et le succès de son retour ?
- À son retour, l’employé comprend-il bien la teneur des tâches et projets qui le concernent ?
Éatpe 4 - Suivis ponctuels
Effectués par le gestionnaire de l’employé, accompagné du syndicat si on se trouve en milieu syndiqué.
Échéance : Quotidiennement
Note
En cas de retour progressif, cette étape peut s’échelonner sur quelques semaines.
Objectifs
- S’assurer du bon déroulement du retour.
- Valider la capacité réelle (physique et/ou psychologique) de l’employé à réaliser ses tâches.
- Identifier les irritants et les corriger rapidement.
Questions à aborder
- Comment va le moral?
- Comment se passe le retour?
- Qu’est-ce qui va bien?
- Qu’est-ce qui va moins bien?
- Que pourrait-on faire pour que le retour se déroule encore mieux?
Étape 5 - Suivi hebdomadaire
En présence de l’employé, de son gestionnaire et d’un représentant des ressources humaines.
Échéance : À la fin de la première semaine de retour, puis hebdomadairement.
Note
En cas de retour progressif, cette étape peut s’échelonner sur quelques semaines.
Objectifs
- Faire une rétroaction sur le déroulement de chaque semaine.
- Planifier la semaine suivante.
- Faire un jumelage avec un autre membre de l’équipe au besoin. Ce processus est souvent très sécurisant et brise l’isolement.
Questions à aborder
- L’employé se sent-il capable de poursuivre à ce rythme ou d’augmenter la charge ?
Quelques bonnes pratiques de réintégration au travail
Pratique n° 1 : Consigner par écrit le plan de réintégration et l’utiliser comme une entente entre l’employé et son gestionnaire en ce qui concerne les modalités de réintégration. Si vous êtes dans un milieu syndiqué, l’entente sera tripartite puisque l’implication du syndicat sera nécessaire.
Pratique n° 2 : Garder une trace écrite des échanges avec l’employé et de l’évolution de sa capacité à reprendre le cours de ses tâches régulières.
Objectif de ces pratiques
Conserver une trace écrite permet de s’y référer en cas de malentendu et d’ainsi faciliter les communications avec l’employé et clarifier les attentes de chacun.
Pratique n° 3 : Faire preuve d’ouverture et de flexibilité.
Pratique no 4 : Rester optimiste et positif.
Pratique n° 5 : Respecter les craintes et les limites de l’employé.
Objectif de ces pratiques
Mobiliser l’employé afin qu’il se sente considéré et appuyé plutôt que soumis à la contrainte. Une telle attitude favorisera la réussite de sa réintégration.
Pratique n° 6 : Être proactif au niveau des communications.
Pratique n° 7 : Impliquer le syndicat dans les milieux concernés.
Pratique n° 8 : Être proactif dans l’évaluation du milieu de travail et ne pas sous-estimer l’impact de la bienveillance sur la sécurité psychologique des travailleurs.
Objectif de ces pratiques
Prenant en charge les communications, les suivis et l’évaluation du milieu de travail, vous conservez une influence importante sur le rythme du retour au travail de l’employé, ce qui favorisera la réussite de la réintégration.
Pratique n° 9 : Évaluer le processus et garder des traces écrites.
Objectif de cette pratique
Conserver une vision d’amélioration continue en vous assurant que les réintégrations au travail se passent encore mieux à l’avenir.
Conclusion
Lorsqu’une réintégration en emploi est gérée inadéquatement, elle peut se prolonger dans le temps, entraînant une perte d’efficacité importante pour votre entreprise et un risque de démobilisation élevé pour l’employé concerné. Prendre le temps de planifier le retour, de le communiquer et d’être présent pour la personne touchée par cette situation permettra d’améliorer la réussite de ce retour. Profitons de ces situations pour mieux comprendre nos milieux de travail, car ce sont là de belles occasions de nous remettre en question et d'offrir un milieu de travail qui protège l’intégrité physique et psychologique de nos travailleurs. Abordez les processus de réintégration proactivement, et votre organisation et vos employés en sortiront assurément gagnants !