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Utilisation inappropriée d'Internet avec un ordinateur

Le fait que l'historique de navigation du plaignant sur Internet n'ait pas été conservé par l'employeur ne justifie pas que la suspension qui a été imposée au plaignant pour l'usage inapproprié de son ordinateur soit annulée.
7 juillet 2025

Intitulé

Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec et Hydro-Québec (Émil Dobrescu), 2025 QCTA 82

Juridiction

Tribunal d'arbitrage (T.A.)

Type d'action

Grief contestant une suspension (3 mois). Rejeté.

Décision de

Me Nathalie Massicotte, arbitre

Date

5 mars 2025


Le plaignant a été suspendu pour les motifs suivants: i) avoir fait une utilisation inappropriée d'Internet avec l'ordinateur de l'employeur au cours d'une période considérable; ii) avoir notamment consulté en ligne du contenu pornographique durant ses heures de travail; et iii) avoir transmis un courriel contenant des propos irrespectueux à l'un des enquêteurs assignés au dossier. Le syndicat soutient que l'employeur a omis de protéger l'historique de navigation de l'ordinateur du plaignant, ce qui constituait, selon lui, la seule preuve permettant de déterminer si ce dernier avait volontairement ou non fait des recherches menant à des sites inappropriés. À ses yeux, cela doit mener à l'annulation sommaire de la sanction. Subsidiairement, il invoque le caractère disproportionné de la sanction.

Décision

Quant à l'historique de navigation, il convient de rappeler que l'article 20 du Code de procédure civile est une source de droit supplétif qui, pour cette raison, ne s'applique que lorsqu'un litige est né. Ainsi, en l'absence de texte législatif en droit du travail et lorsqu'il est question d'une preuve qui, comme c'est le cas en l'espèce, a disparu en amont du litige, il y a lieu de s'en remettre à la jurisprudence antérieure à l'adoption de cette disposition, qui reconnaissait une obligation implicite de conservation fondée sur l'obligation générale de bonne foi. Or, dans le présent dossier, non seulement la preuve ne possède pas la caractéristique d'être essentielle au débat mais, même si c'était le cas, on ne pourrait imputer sa disparition à la mauvaise foi de l'employeur. D'ailleurs, il n'est pas question d'une destruction de la preuve, l'employeur n'ayant tout simplement pas pris les moyens nécessaires afin de conserver celle-ci, sans intention de nuire au plaignant. Dans un tel contexte, il n'y a pas lieu d'annuler la sanction pour le premier motif invoqué par le syndicat.

Quant au fond, la preuve permet de conclure que le plaignant a utilisé l'ordinateur de l'employeur à des fins personnelles durant ses heures de travail à plusieurs reprises, et ce, alors qu'il savait que cela était interdit par le code de conduite de l'employeur. De plus, il a sciemment effectué des recherches sur Internet en utilisant des mots visant à générer les images illicites trouvées sur son ordinateur. Il a également utilisé son adresse courriel de travail à des fins personnelles, ce qui est également prohibé, et a tenu des propos irrespectueux dans un courriel. La sanction retenue par l'employeur pour une telle conduite était raisonnable, vu notamment les nombreux facteurs aggravants. En effet, malgré la preuve convaincante administrée par l'employeur, le plaignant s'est entêté à nier les faits, allant même jusqu'à renier sa version antérieure donnée aux enquêteurs. Cela démontre son incapacité à reconnaître ses erreurs et à s'amender. L'autonomie dont il jouit en raison du poste qu'il occupe et du fait qu'une majeure partie de son travail s'effectue en télétravail est un autre facteur aggravant. Il en va du même du fait qu'il savait qu'une politique de l'employeur interdisait l'utilisation du matériel de l'employeur à des fins personnelles. Bien qu'il ait effectivement cessé d'accéder à des sites illicites plusieurs mois avant le déclenchement de l'enquête, ce qui constitue un facteur atténuant, cela est insuffisant pour contrebalancer tous les facteurs aggravants.