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Plainte pour harcèlement psychologique rejetée

Une intervenante professionnelle de première ligne a subi du harcèlement psychologique en recevant des appels téléphoniques à caractère sexuel; sa plainte (art. 123.6 L.N.T.) est toutefois rejetée puisque l'employeur, un organisme offrant des services d'intervention, a pris des moyens raisonnables pour prévenir ce harcèlement et le faire cesser, notamment en bloquant les numéros de téléphone de certaines personnes.
8 juillet 2025

Intitulé

Cadet c. Centre de prévention de la violence familiale Générations, 2025 QCTAT 1508

Juridiction

Tribunal administratif du travail, Division des relations du travail (T.A.T.), Montréal

Type d'action

Plainte en vertu de l'article 123.6 de la Loi sur les normes du travail pour harcèlement psychologique — rejetée.

Décision de

Michel Maranda, juge administratif

Date

11 avril 2025


Décision

La plaignante occupe un poste d'intervenante professionnelle de première ligne pour un organisme offrant des services d'intervention aux jeunes et aux parents — le Tribunal considère que les appels téléphoniques importuns à caractère sexuel qu'elle reçoit constituent du harcèlement psychologique pour celle-ci — il s'agit d'une conduite vexatoire — les propos tenus et les actes effectués durant ces appels, qui se sont déroulés durant les quarts de travail, étaient hostiles ou non désirés par la plaignante et ils ont rendu son milieu de travail néfaste — ils ont un caractère répété dans le temps — cette conduite a porté atteinte à la dignité et à l'intégrité psychologique de la plaignante — la plainte a été déposée le 20 mai 2020 — la plaignante a reçu des appels à caractère sexuel entre le 21 mai 2018 et le 15 février 2019 dans le cadre de son emploi — cette conduite est survenue à l'intérieur du délai de 2 ans prévu à la loi, et plus précisément durant les 9 derniers mois de travail de la plaignante, même si celle-ci n'a pas témoigné des dates précises des incidents, de la teneur des mots utilisés ou des gestes en cause — malgré l'unique dénonciation effectuée à la fin de l'année 2017, le Tribunal doit s'assurer que la plainte a été déposée dans les 2 ans ayant suivi la dernière manifestation de la conduite visée et non de la dénonciation.

L'employeur offre une «ligne d'écoute» — ce service est gratuit, facilement accessible ainsi qu'informel et il permet de joindre une clientèle souvent aux prises avec de grandes difficultés — l'employeur, qui n'effectue pas de filtrage initial, est à la merci de personnes souffrant de problèmes de santé mentale ou mal intentionnées qui peuvent parler à un intervenant même si l'appel n'est aucunement relié au mandat d'aide de l'employeur — les appels à caractère sexuel existent — l'employeur prend des moyens raisonnables pour prévenir et faire cesser ces appels déviants, mais il ne peut totalement les éliminer — la liste des appelants récalcitrants et le blocage de leurs numéros de téléphone sont des moyens raisonnables pour prévenir le contact avec les intervenants — la procédure pour mettre fin à un appel indésirable reçu est également un moyen raisonnable de faire cesser le harcèlement psychologique lorsqu'il se manifeste — cette conduite est celle de tiers — avant de devenir des sujets connus, les harceleurs téléphonent au moins une fois sans s'annoncer — ils peuvent aussi utiliser des numéros masqués et parvenir à communiquer avec un intervenant de manière sournoise — un intervenant peut aussi entamer une conversation qui semble se dérouler conformément à l'offre de services de l'employeur avant de découvrir que l'appelant est en train de faire évoluer la conversation vers des fantasmes sexuels — dans les circonstances du présent dossier, l'employeur s'est acquitté de son obligation de prévenir et de faire cesser la conduite visée.