Intitulé
Centre intégré de santé et de services sociaux de l'Abitibi-Témiscamingue (Hôpitaux, CLSC), 2025 QCTAT 3012
Juridiction
Tribunal administratif du travail, Division de la santé et de la sécurité du travail (T.A.T.), Abitibi-Témiscamingue
Type d'action
Contestation par l'employeur d'une décision relative à un transfert des coûts. Contestation rejetée.
Décision de
François Aubé, juge administratif
Date
17 juillet 2025
Le travailleur, un technicien en bâtiment, a subi une lésion professionnelle, soit un état de stress aigu, lorsqu'un collègue l'a agressé verbalement. L'employeur a demandé un transfert d'imputation au motif qu'il était obéré injustement par le coût des prestations reliées à cette lésion. La CNESST a rejeté la demande et cette décision a été confirmée à la suite d'une révision administrative.
Décision
Selon une jurisprudence majoritaire, 2 critères sont requis pour conclure qu'un employeur est obéré injustement. Il doit y avoir, premièrement, une situation d'injustice, soit une situation étrangère aux risques que l'employeur doit supporter, et, deuxièmement, une proportion des coûts attribuable à la situation d'injustice qui est significative par rapport aux coûts découlant de l'accident du travail en cause. En l'espèce, l'employeur doit gérer des établissements de santé comme des hôpitaux et des CLSC, qui emploient plusieurs centaines d'employés et plusieurs corps de métiers ou de professions. Il a prévu une «politique en matière de promotion de la civilité et de prévention du harcèlement et de la violence en milieu de travail», qu'il a déposée au dossier du Tribunal. Or, la question de la violence verbale est largement discutée dans sa politique, car elle fait partie des préoccupations de l'employeur, ce type d'événement étant inévitable dans les milieux de travail. Le Tribunal en conclut que la violence verbale fait partie des risques inhérents aux activités de l'employeur. Le travailleur a décrit le contexte de l'événement comme une «agression verbale intense». Or, on ne trouve aucune mention au dossier des propos tenus par le collègue ou encore de sa version des faits, alors que l'employeur a sûrement effectué une enquête à la suite de cet événement. À la lecture du court résumé de l'événement figurant au dossier, on constate par ailleurs qu'il n'est pas question de violence physique. Le collègue a signifié sans détour au travailleur qu'il était exaspéré qu'il lui fasse «faire la job sale», et il y a eu une certaine violence verbale en raison de son ton et de la manière dont il a abordé celui-ci. Toutefois, il n'y a pas eu de menaces de s'en prendre au travailleur, et aucun acte criminel n'a été commis. Bien que le comportement en cause soit répréhensible, l'événement ne s'est produit que 1 fois et a été de très courte durée. C'est le type de situation qu'un employeur doit gérer. En ce qui concerne les décisions déposées par l'employeur au soutien de ses prétentions, elles font référence à des actes suffisamment graves pour qu'il y ait eu dénonciation à la police, compte tenu de violence physique ou de harcèlement à répétition, d'agressivité et d'intimidation. Cela n'est pas le cas dans le présent dossier; la situation n'est pas extraordinaire, inusitée, rare ou exceptionnelle. En conséquence, il n'est pas injuste d'imputer les coûts des prestations de cet accident du travail à l'employeur.