Intitulé
Ville de Montréal et Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal, SCFP, section locale 301 (Mario Demers), 2025 QCTA 144
Juridiction
Tribunal d'arbitrage (T.A.)
Type d'action
Griefs contestant une suspension et un congédiement. Rejetés.
Décision de
M. René Beaupré, arbitre
Date
14 avril 2025
Le plaignant, qui occupait le poste de patrouilleur, est accusé par l'employeur de vol d'équipement, de vol de temps, d'insubordination et de manque d'intégrité, ce qui a mené à sa suspension, puis à son congédiement. Ces événements découlent d'une panne majeure d'électricité ayant touché la région dans laquelle réside le plaignant, alors que ce dernier est allé chercher, pendant ses heures de travail, une génératrice appartenant à l'employeur pour l'amener chez lui et l'utiliser avant de la rapporter le 27 mai 2022, une fois la panne réglée.
Décision
Contrairement à ce qu'il prétend, le plaignant n'avait pas obtenu de son ancien superviseur l'autorisation d'emprunter la génératrice. Bien au contraire, il a plutôt choisi d'agir malgré le refus clair de ce dernier. Sa prétention selon laquelle il existait une pratique de prêt d'équipement aux employés est écartée. Le «Code de conduite» en vigueur chez l'employeur prévoit le contraire, et le syndicat n'a pas été en mesure de produire en preuve un «cahier d'emprunt» ni de démontrer que le plaignant y aurait inscrit son emprunt, en admettant que le cahier en question ait bel et bien existé. Ainsi, l'employeur a démontré que les faits reprochés au plaignant sont avérés: ce dernier s'est approprié une génératrice sans la permission de ses gestionnaires en laissant croire à l'ouvrier responsable des conteneurs qu'il en avait besoin pour son travail. Cette appropriation était planifiée, car le plaignant en avait discuté au préalable avec un collègue avant d'aller rencontrer son ancien superviseur et il a quand même mis son plan à exécution malgré le refus de ce dernier. Il a également comploté avec un collègue patrouilleur afin de falsifier le cahier de patrouille pour laisser croire qu'il y avait indiqué préalablement l'emprunt de la génératrice, alors que ces notes ont été inscrites 2 jours plus tard, après que l'employeur eut appris la disparition de l'équipement. Les explications fournies lors de la rencontre dans le cadre de l'enquête sur les faits étaient fausses, et le plaignant n'a manifesté aucun remords ou regret pour les gestes commis.
Quant à savoir si la sanction imposée était appropriée dans les circonstances, il faut d'abord souligner que l'appropriation d'un bien de son employeur constitue une faute grave, d'autant plus lorsque l'employé s'est vu refuser de manière formelle la permission d'en prendre possession. Dans la mesure où le plaignant s'est emparé du bien de son employeur sans sa permission ou à son insu, il s'agit d'un vol, et ce, même si celui-ci n'avait probablement pas l'intention de conserver la génératrice après la panne d'électricité. Afin de déterminer si le lien de confiance était irrémédiablement rompu au moment du congédiement, il y a lieu d'analyser la question en fonction des critères suivants: 1) la nature du travail accompli et le niveau d'autonomie du salarié; 2) la préméditation du geste commis; 3) le comportement du salarié envers son employeur lorsqu'il a été placé devant les faits; et 4) son comportement devant le tribunal. Or, en l'espèce, les 4 critères militent manifestement en faveur de la conclusion selon laquelle le lien de confiance est rompu de façon irrémédiable.